SWORD 37

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- Je vous avais prévenu de ne pas vous jeter au milieu d'un conflit. 

- Conflit que vous avez déclenché. 

- Ce n'est pas moi qui me suis mis à agresser Erebe. Je ne suis pas responsable des actions des autres. 

- Qu'avez-vous raconté à l'Impératrice ? 

- Je n'ai fait que rappeler à cette femme les choses de sa triste vie. Un mariage politique où elle était la seule à investir amour, effort, temps et patience pour être une parfaite Impératrice, épouse et mère. Même si elle n'a jamais donné naissance. Sais-tu que l'Empereur ne l'a jamais désiré ? Tous les deux étaient piégés dans une vie conjugale qu'ils ne voulaient pas. La différence étant que l'un faisait des efforts et l'autre fuyait. Lorsque l'Empereur a ramené un nourrisson en lui demandant d'être sa mère afin de le légitimer pour le trône, l'Impératrice en a eu le coeur brisé, elle s'est laissée aller à des coups bas pour tenter de le tuer, elle en est devenue désespérée. Car s'il ramenait son bâtard, il pourrait très bien aussi faire de la mère une concubine au mieux, et dans le pire des cas la destituer pour offrir la couronne d'Impératrice à cette femme dont personne ne connaît le nom et le visage. 

- Je ne veux pas son histoire qui finalement ressemble à tant d'autres avant elles. Qu'avez vous brassé dans sa mémoire ? 

- Seulement que son heure était révolue, que d'ailleurs ça n'a jamais été la sienne. Elle était suffisamment fragile pour craquer. 

- Avant qu'elle ne soit devenue une femme que l'on méprise, comment était-elle perçue ? 

- Vous vous intéressez à elle ? Et bien, elle était plutôt appréciée. Elle a dévouée toute son existence à être parfaite pour son rôle. Mais à force de chercher la lumière, elle s'est laissée dévorer par les ténèbres car voyez-vous Ether, le pouvoir, lui, se tapis dans l'ombre. 

- Je ne jouerai aucun jeu politique. 

- Avez-vous pris votre décision ? 

- Je ... Je veux le voir regretter, cependant une part de moi veut s'éloigner de tout ça. Je veux arrêter de lutter ... 

- Bien partons alors, une calèche vous attend. 

Il s'inclina devant moi comme le ferait quelqu'un d'inférieur à mon rang sauf que je ne suis pas sûre que ce soit le cas. J'ai bien l'impression que cet homme tient l'équilibre du monde entre ses mains tel un chat ayant entre ses griffes une pelote de laine oubliée. 

Le mage ouvrit ma fenêtre et de manière désinvolte passa ses jambes par l'ouverture, basculant son corps dangereusement vers le vide. Il eut un rictus en voyant mon indifférence : 

- Oh vous ne vous inquiétez pas que je fasse une chute mortelle devant vos yeux ? 

- Vous avez une trop haute opinion de vous-même pour mourir ainsi alors sautez donc. 

Il ria et ses yeux de félin formèrent un demi-croissant de lune, il se laissa tomber et disparut de ma vue sans laisser de trace. 

Quel imbécile. 

Des pas précipitaient et le souffle court entrèrent dans ma chambre, la bonne qui m'avait servi jusque là venait d'arriver en courant, ne prenant pas la peine de reprendre contenance avant de se présenter  moi :

- Ma dame ! Vous partez ?! Déjà ! 

- Je dois rentrer. Mais ai-je besoin de vous rendre des comptes Nadia ? 

Elle eut un mouvement de recul face à mes paroles froides, je n'ai rien ici à prouver. Je n'ai aucun intérêt à être agréable avec les gens, je déteste cet endroit que j'ai parcouru comme un fantôme. Je n'oubli pas à quel point le corbeau était déjà traité comme un monstre alors que l'oiseau servait la cause de l'Empire.  Est-ce que j'ai le droit de me montrer désagréable envers des personnes qui n'ont aucune connaissance de la situation ? Aurais-je une raison, au contraire, de traiter les gens avec amabilité ? 

- Ma Dame ... Laissez moi m'occuper de vos affaires. Veuillez m'excuser pour mon impertinence. 

Elle baisse la tête et s'active autour du peu d'affaires que je possède pour les ranger dans des valises. Quelques membres du personnel passent pour venir aider et transporter les malles. 

La chambre baigne dans la lumière du jour, l'endroit semble désert maintenant vidé, je n'ai pas ma place ici et je ne l'ai jamais eu. 

- Ma Dame, oserais-je vous demander d'être engagée par votre maison. 

Alors que j'allais monter dans la voiture, que le cochet se tenait au pied de la marche, prêt à refermer la porte après que je sois installée, que le personnel attendait patiemment mon départ pour me saluer et annoncer que je quittais les lieux, la femme de chambre qui m'ait si assidument servie avait pris la parole. 

Mes yeux rencontrèrent les siens, et derrière ses mains jointes et ses orbes faussement sincère se cachaient d'autres motivations. 

Je balaya l'assistance, aucun ici ne sera jamais de mon côté.  

J'allais ouvrir la bouche pour signaler quand des gardes arrivèrent, leur supérieur s'avançant et déclara fortement : 

- Sur ordre de l'Empereur, la Duchesse Hemera est assignée au palais. Vous n'avez pas le droit de quitter l'enceinte du château. 

Qu'Eole soit maudit s'il existe. 

Je ne reconnaissais aucun visage présent, ce n'était aucun des soldats avec lesquels je m'étais entraînée. Un cavalier arriva à ma hauteur et descendit de sa monture, s'interposant entre moi et les troupes venant m'arrêter. 

- Qu'est ce qu'il se passe ici ? 

- Général Anemoi, cela ne vous concerne en rien. Nous suivons les ordres de l'Empereur. 

- Je vous prie de me donner les motifs. 

Le silence envahit la cour et j'ai la désagréable sensation que je vais encore être traitée comme une moins que rien, humiliée et rétrogradée. 

- Général, ce n'est pas votre domaine de compétence. 

- Bien, j'en ai assez. 

Je m'approche de Evan et saisi l'arme à sa ceinture. 

- Que faîtes-vous ?!

Les capes bleus sortent eux aussi leur lame, la dirigeant vers moi alors que je pointe le tranchant contre ma propre gorge :

- Je préfère largement me tuer que d'être enfermée. 

- Dame Hemera ! 

- Duchesse ! 

- Posez votre lame ! 

- Duchesse Hemera !

Erebe se tenait en haut du perron, observant la scène avec incrédulité, il secoua la tête et ordonna : 

- Posez vos armes. 

- Votre Altesse ? 

Il fallu de longues secondes avant qu'ils obéissent, alors ils n'étaient pas aveugles de toute demande de leur régent. Quoi que l'empereur avait autorité sur le prince. 

Je rendis l'arme à son propriétaire, derrière son air sûr se cachait de l'inquiétude quand il passa son regard entre l'objet et ma personne. 

- Laissez la partir, j'en prendrais la responsabilité auprès de l'Empereur, déclara le Prince. 

Derrière les choses non dîtes, je pouvais clairement distinguer une dernière faveur qu'il m'accordait, bien sûr sous couvert d'une menace. Je ne devais plus faire entendre parler de moi. Il croit me sauver. Après m'avoir condamné. 

- J'escorterai la Duchesse jusqu'à la frontière de ses terres. 

- Général ... 

- La guerre est finie, je n'ai aucune obligation immédiate. 

Il remonta en scelle et n'accorda pas de formalités à son supérieur, il se tourna vers moi : 

- Allons-y maître. 

BUILD A VILLAIN - ENCOURSOù les histoires vivent. Découvrez maintenant