SWORD 12

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Est-ce que j'espérais quelque chose en acceptant l'offre de Alastor ? J'avais l'impression de signer un contrat avec le Diable et c'est sûrement ce que j'étais en train de faire. Je n'arrivais pas à clairement discerner le vrai du faux de cet homme, n'attendait-il vraiment rien en retour ? Ou cherchait-il à me donner une identité noble afin de me manipuler pour atteindre la famille impériale ?

" Vous avez tort, si vous pensez que je souhaite vous utiliser. J'ai été honnête sur mes intentions, alors certes, vous pouvez réclamer un titre de duchesse, pour fuir cet endroit ou pour vous venger du Prince, vous pouvez tout aussi bien décider de rester ici, et vivre dans la quiétude et l'insouciance. "

À chaque fois que j'émettais des doutes, il répondait par ce genre de discours. Proclamant que je n'avais aucune contrainte autour de mon choix.

J'avais décidé de partir vers la capitale, une curiosité m'animait. Je voulais savoir ce qui se passait et ce qu'était advenu le mythe que j'avais pu être. Et pour tout avouer, je ne suis pas sûre que cela soit très sain.

Je ne me sentais pas à mon aise dans les robes que les nobles dames avaient l'habitude de porter, je ne voyais pas l'intérêt de me parer de joyaux et de parure, et Alastor semblait le comprendre puisqu'il m'avait fourni des vêtements assez uniques.

Vêtue d'un pantalon blanc dont deux longs pans au niveau des hanches, faisaient croire à une jupe de l'arrière, alors que l'ouverture à l'avant laissait voir la supercherie. Concernant le haut, j'avais pu revêtir une chemise bleu marine dont le col était fermé par une broche argentée. J'avais choisi de conserver mes bottes, il était hors de question que je porte des talons.

Le manteau en fourrure, me protégeait du froid de la région de Borée. Nous ne faisions que longer les terres pour rejoindre le Sud-ouest de l'Empire, là où la capitale se trouvait, mais le climat rude et impitoyable du Nord se faisait sentir.

- N'oubliez pas, vous êtes l'unique descendante du Duc Hemera. Famille de guerrier qui ont régné sur le Nord, maintenant les frontières et combattant les bêtes imprégnées d'énergies démoniaques. Alors ne laissez personne vous regarder de haut. Comme vous vous en doutez, ma précieuse personne ne pourra pas vous accompagner au sein de la ville. A priori, je ne suis pas très apprécié malgré mon charme irrésistible.

Ne pouvait-il donc pas me laisser faire le voyage seule, cela aurait été plus agréable que l'entendre jacasser sans répit.

- Si cette famille était si puissante, que s'est-il passé ?

- Les bêtes ont attaqué de manière plus vive et répétée le domaine, de plus elles s'étaient multipliées avec la guerre, j'admets que j'ai peut-être été négligeant au moment de la rupture des contrats et j'aurais possiblement détruit un sceau qui en avait endormi une bonne partie.

Il expliquait cela comme un enfant s'étant sali les doigts juste avant le repas, je suppose que je devrais trouver cela révoltant, mais je me demande seulement s'ils ont pu trouver une mort rapide. Après tout, c'est tout ce qu'il y a espéré. Nous ne pouvons pas changer le passé ou les gens.

- La preuve de votre identité, est la chevalière que je vous ai confiée. Seul le chef de famille peut la posséder et puis croyez moi, personne ne songera qu'elle a été volée. Qui serait assez fou pour aller sur le territoire des Hemera ?

- Vous.

- Vous étiez avec moi, cela fait de vous une folle.

- Nous n'avons croisé aucun monstre lorsque nous étions sur place.

- Évidemment, il serait dommage que mon bel oiseau soit la proie de quelques bêtes affamées. Je me suis occupé des environs avant notre petite visite. Malheureusement, je n'ai pas eu le temps de nettoyer l'intérieur du manoir. C'est pour ça que nous n'avons fait que le tour extérieur.

- Le sang et la mort ne dérangent pas.

- Ce n'est pas parce que ça ne vous dérange pas, que vous appréciez pour autant ces choses.

