41 / Poursuivie par la malchance ?

665 104 2
                                    

Pélagie discute avec Clotilde près du buffet quand elle voit l'homme remonter un escalier, puis disparaître par une porte à l'étage. C'est étrange parce qu'elle ne le connaît pas. Pourtant, sa silhouette lui est familière. C'est un souvenir lointain. Un souvenir de l'enfance. Est-ce que cet homme est un mécène de l'Institut ? Il est probable qu'ils soient plusieurs dans cet endroit. Les donateurs de l'Institut sont nombreux et font partie du cercle de très riches qui sont présents ce soir. Alors pourquoi, lui plutôt qu'un autre ?

— Pélie, je crois que ce monsieur là-bas, te trouve à son goût.

— Pardon ?

— Il y a un beau blond qui n'arrête pas de te dévorer des yeux.

Pour voir de qui parle son amie en toute discrétion, Pélagie se tourne vers un miroir – il y en a plein la pièce, ce qui démultiplie les visions et perturbe la perception générale de l'espace –, et elle sourit.

— Merci bien, Clo. Un vieux beau avec la calvitie avancée qui ne lorgne que sur mon décolleté... ça ira...

— Ah ! C'était pour te faire réagir. Tu paraissais ailleurs.

— Tu as raison ! Je suis venue pour m'aérer la tête et glaner des idées pour les futurs évènements de la boite.

— Donc pour t'aérer la tête, tu bosses...

— Mais non. Regarde, pour ça, je bois, dit Pélagie en attrapant une coupe de champagne. Au fait, comment se fait-il que ton Nicolas ait ses entrées dans ce genre de raout ?

— Mon père est un ponte de la finance, dit l'intéressé qui revient avec quelques petits fours joliment disposés sur une assiette en bambou.

— Rhooo... mais tu es un bon parti en fait... Tu es sûr de préférer les blondes ? lance Pélagie en rigolant. Ce qui fait rougir le jeune homme illico presto.

— Pas touche Pélie. Trouve toi le tien.

— Mes quatre frères aînés sont déjà casés, ajoute Nicolas.

— Quatre frères ! Purée ! Tes parents n'ont pas chômé !

— Et deux sœurs.

— Nom de nom ! s'exclame Pélagie.

Mais ça n'est pas le fait que Nicolas ait six frères et sœurs qui la fait s'étrangler sur sa gorgée de champagne. C'est la présence de quelqu'un qu'elle ne s'attendait pas du tout à voir ce soir : Faust Wagner-Smith ?

Il vient d'apparaître au bras d'une femme sculpturale. Une Grâce Kelly en puissance. Une beauté classique et tellement classe, que Pélagie se sent brusquement d'une vulgarité sans limite dans sa robe verte. Alors, voilà son genre...

— Tiens ? Qu'est-ce qu'il fait là, lui ? dit simplement Clotilde. Tu l'as invité ? finit-elle en se tournant vers son amie.

Mais Pélagie a déjà pris le large. Elle fend la foule des invités sans toucher qui que ce soit pour s'approcher du bar au fond de l'immense salle. D'ici, à ce que le « Vieux Stagiaire » arrive jusqu'ici, elle aura eu le temps d'ingurgiter la dose nécessaire d'alcool pour supporter la vue de sa magnifique compagne.

Mais qu'est-ce qu'elle avait cru aussi ? Rien, en fait ! Depuis le début, elle sait qu'il y a anguille sous roche avec ce type. Tu parles d'une anguille ?! Il a carrément une océanide au bras ! Une océanide ? Non, ça n'est pas assez. Une naïade ! Une putain de naïade blonde et magnifique ! Pélagie est sûre qu'elle a en plus un cerveau en conformité avec les exigences de « Môsieur » Wagner-Smith ! Aucune vulgarité chez cette fille ! Elle est parfaite du bout des cheveux aux bout des doigts de pieds !

Argh, Pélagie a envie de crever dans un seau à champagne vide. Ce con a réussi à lui gâcher sa soirée !

— Chère beauté des Highlands, vous dansez ?

Pélagie se tourne lentement vers son interlocuteur. L'homme au teint mat est quelconque, mais son regard noisette a une petite étincelle d'espièglerie accentuée par le sourire charmeur qu'il affiche. C'est toujours mieux que le blond en pleine descente d'organe. La jeune femme pose le verre que le barman vient de lui servir et sourit aimablement à son futur cavalier.

— Je dois vous prévenir que la beauté des Highlands risque fort de vous écraser impitoyablement les pieds. Je ne suis pas très douée pour danser.

— Aucun problème. Je vais vous guider.

Et c'est ce qu'il fait.


Pélagie aussi !Où les histoires vivent. Découvrez maintenant