Chapitre 4

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Je scrute les vidéosurveillances de l'hôtel, mais je ne vois rien, principalement parce que la caméra de l'un des ascenseurs est en panne. Je visionne à partir du moment où la police et le FBI ont été informés du meurtre et de la chambre où se trouvait Saleh. Je regarde des personnes entrer et sortir, mais je ne vois rien de suspect. Je surveille attentivement ceux avec un sac, une valise, un manteau long, je surveille les couloirs, je passe un très, très long moment dessus, au point que les yeux me brûlent. Je recoupe ceux que je vois avec les informations que nous a fourni l'hôtel. C'est un travail fastidieux. Je me lève, je m'étire, je me balade dans l'aire ouverte, je vais me chercher un café quand ça me frappe, comme lorsqu'un cycliste qui ne fait pas son stop percute une voiture.

« Oh putain ! »

Je balance mon café avec le gobelet en carton dans le lavabo de notre petite salle à café et je traverse les bureaux en courant, sous les regards de tous mes collègues. Je me remets sur les écrans, cherchant et cherchant encore. Je ne la trouve sur aucun des étages.

« Paul ! »

Mon collègue fait le tour de son bureau sans rien dire, hoche la tête en voyant mon doigt sur l'écran. Je lui montre chaque caméra des étages à côté des ascenseurs.

« Donc, elle sort.

— Mais n'y entre pas », dis-je.

« Elle a peut-être fait une passe dans l'ascenseur ? »

J'adore Paul, sur le terrain je peux toujours compter sur lui pour assurer mes arrières, mais dans la vie de tous les jours qu'est-ce qu'il m'emmerde.

« Ce n'est pas une pute. Regarde sa robe et ses escarpins, il y en à pour plus de quatre mille balles.

— Une escorte ? C'est une pute de luxe. Regarde, on ne voit pas son visage. À la seconde où elle sort de l'ascenseur jusqu'à ce qu'elle sorte de l'hôtel, elle a le nez rivé sur son téléphone, sûrement en train de confirmer son prochain rendez-vous.

— Elle évite les caméras, Paul. Ce qui signifie que son matériel est encore dans l'hôtel. » Je claque des doigts en me levant. « Le toit de la cabine de l'ascenseur ! »

Paul ne dit rien, il se fie toujours à mon instinct. J'ai rarement tort. Déjà parce que je suis une femme, ensuite même quand j'ai tort j'ai raison. Paul est souvent très con, moi j'ai quasiment toujours raison. Récupérant nos armes dans un tiroir de nos bureaux, nous nous dépêchons de rejoindre les ascenseurs, direction le parking. C'est une autre chose qui fait que j'aime mon travail, la conduite à haute vitesse. Nous suivons des formations données par des pilotes, et honnêtement, c'est impressionnant. Rouler à fond en essayant d'anticiper les manœuvres des autres conducteurs, les cyclistes, les piétons, c'est intense. Ce n'est pas parce que j'ai des lumières clignotantes rouges et bleus dans la calandre de ma voiture et sur mon tableau de bord, que je klaxonne en permanence, que les automobilistes se poussent systématiquement. Paul déteste lorsque je conduis, il ne dit rien, je sais à quoi il pense, notamment concernant les femmes au volant, mais moi je connais une vérité qu'il n'avouera jamais. J'ai un meilleur score que lui en conduite urbaine extrême. Je fais quasiment un sans faute à chaque fois. J'ai beau justifier le piéton que je renverse à chaque fois, l'examinateur m'enlève toujours un demi-point. Moi, je sais que l'homme qui traverse est un pédophile recherché, je lui ai même montré une photographie sur mon téléphone. La coïncidence me coûte un demi-point à chaque fois avec un clin d'œil, c'est un running gag entre nous. Je ne veux pas humilier les gars avec un score parfait.

« Voiture, voiture, voiture », murmure Paul en s'accrochant à la poignée alors que je change de voie en frôlant une voiture qui change de voie sans mettre son clignotant, malgré mes gyrophares.

FBI : Dossier 42 - Il suffira d'une balleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant