48 / Chute non mortelle et poney fringant

671 110 8
                                    

Pélagie bute, glisse, bat des bras sans pouvoir retenir la chute de son corps de l'autre côté du chien. Même amorti par l'étole, l'impact n'en est pas moins brutal. Une ribambelle de jurons s'échappe des lèvres délicieuses de la « princesse » en perdition, avant qu'elle ne se taise, son orgueil définitivement blessé par tout ce qu'elle vit ce soir.

La jupe en bataille, les pieds posés sur le dos de l'animal qui n'a pas bougé d'un poil, les bras en croix, Pélagie ne bouge plus non plus. Faust, qui s'est précipité en hurlant un « Hercule, dégage de là ! », se penche sur la jeune femme qui a fermé les yeux.

— Pélagie ? Ça va ? Votre tête ?

— Je crois que je viens de me faire une commotion cérébrale à cause de votre ridicule clébard. J'ai au moins perdu une faculté mentale. Reste à savoir laquelle. Probablement celle qui aurait pu m'empêcher de revendre ce bestiaux à un centre équestre...

À moins que Faust n'ait adopté les comportements étranges de son chien, le coup de langue râpeuse sur sa joue vient lui confirmer qu'elle ne se débarrassera pas du « ridicule clébard » en question aussi facilement.

— Vilain Hercule ! Dégage, j'ai dit ! C'est ta faute, oui ! Espèce de patate ! Allez ! Au coin !

— C'est bon, dit Pélagie en se relevant sur ses coudes.

Ce qui met son visage à quelques centimètres de celui de Faust qui la fixe sans bouger. Il a pourtant une furieuse envie de l'embrasser.

— Pchitttt, fait-elle en agitant la main entre leurs deux visages. Vilain Faust ! Allez ! Au coin...

L'intéressé s'écarte en souriant et l'aide à se relever. Cependant, au lieu de lui tendre la main et de la libérer ensuite, il l'enlace dès qu'elle est debout.

— Je ne suis pas mon chien, Mlle Cervin. Je n'obéis pas aussi facilement.

— Parce que vous trouvez que votre « poney » obéit facilement ? répond-t-elle ironiquement alors qu'elle sent la langue du chien lécher sa main.

— Alors disons que je suis le même genre de corniaud. Je n'abandonne pas quelque chose qui me tient à cœur.

Et sur ses mots, il l'embrasse de nouveau. Cette fois, elle ne le repousse pas. Enfin, pas tout de suite. Elle partage, puis s'écarte.

— Bien, M. Wagner-Smith. Ceci étant fait, je me vois obligée de vous quitter. Parce qu'il n'est pas question que je succombe à vos charmes aussi facilement, que la soirée a été suffisamment chargée en émotions diverses et que j'ai un emploi du temps très serré demain. Nous nous verrons lundi pour votre avant-dernier jour à l'agence.

— Non ! Quoi que vous ayez prévu pour demain, j'en suis. En plus, vous connaissant, il doit s'agir de quelque chose en relation avec les « profanateurs de sépultures ». Il vaut mieux que je sois là. Un esprit lucide et posé.

— Lucide et posé ? dit-elle en se rapprochant de lui avec un air matois.

Elle l'embrasse alors passionnément, ce qui a immédiatement l'effet escompté. Faust est très, très près de perdre la tête. Mais la jeune femme s'échappe avant qu'il n'ait pu aller plus loin que la serrer contre lui.

— Allumeuse, lance-t-il en la regardant disparaître.

— Vile flatteur ! réplique-t-elle alors qu'elle ferme la porte en riant, ses escarpins à la main.


Pélagie aussi !Où les histoires vivent. Découvrez maintenant