Stardust Melodies {L.S}

HARRY (🎭🙄)

Voilà un autre chapitre, avec un peu de dramaaaa (mais on adore ça)

***

Harry est d'une humeur maussade, cet après-midi. Il a passé une bonne partie de la journée dans les coulisses du théâtre, entouré de ses costumes. Personne n'a osé le contredire quand il a affirmé que certains détails devaient encore être peaufinés.

En vérité, il cherche plutôt à échapper à Margaret. Il est persuadé que Louis ne reviendra plus jamais, et il a essayé de trouver la meilleure façon d'annoncer ça à sa patronne. Il est déjà prêt à faire ses cartons. Il est bien conscient d'être le fautif dans cette histoire, même si la récente pique de Louis lui reste en travers de la gorge.

À force d'observer ses créations, il finit bien par remarquer deux ou trois défauts. Elles étaient parfaites quand elles étaient posées sur leurs mannequins. Un comédien, forcément, ça bouge. Harry n'en veut pas aux interprètes. Il met leurs petites maladresses sur le compte du stress, mais il note dans un coin de sa tête les indications à donner pour éviter que les costumes s'abîment pour de bon.

Il avait pu faire des rectifications lors des répétitions, mais il sécurise malgré tout quelques points pour éviter une catastrophe en plein spectacle. Si Esméralda s'emmêle les pieds dans sa robe, ou si un tissu se déchire, ce serait ridicule. Et Harry a eu sa dose de karma pour l'année.

Il est donc en plein travail, avec quelques aiguilles en bouche et le regard concentré, quand Laura fait son entrée.

Sa collègue était présente à la même soirée, et elle a bien sûr assisté à toute la scène.

Inconsciemment, Harry a sans doute essayé de l'éviter, elle aussi. Ils ont l'habitude de passer leurs journées de travail ensemble, mais cette fois, il se sent honteux. Il a toujours eu l'alcool joyeux, mais pas ce soir-là. Il avait donné une mauvaise image de lui-même, et il redoute désormais ce qu'elle peut bien penser de lui. Elle doit le prendre pour un abruti fini, comme la moitié des invités présents, sans doute.

Hormis Stella et Louis, Harry n'a pas reçu de remarque particulière, mais il se souvient très bien des regards surpris et carrément outrés. Il a été un vrai con, et il le sait.

— Salut !

— Chalut...

Elle semble mal à l'aise, elle aussi. Elle tape dans ses mains en regardant autour d'elle (comme si elle ne connaissait pas cette pièce sur le bout des doigts), et elle hésite avant de s'asseoir sur un tabouret.

Harry n'a pas entendu la voix tonitruante de Margaret, mais il s'attend déjà au pire. Il retire alors les petites pièces de sa bouche avant de se concentrer sur son amie.

— Qu'est-ce qui se passe ?

— Oh... pas grand-chose. Tu sais, tout roule sur des roulettes ou presque maintenant qu'on en est aux représentations, je n'ai plus beaucoup de choses à préparer.

— Laura.

Harry aurait souri en temps normal, parce qu'elle n'a jamais été douée pour les mensonges. Il sent bien qu'elle a quelque chose à lui dire. Il vient alors prendre un autre tabouret pour s'installer face à elle, alors qu'elle le regarde avec hésitation.

— Est-ce que Margaret a dit un truc ? Elle me déteste et on est dans la merde pour ce soir ? Et tous les autres soirs, d'ailleurs ?

— Hein ? Mais de quoi tu parles ?

Cette fois, c'est au tour de Laura d'être confuse. Elle fronce les sourcils tellement fort qu'une petite ride apparaît sur son front.

— Ben... Margaret, Louis... J'imagine qu'il nous lâche après ce qui s'est passé, et c'est de ma faute.

— En fait... Louis est bien là. Il est arrivé il y a moins d'une heure, je crois. Il a ramené des viennoiseries pour tout le monde parce qu'il a dit qu'il voulait mieux connaître la troupe. Margaret est aux anges !

Harry fronce les sourcils et il se redresse subitement, décidé à aller voir ça par lui-même. En quelques pas, il se retrouve sur scène, et c'est vrai. Un carton de viennoiseries est posé sur le parquet. Tout le monde s'est rassemblé autour. Ils discutent joyeusement ensemble, jusqu'à ce que certains lèvent les yeux vers Harry. Il y a un petit moment de blanc, mais certains l'encouragent à venir les rejoindre. Sûrement pour préserver les apparences devant Margaret.

Elle n'était pas présente à la soirée, elle.

Harry observe Louis, et il remarque bien que tout son corps est tendu. Pourtant, il essaie de ne pas le montrer aux autres. Des comédiens se jettent quelques coups d'œil, mais d'autres font en sorte de relancer les conversations, pour que rien ne paraisse étrange. Quand le costumier tend la main vers le carton, il est surpris de ne trouver... que du vide. Et d'entendre la voix de Louis qui s'adresse directement à lui.

— Ah oui, désolé... La boulangerie n'en avait plus beaucoup. Il fallait venir plus vite !

Il l'a fait exprès, évidemment. Harry le devine en voyant le faux sourire qui étire ses lèvres.

Alors, ça va être ça, maintenant ? Un jeu passif-agressif jusqu'à la fin des représentations ?

— Tu veux mon pain au chocolat, Harry ?

Un acteur lui tend la moitié de son dessert avec un léger sourire, mais le bouclé décline en secouant la tête.

— C'est gentil, mais non merci, je n'aime pas trop tous ces trucs de toute façon.

Mensonge.

Harry en raffole, et il soupçonne Louis d'avoir choisi spécifiquement ces pâtisseries. Pas un matin ne passe sans qu'il accompagne son café d'un croissant ou d'un pain au chocolat.

Louis est forcément au courant.

Étonnamment, Harry décide d'être le plus adulte des deux et de prendre sur lui. Pour le bien de la troupe.

Quand il remarque que Louis s'éclipse un instant en coulisses, il s'arrange bien sûr pour le rejoindre. Il ne veut pas causer une nouvelle scène quand il serait si facile de les entendre, mais il sait qu'il vaut mieux crever l'abcès. À s'envoyer des piques à longueur de journée, ce sont les autres qui risquent d'en pâtir, et ça ne serait pas juste pour eux.

— Louis ?

Harry tente d'attirer son attention à plusieurs reprises, sans succès. Le jeune homme s'obstine à fouiller dans ses affaires, probablement à la recherche d'un objet qui n'existe pas. Juste pour voir Harry décamper le plus vite possible, pense-t-il.

— Je voulais juste te remercier de ne pas avoir lâché le théâtre.

Finalement, Louis se redresse lentement, et il hausse les épaules, le visage impassible.

— Peu importe. Ce n'est pas pour toi que je le fais, et ça ne change rien à ce que j'ai dit. Je ne veux plus te parler.

Harry accuse encore le coup, et il le laisse rejoindre les autres sans un mot de plus. Oui, les prochaines semaines s'annoncent bien longues.