SWORD 27

41 7 0
                                    

Le capitaine leur donne un coup derrière la tête, les forçant à s'incliner devant moi.

Très peu intéressé par la scène devant moi, ce qui me passionnait un peu plus était l'application du bandage autour de mon bras. Nous n'avions pas de médecin à disposition et le village où nous avions trouvé refuge ne disposait pas d'un tel luxe.

- Par votre stupidité, Dame Hemera est blessée ! Elle aurait dû vous laisser avec le loup, peut-être que mort vous auriez retenu la leçon. Excusez-vous, bon sang ! Par Eole, les jeunes sont d'une telle connerie !

L'homme responsable de l'expédition était revenu après s'être assuré qu'aucun autre de ses subalternes ne déroge au repli, cherchant à ramener Bayu et le premier fugitif.

- Nous sommes profondément navrés Dame Hemera.

D'une seule voix, ils tentaient de se faire pardonner pour leur acte inconsidéré.

- J'ai pu envoyer une missive au palais, d'autres troupes viendront en renfort afin de s'assurer qu'aucune immondice ne traîne dans les environs. Je croyais qu'elles étaient contenues au Nord.

Je ne sentais aucun reproche dans le ton de sa voix, mais je ne pouvais m'empêcher de me sentir mise en cause.

- Vous pouvez le voir de vous-même, je ne suis actuellement pas à Borée pour gérer la chose, j'ai chargé quelqu'un de remettre les affaires du duché en ordre, mais vous comprendrez que cela prend du temps, car il ne reste que des cendres dans la neige. À moins que vous souhaitiez aider.

Mes derniers mots furent difficilement articulés alors que mes dents accrochaient un bout du tissu blanc pour le tirer afin de réaliser un nœud.

- Voulez-vous que je vous aide Dame Hemera ?

- Vous n'arrivez même pas à toucher un loup, alors n'approchez pas vos doigts de ma personne.

J'avais pu percer la gorge de la bête suffisamment profondément pour que la lame atteigne le cerveau, nous avions ramené la dépouille à l'entrée du village, dans l'attente des renforts et du département de recherches. Où quelques mages gras, lourdement payés par le trésor national, venaient soit disant étudier ces monstres pour en apprendre plus. Pour un, prétendu, bien commun.

- Dame Hemera ! Capitaine, excusez mon intrusion. Des personnes souhaitent vous voir.

Le chevalier s'inclina rapidement tout en prononçant ses propos.

Je soufflai, n'ai-je pas le droit à un peu de répit ? Finalement, l'idée de vivre une vie loin de tout, à l'écart du monde, sans aucun souci me paraît tentante. Mais l'oisiveté me tuerait au bout du deuxième jour.

- Bien. J'arrive.

Je me redresse et attrape ma cape verte dont des trous sont maintenant visibles, certains présentent des auréoles de sang ou de terre, je ne sais pas trop.

Quelle blague de mauvais goût de se dire que j'ai plus de points communs avec ce vêtement abîmé qu'avec les bipèdes m'entourant.

Je me couvre le corps avec et sors de la tente de fortune, suivi par les autres personnes qui étaient présentes.

- Ma Dame ! Eole soit loué !

- Vous nous avez sauvés !

- Vous devez être un ange !

Une bonne femme venait d'attraper mes mains dans les siennes, les pressant avec ferveur, ses yeux brillaient d'émotions.

- Quelle est cette effusion ? Murmurais-je vers les troupes encore en armure.

- Vous êtes arrivée en traînant le cadavre d'une bête qui allait les tuer, votre épée dans une main, vous leur avez épargné le sort du chaos et du désespoir. Vous venez d'éloigner la faucheuse de ces lieux, alors ils vous acclament.

Étrange. Est-ce ça la reconnaissance ? Je pensais que c'était un sentiment plus agréable que le vide et l'indifférence que je ressens actuellement. Peut-être parce que je n'ai aucun intérêt pour ces humains ?

Les enfants se bousculent sous les réprimandes de leurs parents, cherchant à comprendre la situation et qui je suis.

- Voici la Duchesse Hemera, elle est venue à bout du démon, seule, clama Bayu.

Ne pouvait-il pas se taire ? J'aurais dû le laisser se faire arracher la bouche, il aurait été beaucoup moins bavard.

Le bruit de leurs compliments ne rendait aucune phrase compréhensible, jusqu'à ce qu'une voix innocente se fasse distinctement entendre.

- La dame a presque les mêmes yeux que le loup. Pourquoi ?

La foule se figea, l'air sembla disparaître et les voix devinrent des fantômes, contrastant grandement avec l'ambiance présente il y a peu, changeant du tout au tout.

Mes yeux d'un bleu si pâle qu'il en était subtil avaient toujours étaient un problème quand ils étaient vus pour la première fois, interloquant les gens. Et si personne n'osait faire la remarque, je sentais leur gêne comme une odeur putride.

- Noble Dame ! Veuillez pardonner mon enfant ! Il ne sait pas ce qu'il dit ! Tais-toi.

La mère de cette progéniture s'était pratiquement jetée à genoux, suppliant à terre, attrapant le garçon pour le forcer à en faire de même, appuyant sur son crâne pour le faire ployer et l'écraser au sol.

De sauveur à tyran alors ?

Je tournai les talons :

- Vous allez lui faire mal, lâchez-le.

Je retrouvai l'abri de la demi-pénombre sous la toile de la tente, me laissant choir sur la chaise de fortune.

Les pans traînant au sol furent soulevés par le petit corps allongé d'un oiseau au plumage aussi sombre que la nuit. Le volatile s'approcha de ses petites pâtes, sautillant pour se positionner à mes pieds.

- Alastor ?

Le changement était assez fascinant, les orbes sans couleur se changeant en iris uniques.

- Avez-vous aimé combattre cette bête ?

- Les corbeaux sont vos espions maintenant ? Ah, si on me voyait parler à un corbeau, je serais traitée de folle.

BUILD A VILLAIN - ENCOURSOù les histoires vivent. Découvrez maintenant