Chapitre 9 : Perdues

6 1 0
                                    

Thaïs ouvrit les yeux. La nature autour d'elle demeurait encore un tableau merveilleux, mais cela n'empêchait aucunement l'estomac de la petite fille de grogner lorsqu'elle s'éveilla. Elle tourna la tête vers son amie, encore à moitié dans ses rêves.

- Mon ventre grogne, dit-elle.

- Moi aussi, répondit Emilie en bâillant.

- Où est-ce qu'on peut trouver à manger ?

Thaïs se leva tout en réfléchissant sur la nourriture potentiellement comestible dans la forêt, mais son amie la coupa dans ses réflexions.

- Il y a peut-être une ville juste à côté, on y trouvera toute la nourriture qu'il nous faut et on pourra appeler la police.

- Mais, on n'a pas d'argent... remarqua intelligemment Thaïs.

Ceci dit, trop tard pour répliquer quoi que ce soit, la brunette partait déjà. La faim guidait son esprit.

Un pas. Encore un pas. D'autres pas suivaient. Aucun chemin n'était tracé dans cette forêt. Elles marchaient depuis si longtemps que la faim leur tiraillait l'estomac. Cela devait faire plus d'une heure ou deux qu'elles avançaient. L'une et l'autre perdait patience et confiance.

- Bah y a toujours pas de ville, dit Thaïs en s'arrêtant.

Emilie ne retint pas ces mots. Il y avait forcément une ville quelque part. Simplement, peut-être se trouvait-elle loin. Thaïs n'y croyait pas. La fatigue l'emportait de nouveau sur la randonnée improvisée. Ainsi, sans demander quoi que ce soit, elle quitta le chemin. A deux cents mètres se trouvait un petit lac. Idéal pour se reposer d'après Thaïs. Elle s'assit au bord d'un lac. Défit les lacets de ses chaussures et les retira. Enleva ses chaussettes rendues humides par la transpiration puis plongea ces pieds endoloris dans l'eau. Emilie, peu réceptive à ce changement de route se laissa tout de même bercée par cette tranquillité.

Elle rejoignit alors son amie, et comme elle se délesta de ses baskets et de ses chaussettes blanches maintenant presque transparentes.

Les fillettes gesticulaient leurs pieds dans la belle eau, apaisant leurs douleurs plantaires.

- T'habitais où avant ? demanda Thaïs.

- A Rennes, et toi ?

- Une petite commune dans les Alpes. C'est où ça, Rennes ?

- En Bretagne.

- Ah d'accord..., Thaïs leva les yeux au ciel. Emilie ? Tu sais où on est ?

Celle-ci fit non de la tête d'un air triste.

- T'avais beaucoup d'amis ? continua Emilie.

- Quelques-uns. Je suis triste de les avoir perdus...

- Tu crois qu'on les a perdus nos amis ? fit-elle surprise.

- Oui, on s'est même pas où on est et comment retourner chez nous... dit Thaïs.

Sous le stress de ne jamais revoir ses amis, cette dernière battit ses pieds de plus en plus fort dans l'eau, jusqu'à brusquement les sortir de l'eau fraîche. Emilie reçue de l'eau sur ses jambes et un peu sur ses bras. Elle plissa ses yeux en observant sa nouvelle amie. Par vengeance, elle battit aussi ses pieds avec puissance. Elles se lancèrent dans un concours amusant de projections d'eau. Elles riaient. Toutes les questions qu'elles se posaient quittèrent un moment leur cerveau. La joie. Juste la joie et l'insouciance emplirent leurs pensées.

Dix minutes plus tard, la plus mouillée était Emilie. Le jeu terminé, Thaïs reporta alors son regard sur le ciel. Emilie, mauvaise joueuse, profita de ce moment. A l'aide de ses deux mains, elle poussa son amie, qui, ne s'y attendant pas, tomba dans l'eau.

Thaïs, surprise, redressa la tête hors de l'eau. Toussa. Cette dernière avait bu la tasse dans sa chute.

Le regard de celle-ci se fit sombre et sournois, tandis qu'Emilie riait à toute gorge. Thaïs attrapa la cheville de son amie, sans qu'elle ne le remarque. Et la fit glisser dans le lac à son tour.

Le sourire aux lèvres, Emilie releva la tête de l'eau. Riait.

Le sourire ne disparaissait plus de leur visage.

Quelques brasses et plongées plus tard, elles regagnèrent la rive. Heureuses. Elles sortirent de l'eau, toutes trempées. Leurs longs cheveux dégoulinaient dans leur dos. Debout sur le bord du lac, chacune attrapa ses mèches comme pour faire une queue de cheval, tourna les mèches et les pressèrent à l'aide de leurs mains.

- Bon, j'ai toujours faim moi, dit Thaïs entendant son ventre grogner, après s'être essoré les cheveux.

Elles remirent leurs chaussettes sales et odorantes, puis passèrent leurs chaussures avant de repartirent à la recherche d'une ville à proximité.

- Attends Emilie !

Thaïs s'était arrêtée net. Emilie se retourna, sans comprendre. La tête baissée, la jeune tête blonde encore mouillée fixait un coin d'herbe. Elle ne bougea plus pendant un long moment, puis redressa la tête. Ses yeux à nouveau emplis de peur. Emilie vît à travers les yeux de son amie, ce qui la tourmentait : du sang tachait l'herbe. Avant qu'Emilie ne puisse réagir, elle sentit son amie tomber à la renverse. Ni une ni deux, Emilie se précipita sur Thaïs pour la retenir. Emilie parvint à la rattraper, avant qu'elle ne touche le sol violemment.

Elle l'allongea doucement dans l'herbe, lui tapotant gentiment les joues pour la réveiller. Cette dernière rouvrit enfin les yeux. Doucement et avec l'aide d'Emilie, Thaïs réussit à s'asseoir.

- Du sang ! Tu as vu ?!! Juste ici !

Les deux jeunes filles risquèrent un regard là où elles virent la tache rouge. Rien. Plus rien. Cela devait être une illusion, car l'herbe était bien verte.

Aucune des deux ne comprenait ce qui s'était passé. Il fallut un peu de temps pour se relever sans difficulté. C'est en aidant son amie à se remettre debout, qu'Emilie aperçue quelque chose dans le buisson tout près d'elles. Elle se demanda comment ne l'avaient-elles pas vue plus tôt.

- Des framboises ! s'écria Emilie toute joyeuse.

Thaïs reprit immédiatement la forme. Tenant fermement sur ses jambes à présent, elle put se ruer sur les fruits.

Elles en mangèrent jusqu'à épuisement du stock, bien que cela ne fut suffisant pour l'estomac qui en demandait encore.

A moitié repu donc, elles reprirent le chemin de la ville... mais encore fallait-il qu'il y en ait une dans les environs... 

Les InséparablesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant