.Chapitre XXIV. ☆

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- J'avais tout de même une question à te poser, tu as vraiment cru à cette histoire de malédiction et de sacrifices ?


Quoi ?

Comment ça ?

Je me sens stupide. Tout est donc faux ?

J'étais déjà perdue, mais alors là, j'atteins le sommet de l'errance.

- Bah alors, tu ne réponds plus ? Me dit Cal en se penchant vers moi.


Je ne sais pas ce que je fais ici. Je ne sais même pas où je suis. Je ne suis plus sûre de rien. L'incertitude prône au-dessus de moi.


- Si votre stupide malédiction n'existe pas, à quoi vous sert la pierre ? Demande-je.


Il me regarde avec dédain.

- La pierre permet d'avoir le pouvoir absolu, elle le confère à celui qui la détient. Le capitaine devient donc invincible. M'a-t-il répondu.

Je le regarde droit dans les yeux.

- Et donc penser qu'on est invincible contre tout, c'est moins fou que de penser que vous faites des sacrifices humains ?

Je vois qu'il semble perplexe face à ma remarque.

- Peu importe. Me dit-il après un court instant. - Tu as fait tout ce que nous voulions de toi sans même qu'on ait à te faire du chantage. Ce n'est pas merveilleux tout ça ? Dit-il avec un stupide sourire narquois sur le visage. Pas vrai Will ?

À présent, nos deux regards sont tournés vers Will.

- Malheureusement, notre cher Will a retourné sa veste et il a cherché à t'aider. Quelle tragédie pour lui. Et pas une seule fois, tu n'as l'a vraiment remarqué. Depuis le début, tout le monde te ment, Elisa. Et lui, il a tenté de t'en avertir. Mais j'ai l'impression que quelques détails t'ont échappé. Ça doit être douloureux pour vous. Mais chacun a une raison différente pour justifier sa douleur.

Il fait une pause dans son monologue pour profiter des regards dépités que nous nous lançons.

- Nous n'avons eu qu'à jouer les pauvres hommes d'équipage martyrisés par notre méchant capitaine pour que tu gobes tout. Oh et c'est une chance pour toi Jeanne, enfin Elisa., car tu vas découvrir qui tu es. Reprend Cal en riant encore plus fort que précédemment.

Puis il part appeler deux hommes. Il s'agit, une fois encore, de Rave et d'Adam. Ce sont eux, qui visiblement sont chargés de mon transport à chaque fois. J'allais protester et tenter de me battre, mais Cal se met à pointer une arme à feu sur Will. Alors je me laisse sagement conduire.

- Finalement, toutes tes chances avec elle ne sont pas perdues mon gars. Dit Cal d'un air moqueur en claquant la grille de la cellule.


Ils me conduisent dans la cabine du capitaine. Ils m'attachent ensuite sur mon habituelle chaise en bois, placée en face du bureau désordonné. Les liens sont très serrés, je ne peux donc pas bouger. Ils me laissent seul à seul avec le capitaine, refermant derrière eux la porte de la cabine humide et poussiéreuse.


- Elisa Owen. Commence par dire le capitaine. - Toute ma vie, j'ai espéré ne jamais te revoir. Je savais que si je te revoyais un jour sur ce navire, ça signerait la fin de tout. Je sais que tu m'en veux. Je n'ai pas eu le droit de te dire qui j'étais la première que je t'ai vue. Mais j'imagine que je peux te le dire aujourd'hui puisque c'est la dernière fois que je te revois. J'ai espéré que ta mère ait détruit ce foutu rubis. J'aurais voulu qu'il brûle. Qu'il disparaisse. Sanglote-t-il.

Je n'ai jamais vu un homme dans un tel état, encore moins un capitaine pirate. Mais ces pleurs ne me font ni chaud ni froid. Je n'éprouve que du dégoût à son égard.


- Je sais que c'est vous qui avez tué ma mère ! Hurle-je.


- Je suis tellement, tellement désolé que tu doives penser ça. Il m'a fait jurer de ne rien te dire. Depuis le début, c'est lui. Mais si je te dis quoi que ce soit... Je meurs. Dit-il sa voix se brisant à chaque mot.


- De qui parlez-vous ? Réplique-je sèchement.


- Il te ment à toi aussi. J'aimais tellement ta mère, tu es tout ce qu'il me reste d'elle. Souffle-t-il entre deux sanglots.


- Comment osez-vous dire ça, monstre ! Crie-je.


- Elisa, je veux... Non, je t'ordonne, de ne jamais, jamais le laisser faire. Me supplie-t-il.

- Laisser qui faire quoi ? Qui êtes-vous réellement capitaine ? Dis-je cinglante.


- Ton père n'est pas celui que tu penses qu'il est... Balbutie-t-il.


- Pourquoi me parlez-vous de mon père ? Demande-je interloquée.


- Ta mère et moi avons pensé qu'il était plus sage de te laisser chez son frère, ton oncle, pour qu'il t'élève et te préserve. Pour que, jamais, tu n'ai à vivre ce que, nous, avons vécu. Explique-t-il comme il peut.


- Vous mentez comme vous respirez. Qui. Êtes. Vous. Vocifère-je.


- Trouve le Sempiternel. Tu comprendras. Tu comprendras tout. Pleure-t-il.


- N'est-ce pas le nom de ce navire ? L'interroge-je.


Le capitaine ne bouge plus. Les yeux dans le vague, il reste, là, bouche ouverte sans ne plus rien dire.

- Capitaine ? N'est-ce pas le nom de ce navire ? M'agite-je.

Une tache rouge commence à apparaître sur sa chemise. Du sang coule de sa bouche devant mes yeux horrifiés.

- Capitaine ? Je tente d'articuler.

J'essaye de me détacher, mais je n'y parviens pas le moins du monde. Cal, Rave et Adam entrent calmement dans la cabine.

- Qu'est-ce qu'il a ? Pourquoi crache-t-il du sang ? Panique-je.

Ils commencent à me détacher sans un mot, sous le regard froid de Cal.

- Il est... Mort ? Demande-je la gorge nouée.

Ils m'ignorent superbement et commencent à me traîner hors de la cabine du capitaine.

- Répondez-moi ! Il est mort ? Dites-moi ce qu'il a ! Crie-je complètement désemparée par cette scène cauchemardesque.

Ils me tirent jusqu'au milieu du pont, je me débats comme je peux, mais rien n'y fais.


« Jetez-la à l'eau. »


Personne n'a prononcé cette phrase de vive voix. C'est comme si je l'avais entendue dans ma tête. Rave, Cal et Adam aussi ont dû l'entendre puisqu'ils se mettent à me tirer vers la rambarde de bois.


- Qu'est-ce que vous faites ? Lâchez-moi ! Hurle-je tout en tentant de me débattre.


Mais ils me tiennent trop fermement. Je ne peux rien faire.
Ils me font doucement passer la rambarde. Je tremble de peur. Il me lâche dans l'eau. Ce n'est plus de l'eau, c'est un gouffre. Il m'engloutit. 

Je vois au loin l'œil de Cal scintiller. 

Et je tombe.



Je me redresse d'un coup. 

Je suis allongée sur le sol de la cellule du navire. Will est à côté de moi, il dort paisiblement. Il porte son pansement. 

Je ne me souviens pas un seul instant m'être endormie.
En me redressant, j'ai dû le réveiller, puisque celui-ci s'approche de moi afin de me prendre dans ses bras et il se rendort ensuite.

Je suis terrifiée.

Terrifiée et perdue.

Je vis un cauchemar.


Un cauchemar dont j'ai peur de m'éveiller.

Le SempiternelOù les histoires vivent. Découvrez maintenant