Frères Ennemis

30.

— Tulan ! On a vu les loups ! s'enthousiasme Lya.

— Ah bon ? Vous avez enfin réussi à vous faire discrets, c'est bien ! Que faisaient-ils ?

— Ils chassaient ! C'était très excitant.

Soon et moi, les yeux brillants d'avoir assisté des instants aussi intenses, rejoignons Tulan près des enclos. En presque deux ans avec lui, la vie a un autre visage, elle est toujours enrichissante même si elle est difficile.

— Que chassaient-ils ?

— Un énorme cerf avec des bois extraordinaires ! continue de narrer Lya. Il a envoyé valdinguer un des loups contre un arbre, mais les loups se sont pas dégonflés !

— Oui ! Tu aurais vu ça, surenchérit Soon. Ils étaient à droite, à gauche ! Partout !

— En meute, donc, répond Tulan pragmatique.

— C'était plus que ça, râle Lya.

— On lui montre, nous encourage Soon.

Il nous prend à part pour nous distribuer les positions, puis explique à Tulan qu'il est le cerf. Notre père adoptif, dubitatif, s'est assis sous l'abri de notre cabane et aiguise un couteau. Nous nous éloignons pour nous approcher comme le faisaient les bêtes, mais je ne suis pas enchanté par le rôle qui m'a été attribué.

— Je n'ai pas envie d'être celui qui se sacrifie, râlé-je.

— C'est pour la meute, répond Soon avec un sourire moqueur.

— Moi je sers que de diversion, c'est pas mieux, surenchérit Lya.

— On s'entraînera en échangeant nos places, déclare Soon pour couper court à nos remontrances.

Prenant ma mission très à cœur, j'approche, méfiant, en faisant semblant de grogner, ce qui arrache un petit ricanement à Tulan. J'entends Soon qui reste quelques pas en arrière, mais, alors que Lya m'a imité en grondant et en se déportant sur le côté tout en continuant d'avancer. Notre père a arrêté de s'occuper de sa lame et ses yeux se baladent de Lya à moi. Quand je suis assez près, je bondis, en faisant en sorte de m'accroupir avant de parvenir à Tulan. Soon arrive à son tour, prend appui sur mon dos et s'élance pour lui arriver à toute vitesse sur notre proie improvisée.

Heureusement que Tulan avait lâché son arme, car par réflexe quand Soon s'est projeté sur mon échine, la douleur m'a fait bouger, ses mauvais appuis ont modifié sa trajectoire et il est tombé en biais contre Tulan.

L'homme éclate de rire et nous félicite pour la démonstration. Comme nous sommes boudeurs face à sa réaction, il nous rassure et nous explique que les loups aussi ont besoin de pratique.

Je me réveille le sourire aux lèvres, le jeu du loup était un de nos rituels, surtout quand Tulan nous entraînait à main nue et que nous étions encore trop jeunes et malhabiles, nous essayions de prendre l'avantage à trois contre un.

L'amertume m'attaque après quelques instants à me perdre dans tous ces souvenirs, car je me rappelle de mon échange de la veille avec Soon. Quoi qu'il dise, il est mon frère. J'espère que toute cette histoire va bientôt être derrière nous pour le retrouver. Pour ça, qu'une chose à faire, il me faut en savoir plus ! Remotivé, je me mets en branle.

***

Pour commencer, avec le peu d'informations en ma possession, j'ai tout de même tenté de retrouver la date de naissance de Vyn. Après trois nuits à éplucher tous les cahiers de naissance, je ne suis pas plus avancé. Il y avait quelques Vyn, mais les renseignements qui allaient avec ne collaient pas. Dommage. Il n'est pas né ici, ou il avait plusieurs identités. J'abandonne l'idée de trouver la date qui me permettrait peut-être d'ouvrir le coffre de Soon. J'ai déjà gaspillé assez de temps avec cette histoire. Surtout que j'ai peut-être tort et le code est différent.