Chapitre 3 | Et puis merde

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S'il y a bien une chose dont je n'ai pas besoin actuellement, c'est de parler avec lui de sujets que j'aimerais éviter.

Je fais volte-face mais c'est déjà trop tard. Il m'a reconnue.

— Steacy ?

Je lève les yeux au ciel et me tourne face à lui.

— Quoi ?

— Qu'est ce que tu fais là ?

— Je me baladais.

— On peut parler ?

— Je n'ai pas trop le temps.

— Steacy, s'il te plaît.

— Tu veux parler de quoi ? je demande en soupirant.

— De nous. De moi. De ce qu'il se passe. Je voudrais m'expliquer et m'excuser.

Sa sincérité me déstabilise.

— Fais vite, dis-je en m'asseyant sur le bout opposé du banc.

Il se rassoit à son tour.

— Je suis désolé, commence-t-il.

— Pour ?

— Pour tout, en fait.

— Je regrette vraiment, continue-t-il. Je regrette tout sauf ce qu'il s'est passé au cinéma.

Je me tourne vers lui et le regarde dans les yeux. Je regrette aussitôt. Son regard est bien trop déstabilisant.

— Je n'ai fait que de merder avec toi. Je le sais. Et ça... depuis la primaire. À cette époque, je n'avais qu'une seule envie : te plaire. Mais tu étais toujours avec Cali ou Danaé, moi je voulais que tu me remarques. Alors j'essayais tout le possible et l'inimaginable. Jusqu'à devenir très maladroit.

Sa confession me prend de court. Il m'avait déjà plus ou moins fait comprendre que mon attention l'importait, mais de là à vouloir me plaire...

— Quand j'ai appris que nous allions déménager ici pour le travail de ma mère, je me suis tout de suite rappelé que c'était là que tu vivais, maintenant. J'ai ensuite appris que nous allions être dans le même lycée. Je pensais que, depuis la primaire, mon attirance envers toi était passée. Mais quand je t'ai vue, ce Lundi matin j'ai compris que rien n'avait changé.

À cet instant précis, tous les mots de Telma me sont revenus en tête. Peut-être ne devrais-je pas autant me méfier de tout et de tout le monde ? Peut-être devrais-je le croire et lui faire confiance ? Le MDV me donne tout un tas de restrictions, de comportements à adopter, de discours à tenir... Dans le monde extérieur, je n'ai aucun comptes à rendre. Et si Telma avait raison ? Et si je n'avais rien à perdre ? J'ai toujours pensé qu'une relation représenterait une charge en plus. Mais ne serait-ce pas plutôt une manière de me changer les idées quelque temps. Je ne peux plus prétendre que Lucas ne me fasse aucun effet...

— Je veux juste savoir si ce que je ressens envers toi est partagé. Après je te laisserai tranquille. J'ai réfléchi, et j'ai compris qu'être tant maladroit marche pour avoir ton attention. Mais pas pour te plaire.

— Tu ne m'es pas indifférent Lucas. Bien que parfois tu m'exaspères plus que n'importe qui, il y a ce quelque chose qui me fait oublier toutes ces maladresses... Je ne peux le nier.

Je vois dans son regard comme une illumination, un soulagement. Je lui souris. Au fond, qu'est ce que j'ai à perdre ? Un certain "et puis merde" résonne dans ma tête.

Il se penche vers moi, pose sa main gauche sur ma joue et me tire vers lui.

— Je te veux pour moi, Steacy Rochelle. Pour toute la vie.

JuniaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant