#9. En voiture

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Assise devant cette vaste demeure, je me sens de plus en plus étrange.

Pourquoi ne suis-je pas à l'intérieur, en train de m'amuser comme tout le monde ? Pourquoi ai-je demandé à rentrer ? Qu'est-ce qui cloche chez moi ?

L'air devient de plus en plus frais et je serre mon sweat contre mon corps, tentant d'éviter de geler. J'aurais dû opter pour un vêtement plus confortable, l'hiver commence à s'installer.

Mais encore une fois, il semble que je sois la seule à le remarquer, vu le peu de vêtements que portent les invités ici.

Je cache mon visage entre mes genoux pour essayer de me réchauffer. Au bout d'un moment, je sens une main se poser doucement sur mon dos. Je me redresse et découvre Félix, accroupi devant moi, le regard inquiet.

— Tu vas bien ? me demande-t-il.

— Oui, répondis-je d'une petite voix.

Félix me regarde un long moment, semblant chercher à percer la vérité dans mes yeux. Je l'évite délibérément, fuyant son regard.

— Ce gamin va m'entendre, s'écrie-t-il en se relevant.

Je saisis son bras pour l'empêcher d'agir. Il se tourne légèrement vers moi et nos regards se croisent.

— Non, s'il te plaît ! C'est moi qui ai insisté pour venir. Il a l'air de s'amuser avec ses amis, ne lui fais pas honte, Félix, le suppliai-je.

Il me fixe un instant, soupire, puis accepte. Je relâche son poignet.

Il retire son manteau et le dépose sur mes épaules, avant de me relever doucement en me soutenant par les épaules. Il me conduit jusqu'à sa voiture et m'ouvre la portière. Je monte, puis il fait le tour du véhicule et s'installe côté conducteur avant de démarrer.

Il s'apprêtait à prendre la route quand je lui demande de s'arrêter avant de regarder par la fenêtre.

Je vois Tiffany sortir d'un taxi et se diriger vers la maison où se déroule la fête.

Elle porte une mini-robe noire et une paire d'escarpins assortis.

Elle est tellement féminine comparée à moi. C'est sûr, personne ne la confondrait avec le frère de Milo.

— Nico ? Tu m'entends ?

La voix de Félix me sort de mes pensées. Je tourne le regard vers lui et rencontre une nouvelle fois son regard inquiet.

— Oui ?

— Ça va ?

— Oui, ne t'en fais pas. On peut y aller maintenant, le rassurai-je en forçant un sourire.

Il me dévisage un moment, peu convaincu, mais démarre tout de même.

Le trajet se fait en silence. Je suis plongée dans mes pensées, trop gênée pour engager la conversation.

Je n'arrive pas à croire que je l'ai appelé. C'est le premier nom qui m'est venu à l'esprit, probablement parce que c'est la seule personne, à part Sophie et Franck, que je connais et qui possède une voiture.

— Tu as mangé ? me demande-t-il, brisant ainsi le silence.

Je relève les yeux de la vitre pour croiser son regard.

— Euh, oui, je n'ai pas faim, merci, répondis-je, mais mon ventre gronde immédiatement après avoir dit cela.

Je baisse la tête, honteuse. J'ai envie de devenir une petite souris et de m'enfuir.

Il doit me prendre pour une menteuse.

Je m'attends à ce qu'il me fasse la morale, comme à son habitude, mais il éclate de rire.

Je le regarde, surprise. C'est la première fois que je l'entends rire, il est toujours si sérieux.

Son rire me détend instantanément, et je me mets moi aussi à rire.

— C'est ce qu'on appelle se faire prendre la main dans le sac, dit-il entre deux éclats de rire.

— Arrête de te moquer ! Je n'ai mangé que des chips depuis cet après-midi et il est plus de 22 heures, me justifiai-je.

— Tu aurais dû me dire que tu avais faim alors. Je ne mords pas, tu sais ?

Son rire se calme, mais un petit sourire persiste sur ses lèvres.

— Je sais, répondis-je en souriant aussi.

Il se gare finalement devant un restaurant chinois et me demande si je veux manger sur place ou chez moi.

Je lui dis de prendre à emporter, car je suis trop gênée pour manger en sa présence. Même si je me sens plus détendue, il n'en reste pas moins intimidant.

Il descend et entre dans le restaurant.

Mon téléphone sonne, je le sors de ma poche et vois que c'est Milo.

— T'es où ? Tu t'es faite kidnappée ? Tu es en danger ? Dis Barbe à papa si tu ne peux pas parler, commence-t-il dès que je décroche.

J'éclate de rire. Il est complètement fou !

— Eh, je suis sérieux ! T'es où, Mavis ?

Je ne peux pas lui dire que je ne me sentais pas à l'aise à la fête, sinon il va rentrer immédiatement et je refuse de jouer le rôle de l'amie gênante.

— Je ne me sentais pas très bien, alors j'ai préféré rentrer, mentis-je.

— Quoi ? Toute seule ? Mais tu aurais dû me le dire !

— Tu t'amusais tellement que je ne voulais pas te déranger. Et je ne suis pas seule, Félix est venu me chercher, lui expliquai-je.

— Félix ? Mon grand frère Félix ? Impossible, refuse-t-il catégoriquement.

— Euh, si, si, lui assurai-je.

— Attends, t'es sérieuse ? Félix ne conduit pas après que le soleil se soit couché. C'est une sorte de règle qu'il s'est fixée depuis longtemps ! me confie-t-il. Mais bref, je suis rassuré de savoir que tu es entre de bonnes mains. Je t'appelle demain, Nico. Bisous !

Il raccroche.

Je suis choquée par ce qu'il vient de dire. Mais en voyant Félix revenir, je chasse ces pensées. Il monte en voiture, me tend les sacs de nourriture et redémarre.

Le reste du trajet se fait dans le silence, seule la musique brise le calme.

Je détache ma ceinture une fois devant chez moi. Nous échangeons un dernier regard avant que je ne prenne la parole.

— Merci d'être venue me chercher, Félix, le remerciai-je.

— Ce n'est rien, j'étais dans les parages et c'était sur ma route.

Milo m'a pourtant dit que Félix ne conduisait pas la nuit.
Il a donc dû changer d'avis. Cela me rassure.

Je lui souris et m'apprête à sortir du véhicule, mais il m'arrête.

— Nico, tu es amoureuse de mon frère, pas vrai ? me demande-t-il sans détour.

Le rouge me monte immédiatement aux joues et je baisse les yeux, gênée.

Il éclate de rire.

— C'est donc vrai, remarque-t-il. Si tu as besoin d'aide ou de conseils, n'hésite pas à me demander, je le connais mieux que quiconque ! Je pourrais même refaire le coup du cinéma.

Je le regarde, surprise, et il me fait un clin d'œil. Je n'avais donc pas rêvé : il faisait tout cela pour que je passe du temps avec Milo.

Je lui souris, pleine de reconnaissance.

— Merci, Félix !

— Je t'en prie.

Je prends mon plat, descends de la voiture, et dépose son manteau sur le siège avant de rentrer chez moi, un sourire radieux sur le visage.

En fin de compte, j'ai passé une merveilleuse fin de soirée, grâce à ce trajet en voiture.

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