Chapitre 44 : Terreur

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Emilie coucha de nombreux mots sur des feuilles blanches ce soir-là. Lorsque l'inspiration s'estompa, au milieu de la nuit, elle put enfin s'allonger dans son lit et dormir à tête reposée.

Cependant, la paix ne voulait pas demeurer dans son cerveau. Ce dernier continuait de travailler, mais pas sur des textes de chansons. Emilie revoyait un revolver. Puis du sang s'immisça dans ses doux rêves. Le tapis était devenu rouge. Elle le regardait, les larmes se déversant à la manière d'un torrent. Un homme se tenait devant elle, à cette époque Emilie n'avait encore que 11 ans. Le regard de cet homme avait le pouvoir de transpercer un cœur. Tuer d'un regard. Un regard aussi noir qu'il enlève tout espoir de vivre.

Emilie tourna la tête. Elle pouvait voir ses parents encore vivants. Heureux. Puis, d'un seul coup, sans qu'elle puisse comprendre quoi que ce soit, les yeux de ses parents se vidèrent de toute vie. C'était comme si une balle dans le torse décolorait les yeux. Avant les pupilles étaient d'un bel éclat bleu, marron ou vert, et sans prévenir l'éclat se transformait en un trou noir.

Emilie se réveilla recroquevillé au milieu de son lit. La couette à moitié sur elle. Se réveiller dans la nuit sombre la perturba tant, qu'elle crut voir deux yeux en face d'elle. Elle recula. Les yeux disparurent rapidement, mais la peur envahissait encore son esprit. Elle descendit l'échelle des lits superposés et se faufila sous la couette de Thaïs, ce qui réveilla celle-ci.

- J'ai fait un cauchemar, dit Emilie la voix tremblotante. J'ai vu le chef de la mafia... mes parents...

- Chut, calme-toi, dit Thaïs le plus calmement possible.

- J'ai cru qu'il revenait...

- Il a disparu, Emilie.

La jeune fille apeurée regardait son amie.

- Souffle bien, respire doucement, conseilla Thaïs. On ne l'a plus revu depuis ce jour où il nous cherchait encore, dans la forêt. Ça fait plus de trois ans, il n'y aura plus de sang, je te le promets. Et puis, s'il savait où on est, on serait mortes depuis longtemps. Maintenant repose-toi, on doit dormir, demain on a cours.

Emilie hocha la tête, les yeux larmoyants et dit :

- Plus de sang ?

Thaïs tendit sa main vers son amie. Elles se serrèrent la main tel un pacte, se promettant que plus jamais elles ne reverraient jaillir du sang.

Avant de refermer ses yeux, Thaïs songea à ses parents, à la photo d'eux qu'elle avait en mémoire, deux personnes heureuses. Puis, elle pensa au championnat qui allait bientôt avoir lieu. Ce championnat de France, elle voulait le gagner pour ses parents, qu'ils continuent de sourire à jamais sans penser aux horreurs qui s'étaient passées. Ainsi, elle s'endormit profondément d'un sourire doux et plein de souvenirs joyeux.

Le réveil sonna de bonne heure le lendemain matin. Les deux amies ne voulaient pas sortir de leur lit si douillet. Mais, elles durent se résoudre à se lever. Elles se dépêchèrent de se préparer. Prêtes en 20 minutes, petit déjeuner oublié, elles purent prendre leur sac et rejoindre la ville. Dès la première heure de cours, aucune d'elle n'écoutait. Chacune dans leurs songes. Thaïs, le coude sur sa table, ses longs cheveux blonds passant devant ses yeux, la main droite supportant le menton. Elle rêvait au championnat de boxe qu'elle allait faire d'ici deux semaines. Elle voulait gagner, se prouver qu'à présent elle était forte, puissante et que ses parents soient fiers d'elle là-haut. Elle s'imaginait sur le ring, frappant comme une lionne enragée, rapide comme le guépard. Son adversaire ne voyait pas les coups venir. Thaïs la devançait sur tous les points. Elle se voyait ensuite triomphante, levant la coupe d'or vers le ciel.

Emilie, de son côté, regardait les nuages blancs de ses beaux yeux bleus. Ses boucles bien en arrières lui permettaient de voir aisément le ciel, les oiseaux chantaient et le soleil illuminait la terre. Cependant, en un instant, sa belle couleur devint sombre, les nuages rougissaient. Le bleu se tint en rouge sang. Telle une peinture à l'huile, le ciel dégoulinait goutte par goutte, cela ne ressemblait aucunement à de la pluie.

Voyant cela changer aussi vite, elle prit peur, paniqua, et se posa une question : et si cela en était de même de leur vie, si le bonheur n'en était que de courte durée et que le sang ne tarderait pas à rejaillir ?

- AAAHHH ! 

Emilie venait d'hurler, la main sur son cœur, elle tentait de reprendre sa respiration. Thaïs posa sa main sur l'épaule de son amie pour la réconforter. Le professeur ne comprenait pas ce qui venait de se passer, ni les autres élèves. Dans la salle, tout le monde regardait, penaud, Emilie cherchant son souffle et fixant un point devant elle. Emilie ne réussissait pas à reprendre un souffle correctement, sa respiration se bloquait, puis la jeune fille roula des yeux avant de s'évanouir et de tomber de sa chaise. Tous les camarades de classe hurlèrent.

- Calmez-vous ! hurlait le professeur.

Thaïs se pencha sur son amie. Elle l'appela, mais aucune réponse ne se fit entendre.

- Professeur ! cria Thaïs.

- Je vais l'emmener tout de suite l'infirmerie ! répondit-il. Léo, surveille la classe.

Le professeur s'empressa de prendre la jeune fille inconsciente dans ses bras et la sortie de la salle.

Alors que celui-ci partait, les élèves hurlaient toujours, ainsi les portes des salles de classes alentours s'ouvraient à la volée par les professeurs.

- Vos gueules ! hurlait Léo, le délégué de classe, pour les faire taire.

Les InséparablesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant