Vingt-cinq - "Tu peux pas"

791 36 3
                                    

J'étais restée au moins une heure devant son immeuble à me demander si je montais jusqu'à ce foutu troisième étage où on s'était parlé pour la première fois et où je n'avais plus remis les pieds une seule fois depuis.

Je savais qu'il était là, sa BM était tout simplement garée devant l'entrée.

C'est après avoir prétexté à une nana qui entrait dans l'immeuble que j'avais perdu mes clefs que j'entrais à l'intérieur de ce vieux bâtiment.

Le temps me parut une éternité en montant les marches jusqu'au troisième pallier. Du bruit sortait de l'appartement où il ne faisait noter plus que "H.Akrour", déjà gros changement depuis la première fois.

Sans plus attendre mon point s'abattait trois fois sur le bois de la porte, attendant quelques secondes pour voir le visage d'Hakim apparaître.

- Qu'est ce...

- Ferme la. Le problème c'est que j'ai un problème avec les relations qui dépasse le stade d'une nuit ou d'un plan régulier sans plus, j'ai pas eu l'exemple de mes parents et je te le raconterai peut être un jour mais j'ai jamais appris tout ça, j'ai peur de mal faire les choses, et dans tous les cas je les ferais mal parce que j'y connais rien et, t'as peut être raison je suis la plus grosse flipette que tu puisses connaître mais...

- Khlass, dit il plus sévèrement mais sur un ton plus bas, y a ma grand-mère dans le salon si elle entend ça elle me hagar

Et là, la gêne et la honte prenaient le dessus. Et si elle m'avait entendu ? Si elle allait dire à Hakim qu'il arrête de me fréquenter ? Je sais qu'il en serait capable si sa famille ou si ses amis du crew lui demandaient.

- Bon, je me taille, dis je en dévalant les escaliers pour sortir de cet immeuble étouffant à souhait

Il ne m'avait rien dit par rapport à ce que je venais de lui avouer, pourtant c'était bien le seul à qui j'avais dis quelque chose comme ça dans ma vie. Je regrettais déjà.

N'ayant pas l'envie de rentrer chez moi, voulant m'occuper l'esprit pour ne plus penser qu'une étiquette marquée "ridicule" se promenait avec moi sur mon front, je partais au bâtiment qui allait être ma future boutique. Les travaux avançaient très bien, tous les grands meubles étaient déjà installés, les murs étaient repeints et les grands miroirs étaient mit là où les cabines d'essayages allaient se trouver.

Tout était déjà presque prêt mais je ne m'en rendais même pas compte.

Dans mon appartement, des piles de vêtements s'entassaient, d'autres étaient déjà parti chez les couturiers, et si tous nos calculs étaient bons, d'ici trois semaines tout serait au point avec les vêtements.

C'est à peine en m'affalant sur le petit canapé blanc au fond de la boutique que mon portable sonnait.

- Oui ? Répondais je en ayant bien vu le nom de la personne avant de décrocher

- Ta race il pleut des cordes t'es où, grognait la voix du Kabyle derrière le cellulaire

- Je t'envoie l'adresse

Je riais légèrement avant de raccrocher pour lui envoyer l'adresse de la boutique par sms. Il allait être le premier après Camille et Riyad à connaître cet endroit et ce que ça allait devenir.

Après une vingtaine de minutes la porte s'ouvrait sur un Hakim trempé de la tête aux pieds ce qui me faisait inévitablement rire et lui grogner.

- File moi un truc pour me sécher au lieu de rire comme une baleine, grognait il

Ne voulant pas qu'il s'avance plus loin que l'entrée vu comment il était trempé, je courais presque pour lui donner un draps propre qui était dans la réserve pour qu'il se sèche un minimum.

- Pourquoi t'es pas venu en voiture ?

- Il pleuvait pas quand j'suis parti

Quand sa casquette se soulevait de sa tête pour se poser sur ce qui allait être le comptoir, en même temps que le drap, je voulais me moquer de lui mais c'était sans compter sur lui qui se jetait sur mes lèvres, me laissant à peine passer mes mains dans sa nuque que j'étais déjà le dos collé contre le mur.

Notre échange n'avait rien de comparable avec celui de la première fois, nos gestes étaient moins sauvage, plus fluide et surtout plus passionné.

- Attend, dit il une seconde avant le sérieux commencement de l'acte, Belek j'te kiffe vraiment

- Je m'en fou de ça à cet instant précis putain Hakim, grognais je

Et c'est devant son sourire amusé que nos corps ne formèrent plus qu'un pour la énième fois depuis notre première rencontre dans ce foutu appartement en pleine fête.

Heureusement j'avais pensé à mettre des grands rideaux devant les grandes vitre de la boutique, à croire que j'avais prévu qu'un Hakim sauvage allait débarquer un soir de décembre.

- Pourquoi tu m'as fais venir ici ? Demandait il trente minutes plus tard en remettant son jogging

- Parce que j'étais ici, répondais je en me rhabillant à mon tour

- Ouais mais on est où ?

- C'est ma future boutique, souriais je en me remettant sur le petit divan blanc

Il me regardait d'un air étonné, scrutant la pièce sous toutes ses coutures.

- Pourquoi tu me l'as pas dis avant ? Demandait il

- Personne le sait sauf Camille et Riyad, j'étais censée vous inviter à l'inauguration et vous auriez vu par vous même en même temps que tous les autres

Il hochait la tête tout en continuant à scruter la pièce de long en large, il avait l'air de toute l'aménager dans sa tête et c'était marrant à voir.

- Ken il va kiffer

- Ken ?

- Il kiffe la sappe, expliquait il

- Il va être indirectement dedans, Rose va travailler avec moi en tant que vendeuse

Parce que oui c'était officielle, elle avait accepté, nous avions fait toutes les démarches qu'il fallait faire, à la seconde ou la boutique ouvrira elle sera officiellement ma vendeuse.

- Ah ouais, vous avez fait vos coups en traître. Et ça ouvre quand ?

- L'idéal c'est d'ouvrir pour le mois de janvier quand je serai revenue sur Paris, dis je en remettant ma veste et en prenant mon sac, viens on part

- Attend, dit il en fronçant les sourcils, tu pars où jusqu'en janvier ?

- Dans le sud, je pars jeudi soir jusqu'au vingt huit décembre

- Demain ? Zehma jeudi premier décembre ?

Mes sourcils se froncèrent devant son air ahuri, qu'est ce qu'il lui arrivait à lui.

- Oui Hakim, jeudi premier décembre, dis je en commençant à être agacée

- Tu peux pas

- Quoi ? Pourquoi ? Demandais je en fronçant les sourcils à mon tour

Il avait l'air excédé par ma question mais ça c'était la première fois qu'on me le faisait.

- Y à le Bercy de Nek, tout le monde vient t'es obligée de venir

Disjoncté - Mekra Où les histoires vivent. Découvrez maintenant