HARRY (😨💔)

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Et voilà un autre chapitre, retour au théâtre avec Harry 🫶
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***

Trente-six.

C'est le nombre de petites fleurs roses qui ornent l'assiette en porcelaine sur le bureau de sa patronne. Harry a eu le temps de les compter deux fois.

Il s'est invité dans le bureau de Margaret pour lui parler de cette idée de musique en live, et maintenant, il fait face à un silence assourdissant. Il veut croire qu'elle met un moment à réfléchir, et pas qu'elle s'est endormie les yeux grands ouverts, même s'il commence à trouver le temps long.

Finalement, elle sort de sa léthargie pour poser ses deux mains sur ses accoudoirs et fixer son employé.

— C'est bien intéressant mon joli, mais combien est-ce qu'il voudrait, ton copain ?

— Oh, on n'en a pas encore parlé. Il recherche surtout de la reconnaissance, vous savez.

Harry fronce les sourcils, avec l'irrépressible envie de répliquer que ce n'est pas son copain, et qu'ils ne sont pas amis. Tout juste des connaissances. Une petite voix lui souffle que cela pourrait lui éviter bien des situations inconfortables à l'avenir, mais ses pensées sont interrompues par le petit ricanement de Margaret.

— Tu me flattes, mais on n'est pas le théâtre le plus connu de Londres.

— Non, mais il fait partie des plus anciens, et il y a des chances que des critiques fassent quand même le déplacement, non ?

— Si on s'en donne les moyens, j'imagine que oui.

Elle marque une nouvelle pause, puis elle semble considérer un long moment le visage d'Harry avant de reprendre :

— J'accepte si tu te démènes pour nous faire de la publicité, du coup.

— C'est-à-dire ?

— Flyers, réseaux sociaux... Vous connaissez tous ces trucs beaucoup mieux que moi.

— D'accord, mais... Tu ne veux pas l'entendre jouer, d'abord ?

— Oh, je te fais confiance. Et si ça me déplaît, j'imagine que je pourrai trouver un autre costumier pour la prochaine saison.

Harry cache sa surprise derrière un éclat de rire, mais il déchante quand il réalise que Margaret ne le suit pas. Pas même un sourire de sa part. Oh d'accord, donc elle est sérieuse. Bon. Harry décide que c'est à ce moment précis qu'il ferait mieux de retourner à ses occupations, alors il la remercie, et il quitte les lieux sans demander son reste. Décidément, il n'arrivera jamais vraiment à cerner Margaret.

Quand il retourne à sa place, il se remet rapidement au travail. Certains costumes de la pièce sont déjà prêts, mais il lui reste encore de quoi faire pour sublimer les étoffes et surtout, essayer de ne pas créer des pièces trop cheap. Concentré sur sa tâche, il ne réalise pas tout de suite que sa collègue Laura essaie de lui parler. C'est seulement au bout du troisième "pssst" qu'il comprend qu'il lui est adressé, alors il l'interroge du regard alors qu'elle secoue la tête.

— Il y a un beau jeune homme qui est entré pour dire qu'il te cherchait. Je lui ai dit qu'il ne pouvait pas rester là, alors il est allé t'attendre dehors.

De qui est-ce qu'elle parle ? Intrigué, Harry repose alors le tissu et il chuchote à son tour :

— Couvre mes arrières si la dragonne revient.

La jeune femme lui fait un clin d'œil, et c'est tout intrigué que le bouclé se met en route. Est-ce que c'est encore un code caché pour parler de Louis ? Il aurait pu oublier le double de ses clés... mais pourquoi venir le déranger lui et pas Stella ? Alors qu'il s'attend à découvrir le châtain derrière la lourde porte en bois, Harry déchante pourtant en se retrouvant face à Tim.

Il n'a pas répondu à un seul de ses appels depuis sa dernière visite.

— Salut.

— Qu'est-ce que tu fais ici ?

— On peut parler ?

— Non.

Harry se retourne pour rentrer à l'intérieur, mais une main ferme sur son épaule l'empêche de bouger. Il sent son cœur commencer à s'emballer, mais pas pour de bonnes raisons. Il n'oserait pas lui faire du mal en pleine rue, n'est-ce pas ?

Harry pourrait se défendre. Il est musclé. Moins que Tim, mais il pourrait se défendre. Plus les jours passent, et moins il réussit à reconnaître l'homme dont il est tombé amoureux. Leur dernière dispute a été un douloureux électrochoc. Le point de non-retour.

— Laisse-moi tranquille, je n'ai plus envie de te voir.

— Écoute, je suis désolé pour ce qui s'est passé. Je te promets que ça ne se reproduira plus. Mais c'est toi aussi, parfois tu me mets dans ces états, je te jure...

Harry serre les dents et il fait la première chose qui lui passe par la tête : attirer l'attention des personnes présentes autour d'eux.

— JE T'AI DIT DE ME FOUTRE LA PAIX !

Le ton de sa voix cassée le surprend lui aussi, mais il utilise la surprise de Tim pour s'extraire de sa prise et retourner rapidement à l'intérieur du théâtre. Il prend bien soin de fermer à clé derrière lui, et il sursaute quand il sent qu'un poing puissant est venu s'écraser sur la pauvre porte.

— TU FAIS CHIER, vocifère Tim derrière la porte.

Harry peut entendre quelques passants s'étonner de la scène. Il espère que Tim aura suffisamment honte pour se barrer, même s'il a peur de le voir l'attendre plus tard, quand il aura fini le travail.

Il attend plusieurs secondes, comme figé, quand il se rend compte que ses mains se sont mises à trembler. Il les serre alors contre lui, et il ferme les yeux pour tenter de calmer sa respiration devenue saccadée. Il n'aime pas ce qu'il est en train de devenir. Un être effrayé à l'idée d'en apercevoir un autre dans la rue, et incapable de se défendre comme il le voudrait. Quelqu'un qui fait le fier devant les autres, mais qui depuis plusieurs jours, ne dort presque plus, par peur de finir un jour dans les pages des faits divers.

À quoi est-ce que ça rime, tout ça ? Se battre pour défendre sa place au travail, sans savoir si la chance lui sourira un jour. Se battre dans sa vie personnelle, pour enchaîner les déceptions, et se retrouver aujourd'hui dans une situation dangereuse. Si quelqu'un lui proposait d'avaler une pilule pour tout recommencer à zéro, à cet instant précis, il l'aurait prise.

Il n'aurait pas écouté ses parents, trop frileux à l'idée de le voir quitter le domicile pour partir à l'étranger à ses 18 ans. Il aurait dû suivre son instinct et partir s'installer aux États-Unis. Il serait peut-être aussi paumé qu'aujourd'hui, mais il aurait au moins tenté quelque chose. Quelque chose de plus grand que cette vie dont il sent prisonnier aujourd'hui.

Il pousse un énième soupir, et il laisse reposer son front contre le bois, les yeux clos. On dirait que tout est revenu à la normale dehors. Il ne sait pas si Tim est parti, ou s'il l'attend seulement plus loin.

Il n'a pas envie de le savoir.

Harry ignore combien de temps s'écoule en restant ainsi, mais il sursaute en entendant qu'on appelle son prénom.

Quand il se retourne, c'est un petit choc. Certains de ses collègues l'observent avec une lueur d'inquiétude dans le regard. Même Margaret a pincé ses lèvres, et ce qui ressemble presque à de la gentillesse déforme ses traits durs. En cheffe de file, c'est Laura qui s'est approchée avec une moue soucieuse.

— On a... entendu. Qui est-ce que c'était ?

Harry aurait aimé leur dire de le laisser tranquille.

De s'occuper de leurs affaires.

De l'oublier, et de les laisser se démerder avec ce théâtre miteux et cette pièce de merde.

Au lieu de ça, il s'effondre dans les bras de Laura, et il a l'impression d'y pleurer toutes les larmes de son corps.

Stardust Melodies {L.S}Où les histoires vivent. Découvrez maintenant