16 - Virgile - Submergé

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Elle portait du bleu. Elle portait ma veste.

Cela fait trois jours que la soirée est passée et pourtant, je ne peux me retirer de la tête l'image de Véga avec ma veste sur le dos. Ni la vue de son décolleté si classe et si désirable.

Elle lui allait bien, ma veste.

Elle me l'a confirmé, elle préfère porter du rose – cela met en valeur ses joues et ses cheveux – mais le bleu soutenait son teint d'une autre manière.

Je ne suis pas expert en vêtements, mais toujours est-il qu'elle portait ma veste, et que cela m'a plu. Fierté masculine mal placée, bonsoir.

Bonsoir aussi, jalousie malvenue.

Je crois l'avoir vue toucher le bras du dénommé Quentin, quand je suis arrivé. J'ai l'impression de me planter une pointe dans l'estomac dès que je visualise à nouveau cette scène, mais je ne peux rien dire. Ce que je ressens n'est pas légitime.

Et puis, c'est avec moi qu'elle est, ce soir.

Cela fait presque une heure que nous nageons sans relâche, et même le bonnet de bain ne parvient à retirer le charme de son visage.

La voir sans ses lunettes me donne d'ailleurs l'impression d'interagir avec une toute autre personne – ce qui est ridicule, j'en suis conscient.

Nous passons désormais quatre soirées par semaine ensemble, et j'en suis ravi, il faut le dire. Après nos séances de natation, nous rentrons chacun chez nous, mais ces instants partagés me réchauffent quand même chaud le cœur. Elle aime passer du temps avec moi, et moi avec elle : que demander de plus ?

Le sifflet retentit, les quelques nageurs sortent de l'eau ; comme à mon habitude, je n'utilise pas l'échelle, et me hisse sur la margelle à la force de mes bras engourdis par le papillon intensif que j'ai pratiqué.

Je distingue Véga dans son maillot magenta qui me rejoint, et je lutte contre cet instinct qui me prie de descendre les yeux sur elle, l'entièreté de son corps si gracile et féminin.

— Pas trop crevé ? me charrie-t-elle, constatant bien mon air abattu.

— Je suis à peine fatigué.

— On va dire que je te crois, ironise-t-elle, me tirant une moue.

Je porte mon courage à deux mains et lui demande ensuite :

— Des plans, pour ce soir ?

Nous sommes le quatorze février. Autrement dit, le jour des amoureux, dont les entreprises se sont emparées pour faire encore plus de chiffre chaque année autour des petits chocolats, des petits cœurs, et de toutes cet petites choses qui me donnent envie de vomir autant qu'ils me font rêver.

J'ose lui poser la question : ce n'est pas comme si j'étais vraiment indiscret. C'est une interrogation normale ce jour venu, non ?

— Aucun. Et toi ?

Simple, clair, concis. Sa réponse me soulage – encore une fois, c'est mal placé, mais je m'en fiche.

— Non plus. Oscar va sûrement vouloir aller draguer au bar ou en boîte, mais je pense le laisser y aller seul.

— Où est passé le Virgile qui n'était pas fatigué ? me charrie-t-elle.

Nous restons plantés debout devant le pédiluve, mais aucun de nous n'y prête vraiment attention.

— Moque-toi de moi, vas-y, je l'encourage de mon ton sarcastique.

En réalité, je pourrais accompagner mon ami, mais je rêve plus d'un bon plat chaud, tranquille, que d'aller chercher l'attention d'une fille quelconque – surtout quand la seule qui m'intéresse vraiment se situe à côté de moi.

À la lettre prèsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant