.Chapitre XIX. ☆

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Trois mois ont passé.

Durant ceux-ci, j'ai appris à connaître Philippe-Edouard, que j'ai d'ailleurs renommé « Phil ».
C'est un garçon très calme et gentil. 

Il aime le piano, il en joue depuis ses huit ans. Il apprécie les soirées où il peut se poser à une table et simplement écrire ce qui lui passe par tête. Il adore quand tout est parfaitement bien organisé. Mais ce qu'il aime par-dessus tout ce sont les moments simples de la vie, ces instants ou la seule chose qu'on a à faire, c'est de se contenter de vivre.
Je m'entends vraiment bien avec lui, c'est devenu un ami. Et bien plus qu'un simple ami, un confident. 

Si bien que je commence, petit à petit, à reprendre goût à ce qui m'entoure. Il me réanime par sa présence. Il est devenu le soleil de ce château aussi gris que morose.

Ce matin, comme chaque matin depuis trois mois, je me réveille seule. Phil se lève toujours très tôt. Il me répète toujours que le meilleur moment d'une journée, c'est le soleil qui éclot doucement à l'Est. Il me dit chaque matin que le lever de soleil du jour est encore meilleur que celui de la veille et que tous ceux auparavant.


Ce matin, donc, quand je descends le grand escalier qui me mène au salon, je croise Phil. Il fait les cent pas dans le couloir et paraît inquiet.

- Elisa... Commence-t-il par me dire.

Je ne dis rien. Nous échangeons un simple et long regard. Je sais à travers ce regard que ce qu'il va m'annoncer n'est pas une bonne nouvelle. Il me prend la main et m'emmène au salon, afin de nous asseoir sur l'un des fauteuils de velours.

- J'ai quelque chose de très important à te dire. Dit-il d'un ton très peu assuré qui ne lui ressemble pas.

- Je t'écoute. Que se passe-t-il ? Demande-je inquiète.

- Avant toute chose, je veux que tu me promettes... -Il souffle- De ne pas m'attendre et de vivre ta vie comme tu l'entends.

Je le regarde interloquée sans comprendre ce qu'il veut dire par là.

- Je te promets que ne vais pas t'attendre et que je vais vivre ma vie comme je l'entends. Mais pourquoi dois-je te promettre ça ? Le questionne-je.

- Je vais partir sur un navire de guerre d'ici trois jours. J'y resterai pendant plusieurs mois. Je ne sais pas vraiment pour combien de temps exactement. -Il fait une pause pour me prendre les mains- Nous aurons pour mission d'éliminer les pirates des terres anglaises. Je tenais donc à t'en informer. Je suis sincèrement désolé de ne pas t'en avoir parlé plus tôt, je voulais être vraiment certain de vouloir partir avant de te dire quoi que ce soit. Je voulais avoir ton accord aussi, vu que tu es... Ma... Euh... Femme ? Dit-il gêné de la situation.

Je le regarde droit dans les yeux avant de sourire doucement.

- Merci de me l'avoir demandé Phil. Je viendrais à ton embarquement. Tu as ma plus totale bénédiction. Et je comprends ton inquiétude à mon égard, mais tu sais, je vais m'en sortir toute seule. J'en suis capable maintenant, grâce à toi. Lui dis-je en souriant.

Il me sourit en retour.

- Merci.



Trois jours plus tard, je suis sur le port, Phil m'enlace, me soufflant un « Merci d'être venue. », je lui chuchote en retour un « Tu aurais fait la même chose pour moi de toute façon ».

Puis il monte dans l'énorme bateau militaire nommé "La Tempête ".

Je le regarde s'éloigner et prendre le large. Phil me fait des grands signes au loin jusqu'à ce que je ne puisse plus le voir.

"La Tempête", ce nom m'évoque vaguement quelque chose. Mais je ne sais plus trop quoi exactement.
J'entame une grande réflexion sur le trajet menant jusqu'au château. Je tente désespérément de me souvenir de ce que le mot "tempête" m'évoque.

Une phrase du vieux me revient en tête : « Prends garde aux tempêtes, tu pourrais t'y perdre. »


Phil.

Phil ne reviendra peut-être jamais de sa mission.


Il est désormais trop tard pour prévenir qui que ce soit. Le navire est déjà loin. Et puis ce ne sont pas là des certitudes. Il ne s'agit que d'une simple hypothèse.


De toute manière comme à chaque fois, le destin fera ses choix.


Je rentre donc au château.
Je suis perdue dans mes pensées.
J'ai peur pour Phil, j'imagine toutes les choses horribles qui pourraient lui arriver sur ce navire de la mort.
J'essaye de me remémorer de tout ce que m'avait dit le vieux. 

La deuxième phrase qui me revient à l'esprit est : « N'oublie jamais les détails Elisa ».

Je porte donc mon attention sur le couloir qui mène à ma chambre. J'ai conscience que c'est stupide. Sous prétexte que je repense à ça, les détails seraient plus importants. 

C'est absurde. 

Mais ça ne me stoppe pas pour autant. J'allais arrêter de fixer l'intégralité de mon couloir quand soudain mes yeux se posent sur un tableau de ma mère.

Elle est magnifique.

Je porte mon attention sur ses yeux verts. J'ai les mêmes qu'elle.
Ses cheveux sont noués en un chignon défait. Derrière elle, il y a une pile de livres.
Elle est parée de nombreux bijoux de grande valeur.
Mais ce qui attire le plus mon attention, c'est une bague en or, ornée d'un rubis d'un rouge flamboyant. Ce rubis, je ne l'ai jamais remarqué auparavant.

Les détails.

Ce mot apparaît comme un flash dans mon esprit. J'ai l'impression d'être plus lucide le temps d'un instant.

Mon attention se porte alors sur chaque détail du tableau. La pile de livres placée derrière ma mère attire particulièrement mon attention. Le tableau est si détaillé que même les titres ont été reportés sur la tranche des livres.
Ce sont des contes qu'elle me lisait quand j'étais petite.
À l'exception d'un seul d'entre eux.
Il a une reliure brune.
Sur la tranche, est inscrit, ce que je déchiffre comme étant écrit : « Le Sempiternel ».

C'est de la folie. Il devait s'agir du hasard.

Mais, et si ce n'est pas une coïncidence ? 

Mais, et si ce n'est pas une coïncidence ? 

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Le SempiternelOù les histoires vivent. Découvrez maintenant