47 / Montée en puissance

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Si Pélagie est d'ordinaire plutôt vive d'esprit, dans la situation présente, elle ne voit pas venir le danger. Ni le regard intense posé sur elle, ni l'approche féline ne lui mettent la puce à l'oreille. Son esprit est entièrement occupé par l'éventuel rachat de l'agence, et ce qu'il implique pour son avenir.

Alors quand Faust se penche vers elle – un peu –, qu'il enveloppe sa nuque de sa main gauche pour attirer son visage près du sien, et pose ses lèvres sur les siennes, au lieu de fermer les yeux et d'apprécier le baiser, Pélagie ouvre deux billes étonnées et le repousse de surprise.

— Ça va pas la tête ! s'écrie-t-elle spontanément. Vous êtes encore mon stagiaire, je vous signale ! Et peut-être, mon futur boss ! Pas question ! D'autant, que je n'ai pas encore l'assurance que vous ne faites pas partie du problème de « profanateurs de sépultures » !

— Puisque je vous dis que je n'ai rien à voir avec votre bienfaiteur ! Et puis, c'est quoi ces idées rétrogrades concernant nos positions hiérarchiques respectives ! Bordel ! éclate Faust en s'écartant à son tour.

Hercule dresse les oreilles. Il n'a pas l'habitude d'entendre ce ton dans la voix de son maître. Enfin, à part quand il a fait une énorme bêtise, genre défoncer un coussin du canapé ou avaler le poulet sur le comptoir de la cuisine. Or, il est bien sûr de n'avoir rien fait de ce genre ces trois derniers jours. Enfin, à peu près sûr.

— Idées rétrogrades ! Je vais vous en foutre moi des idées rétrogrades !? Vous savez ce qui se passera si jamais quelque chose se passe entre nous ? Des rumeurs, des persiflages, des histoires sans fin ! Ça, c'est rétrograde, mais ce sera mon quotidien à moi ! Pas à vous, rassurez-vous ! Vous serez hors du coup. Parce que je serai forcément la seule à blâmer. Je suis une femme. C'est moi la tentatrice...

— N'importe quoi ?! Vous parlez comme votre stagiaire renfrognée !

— Mais parce qu'elle a raison. Pas sur tout ! Mais sur ça, elle a raison.

— Et donc parce que la société est dure avec les femmes, il ne peut rien y avoir entre nous.

— Non, répond Pélagie dont le corps entier à envie de dire le contraire.

C'est qu'il est encore plus attirant, cet andouille, quand il la fusille comme ça de ses yeux noirs.

— Et puis... franchement, on ne peut pas se voir plus de deux minutes sans se sauter à la gorge... finit-elle par dire en détournant le regard.

— Mais ça, c'est votre faute ! lance Faust en faisant de grands gestes avec une certaine véhémence.

— Ben, tiens ! réplique Pélagie en croisant les bras sur sa poitrine.

Le plaid est tombé. Le décolleté est à découvert. Faust, comme hypnotisé, ferme la bouche alors qu'il allait relancer la dispute. La jeune femme attend une seconde, puis intrigué tourne son visage vers lui, surprend son regard sur ses seins mis en valeur par ses bras, qu'elle décroise aussitôt. Elle recule alors vers la porte. Il faut qu'elle sorte d'ici. Parce qu'elle n'est pas sûre de résister à un deuxième assaut de Faust Wagner-Smith.

Sauf que dans son mouvement, elle rencontre le grand corps d'Hercule qui s'est dressé en entendant la discussion s'enflammer. Ce chien est très sensible. Surtout quand il s'agit de « grands » qu'il aime. Et la jeune femme, dont chaque mouvement émet un froufrou qui lui donne envie de jouer, dont l'odeur lui donne envie de la lécher, fait désormais incontestablement partie des « grands » qu'il aime.


Pélagie aussi !Où les histoires vivent. Découvrez maintenant