REVERSAL

2 / Nya

4 septembre

Hope me lance un regard interrogateur alors que nous nous dirigeons vers l'amphithéâtre.

-    Tu veux vraiment manger là, dans cette salle vide ? demande-t-elle.

-    Oui, j'aime bien être là... Je marque une pause avant de continuer. Si tu veux aller manger avec les autres. Je ne veux pas que tu te sentes forcée à être ici avec moi, je lui assure.

-    Tu es sûre que ça ne te dérange pas ? elle demande, cherchant à confirmer ma décision.

Si.

-    Non, sinon je ne t'aurais pas proposé.

-    D'accord. Mon amie m'embrasse la joue et se dirige vers le réfectoire, me laissant seule avec mes pensées.

Je me retrouve seule à table pour le déjeuner, et étrangement, je ne suis pas dérangée par cela. J'apprécie ces moments de solitude, même si je préférerais que mon esprit se déconnecte de moi-même pendant ces instants. J'enfile mes écouteurs et me plonge dans ma bulle de musique, la voix envoûtante de KALEO résonnant dans mes oreilles. Je chante doucement, parcourant mon téléphone tout en grignotant ma simple salade, même si je n'ai pas vraiment faim. Mais je sais que si je veux éviter les remarques ce soir de la part de mon père, je dois au moins faire semblant de manger.

C'est comme si je n'étais même plus maîtresse de mon propre corps, comme s'il m'avait dépouillé de tout ce qui m'appartenait...

Je refais mon chignon et retire mon sweat, profitant de ma solitude pour me débarrasser de cette couche de protection. Je déteste que les autres voient mon corps, car je me sens constamment jugée, que ce soit pour ma maigreur ou pour mes courbes jugées excessives. Je préfère me cacher, même sous une chaleur accablante, si cela signifie préserver mon intimité.

Je saisis l'opportunité pour terminer la rédaction sur le livre que nous étudions en littérature, sachant que j'ai déjà trois jours de retard pour la rendre. Je la termine rapidement, consciente que le cours commencera dans une vingtaine de minutes.

La porte s'ouvre et monsieur Conrad entre, m'adressant un sourire poli avant de s'installer à son bureau. Je relis rapidement ma rédaction avant de la placer un peu plus loin de moi.

-    Mademoiselle Saint-Clair ? Son appel me sort de mes pensées.

-    Oui ?

-    Avez-vous votre rédaction ? Je voudrais la corriger, je l'ai déjà rendue à vos camarades, vous êtes la dernière.

J'acquiesce et me lève pour rejoindre son bureau. Après lui avoir remis ma copie, je retourne à ma place et commence à faire mes devoirs pour le lendemain. Il reste dix minutes avant le début du cours, je remets mon pull et mes écouteurs pour profiter d'un dernier moment de répit.

Le professeur se lève avec grâce de son bureau et s'approche de moi d'un pas assuré. D'un geste calme, il dépose la copie sur la table, comme s'il posait un trésor précieux entre nous. Son regard bienveillant semble me défier doucement à découvrir ma note, comme s'il savait déjà ce qui m'attendait mais voulait me laisser le plaisir de la découverte.

-    Quand l'avez-vous commencé ? demande-t-il, son regard scrutant le mien avec une intensité inébranlable.

-    Hier soir... ma voix trahit un soupçon de regret.

-    Ça se voit malheureusement, réplique-t-il d'un ton désapprobateur. Vous devez vous organiser autrement, vous prenez trop de retard à chaque fois.

Ses paroles, chargées de reproches, résonnent dans la pièce.

-    C'est déjà le deuxième devoir à rendre et le deuxième que vous rendez en retard. Je suis obligé de vous enlever déjà deux points par rapport à ça. Son jugement est sans appel.