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La douleur de mes membres m'extirpe de ce souvenir amer. Lya est là, elle me surplombe, ses yeux marrons embués de larmes comme dans ce rêve.

— Je vais bien, coassé-je.

— Je n'aurais jamais cru que je te veillerai à nouveau dans notre maison.

Elle m'aide à me redresser et m'offre de l'eau.

— Où en est l'avancée de la nuit ? demandé-je pris de panique avant même de saisir l'outre.

— Le jour se lève.

— Vous auriez dû profiter du couvert de la nuit pour partir, les gardes se voyaient de loin !

— Mes soldats étaient épuisés, me répond la voix autoritaire du prince Yun.

Tout à mon plaisir de voir Lya, je ne l'avais pas quitté des yeux et je prends conscience du capitaine, sa femme, ses enfants, du prince et des siens dans le coin opposé de la pièce.

Par automatisme, je tente de me relever pour saluer correctement.

— Reste tranquille, s'énerve Lya.

— Elle a raison, reprend le prince.

— Où est Soon ? demandé-je.

— Sûrement à fureter pas loin, je ne pouvais pas envoyer de soldats pour le débusquer.

Mon regard se pose sur les deux petits êtres que mon frère est capable de tuer.

— Comment Soon savait-il que vous viendriez ici ? Je... Il me manque un élément, je n'ai pas dû m'en souvenir, parce qu'il m'a pris de vitesse.

— Parce que mon père vous a élevé, réplique le capitaine Tan sobrement. Je n'avais pas compris, c'est Soon qui m'a rendu l'arc de mon père, mais il m'avait dit qu'il l'avait subtilisé après son exécution.

J'étais persuadé que Soon avait vendu l'arc de Tulan, comme moi je ne m'en sentais pas digne et que nos rapports étaient tendus, je n'avais pas osé aborder le sujet. Résultat ; Soon avait de l'avance sur moi, même quand ma mémoire ne défaillait pas. Un rire de dépit m'échappe.

— Je vais aller lui parler, dis-je en me levant.

— Commandant ! m'interrompt le prince Yun. Je vous ordonne de rester ici.

— Pardon ?

— Vous discutez mes ordres ?

— Non, dis-je en ravalant ma fierté, mais en restant debout. Quand partons-nous ?

— Quand certains de mes hommes reviendront de leur mission d'éclaireur.

— Nous n'avons pas de vivre, dis-je. En plus, ce lieu est facilement trouvable.

— La plupart des soldats ont suivi les traces des déserteurs, m'informe le prince.

L'inquiétude pour mes camarades me force à regarder le capitaine pour tenter de déchiffrer ce qu'il pense.

— Il va y avoir d'autres soldats, votre frère a sûrement pris entièrement ses aises sur le palais, insisté-je.

Le visage du prince est très sombre, il semble sur la brèche, une information doit m'échapper, car même si la situation est précaire, il n'est pas comme d'habitude.

— Y a-t-il un problème, votre majesté ?

— Ma femme refuse que Soon soit tué.

— Nous pouvons seulement l'immobiliser, il reste notre frère, tenté-je. Il n'a plus d'hommes.

Frères EnnemisOù les histoires vivent. Découvrez maintenant