Je me contentai de hausser les épaules face à cette réflexion inutile. Il reposait son menton contre la paume de sa main, observant par les carreaux de la calèche, le paysage duveteux et reflétant la lumière du soleil de manière brillante :

- Par exemple, la neige ne m'importune pas cependant, je ne l'apprécie guère.

Comme d'habitude, je le laisse parler, il a l'air de se contenter de ses propres tirades et ne fait que me titiller sur mes silences. D'ailleurs après une autre absence de réponse, il me relance :

- Vous ne me questionnez pas sur mes raisons ?

Je laisse passer un léger soupir devant son insistance, quel homme turbulent. Il pourrait très bien se fondre dans le paysage, il ressemble à l'un de ces renards polaires. Il est sûr qu'il a le même esprit fourbe.

- Eh bien, je vais vous le dire !

Mais je n'ai absolument rien demandé, je regrette le temps où j'étais seule dans mes quartiers, ou même le champs de bataille, au moins je n'avais pas à subir les piaillements ennuyants d'Alastor. Même lorsque j'étais avec les autres chevaliers, personne ne venait me parler, après tout, je n'étais pas des leurs. J'étais une chose étrange et menaçante, bien que nous étions dans le même camp. Enfin, c'est peut-être exagérer d'affirmer cela.

- La neige fait ressortir le sang. Oh, ne levez pas les yeux au ciel, je vous parle d'un de mes traumatismes.

- C'est cette conversation et toutes celles que vous engagez d'ailleurs, qui me provoquent un traumatisme.

- Au moins, vous ne m'oublierez pas.

- Soit, quel est votre si grand traumatisme avec le fait que la neige puisse se teinter de rouge ?

Il haussa un sourcil face au ton moqueur de ma voix, s'il voulait de la pitié, autant qu'il se jette du haut de sa Tour, peut-être que ses disciples ou congénères en éprouveront.

- Vous êtes bien plus cruelle qu'il n'y paraît Lady Hemera. Finalement, dans cette histoire, c'est peut-être vous la méchante de l'histoire.

- Dit l'homme qui a déclenché une guerre, aurait pu éviter le massacre d'une famille ainsi que ses forces armées privées. Même homme qui est prêt à ruiner un continent entier pour un obscur objectif.

- Ce n'est pas vrai, je vous ai exposé mes raisons. Je réalise le plus grand rêve d'une femme qui m'est chère. Une précieuse amie.

- Donc c'est de sa faute ?

- Absolument pas, je suis responsable de mes propres initiatives. Je suis un homme des plus égoïstes, je fais les choses parce que je le désire, parce que je vis pour les passions, et les émotions. Mais revenons en à notre sujet. Saviez-vous que je ne suis pas né avec une cuillère en or dans la bouche ? Je sais que certains le pensent.

Non, les gens ont juste une mauvaise opinion de vous, et ce, pour de bonnes raisons. Je ne sais pas s'il a conscience de ce qui lui est réellement reproché. Non, ça serait le sous-estimer, il le sait parfaitement, mais préfère s'attacher à des détails pour ridiculiser le coeur du problème.

Il continue de compter son histoire :

- Je viens d'une famille nombreuse, très pauvre. Et celui qui a dit que l'argent ne fait pas le bonheur, n'a jamais eu à voler dans les poubelles d'une taverne. Je me suis occupé de mes ingrats frangins, tous de pères différents. Vous l'ai-je dit ? Ma mère était une catin, lors d'une soirée difficile, j'ai tué tout ce petit monde. Évidemment un enfant seul dans une maison pleine de cadavres, ça pose des questions. Surtout lorsque l'utilisation de magie empeste les lieux, le mana laisse une trace, unique pour chaque mage.

- Vous avez des regrets ?

- Pourquoi en aurais-je ?

Il semble sincère, il n'en a que faire d'avoir ôté la vie de ceux qui partageaient son sang. Un léger rictus se dessine, hautain, comme toujours :

- Et vous ? Avez-vous des regrets ? Vous avez pris bien plus d'âmes que moi.

BUILD A VILLAIN - ENCOURSOù les histoires vivent. Découvrez maintenant