.Chapitre VIII.☆

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J'ouvre péniblement les yeux.
J'ai un mal de crâne horriblement douloureux.
Je sens un liquide chaud se déverser sur mon poignet, mais je n'y prête pas attention.
Mes maux de tête m'en empêchent. Je tente d'abord de me relever. Mais c'est en vain.
Mes tentatives, pour me mettre debout, sont vaines. Me lever me paraît relever de l'insurmontable.
J'entends la voix de quelqu'un qui s'approche. J'ai enfin réussi à ouvrir les yeux. Je suis allongée sur le pont.
J'observe un homme tenter de m'aider à me mettre assise. Il est très grand, il a le teint mate et les yeux d'un noir profond.
Il me prend le poignet d'un air quelque peu paniqué. Je décide à mon tour de regarder mon poignet. Je réalise que ce liquide chaud qui coulait sur mon poignet n'est autre que mon propre sang.
Mes yeux se tournent vers une bouteille qui avait du cassée à côté de moi. Je devais m'être endormie en enfonçant stupidement mon poignet dans les éclats de verre.
L'homme qui m'aide a en main une dague avec laquelle il commence à m'enlever les morceaux de verre plantés. Il prend ensuite une bande de tissu qu'il a posée à côté de lui, il l'imbibe d'alcool avant d'entourer mon poignet blessé de celui-ci.


- Comment vous sentez-vous ? Me demande-t-il.


- J'ai mal au crâne. Réponds-je.


Il rit, avant d'ajouter.


- Vous avez bien bu hier soir Demoiselle. Heureusement qu'il ne vous est rien arrivé de trop grave. Dit-il en resserrant le nœud qui faisait tenir mon pansement.


Il se relève doucement et commence à partir, quant à moi, je tente de me relever seule.


- Ne bougez pas ! S'exclame-t-il. Je vais vous chercher de quoi soigner votre mal de crâne Demoiselle.


Je me rassois. Je sens que mes paupières sont lourdes et que je replonge. Alors, je me rallonge, me disant au fond de moi qui si j'avais pu passer sans crainte une nuit allongée seule sur le pont, quelques malheureuses minutes en plus n'y changerai rien.
Je me suis rendormie un certain temps. Je le sais parce qu'en me réveillant, je ne suis plus sur le pont, mais allongée confortablement dans le lit de Will. Je me relève doucement et je remarque qu'on a déposé une corbeille de fruits murs sur la petite commode de bois. Je prends une pomme et deux poires que je mange avec un appétit monstre. Je me sens en pleine forme, mais je n'ai que très peu de souvenirs de la veille. Pour être honnête, je n'en ai même aucun.
Je réajuste mes vêtements avant de remarquer le pansement à mon poignet. Je le dévisage un long moment avant de réussir à me souvenir qu'un homme m'avait soigné après que je me sois endormie dans des débris de verres.
J'enfile doucement mes bottes, prenant grand soin de serrer correctement les lacets des deux côtés, puis je noue mes cheveux en une natte épaisse. J'ouvre doucement la porte et remonte les escaliers en bois jusqu'au pont avec délicatesse et lenteur.
Quand j'arrive en haut de l'escalier, tous les regards sont dirigés vers moi. Je les détaille tous un par un. Je reconnais le garçon qui m'a soigné ce matin. Quand il remarque que je le regarde, il me sourit. Le Capitaine, lui aussi, est sur le pont. Mais contrairement au jeune homme, lui, il ne sourit pas du tout. Je reste un moment, plantée là, à fixer le Capitaine au loin, dans le blanc des yeux sans que personne autour ne dise quoi que ce soit.


- Vous vous sentez mieux ? Me demande Will sur un ton que j'interprète comme de l'inquiétude.

J'ai l'impression d'entendre cette phrase à répétition en ce moment.


- Oui, je vous remercie. Je réponds doucement, sans pour autant détacher une seconde mes yeux de ceux du capitaine du navire.


- Vous ne pouviez pas savoir comme on était inquiet ! Dit un moustachu vers lequel je tourne mon regard, surprise.


- C'est vrai ça, on a bien cru que vous ne vous réveilleriez pas. Ajouta un grand blond, je le regarde, à son tour, surprise une fois de plus.


- Buvez moins la prochaine fois Madame. Rétorque sèchement Cal.


Quelques-uns encore me dire qu'ils avaient été inquiets pour moi. Mais plusieurs questions me viennent à l'esprit. S'ils étaient si inquiets, pourquoi ne m'avaient-ils pas directement mis dans le lit de Will ? Pourquoi m'avaient-ils laissée seule sur le pont toute la nuit ?

Je pense sincèrement que le Capitaine a sa part de responsabilité dans cette histoire.

Cette situation restait pour moi franchement absurde. Cela n'avait aucun sens, mais je fis comme si de rien était. L'équipage semblait m'apprécier suffisamment pour me saluer quand je passais devant eux, et s'inquiéter pour moi lorsque je me sentais mal.


-Tempête en approche ! Hurle au-dessus de nous la voix de la vigie qui me tire de mes pensées.

Au bout d'à peine trente minutes, le ciel commence, effectivement, à se couvrir d'un épais voile nuageux.
À présent, il est impossible de distinguer où se situe le soleil.
Le vent se met à souffler violemment et les vagues s'agitent progressivement.
Le bateau tangue de plus en plus.
Cette situation me fait l'effet d'un retour en arrière. J'ai l'impression d'avoir oublié la moitié des éléments de la veille. Au fond de moi, j'ai l'intime conviction d'avoir oublié quelque chose d'essentiel. Mais il m'est impossible de m'en souvenir. La tempête en approche me rappelle une sensation angoissante similaire à ce que j'avais pu ressentir à un moment hier. Mais je n'ai absolument aucune idée de ce dont il peut s'agir. Au fur et à mesure que le bateau avance, le vent souffle si fort qu'il manque de renverser un des mâts. Les matelots rangent les voiles pour éviter tout danger probable lié à celles-ci. J'essaye, moi aussi, de leur prêter main forte du mieux que je peux. Je suis chargée de vider les seaux d'eau salée, seaux nécessaires à cause des vagues qui commencent dès à présent à déferler sur le pont. C'est d'une violence sans nom.

Je m'exerce du mieux que je peux à la tache qu'on m'a confiée. Je ne pense plus à rien, je me concentre uniquement sur l'action que j'exécute à répétition. 

Remplir le seau, vider le seau.

Soudain, contre toute attente, je sens une main me saisir le bras droit avec fermeté. Le Capitaine me tire vers  lui, son revolver à la main. Il le pointe sur ma tempe.


- Messieurs, une femme à bord ça porte malheur. Voyez les tempêtes que cette sorcière nous fait subir. Et le mal qu'elle vous donne avec ses beuveries. Dois-je également vous remémorer qu'elle a tué notre plus fervent revendeur ? Hurle-t-il afin que tout le monde l'entende du mieux possible malgré le bruit énorme provoqué par la pluie battante.


- La carte. Me chuchote-t-il à l'oreille.


Je n'ai pas eu le temps de me débattre, qu'il me pousse à la mer. Je me fais engloutir d'un seul coup par une énorme vague.
Tout s'est passé si vite que personne n'a vraiment pu réagir ou même réaliser ce qu'il vient de se produire.

La dernière chose que j'entends est Will qui hurle mon nom.

La dernière chose que j'entends est Will qui hurle mon nom

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