𝗖𝗵𝗮𝗽𝗶𝘁𝗿𝗲 𝟭𝟬 🁙

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Taehyung


Oui. Jeon avait raison. Ça me tuerait presque de l'admettre. Encore plus quand j'entrevois son petit air suffisant, face à moi.

Mal éclairé, son visage se définit pourtant bien sous la lumière orangée du lampadaire qui brille au-dessus de nos têtes.

Nous sommes assis sur le trottoir devant le bar, qui s'est bien vidé depuis l'annonce des meurtres.

« C'est forcément lié, de toute façon. Ça ne peut pas être une coïncidence, gémit Emma en se massant les tempes. »

L'alcool qu'elle a ingurgité plus tôt doit sans aucun doute commencer à lui faire défaut. Mais elle ne perd rien de son enthousiasme et de son énergie quotidienne. Au contraire.

Elle semble montée sur ressort.

« Bon ! Peu importe, malheureusement il est déjà trop tard pour eux, mais il faut qu'on continue de creuser ! Après tout, c'est nous qui sommes tombés sur le premier crime connu, avec Alfreda ! s'exclame-t-elle en se prenant la tête entre les mains, réfléchissant à toute allure. »

Ses yeux parcourent vivement le goudron sous nos fesses, ponctué par des creux et des touffes de mauvaises herbes qui tentent d'en sortir.

« Oui, c'est sûrement le même criminel, au vu du mode de fonctionnement. Ça crève les yeux que c'est la même personne, ajoute Jeon en étendant ses jambes face à lui. »

Il fait froid, malgré le ciel dégagé. Même emmitouflés dans nos manteaux en laine, le temps de novembre est rude pour nos joues et nos mains devenues rouges et douloureuses par le seul degré ambiant.

Emma acquiesce, tandis que je ne dis rien, trop concentré sur toutes les informations que nous accumulons.

Machinalement, je triture l'une des pierres qui se trouve près de la bouche d'égout, l'esprit évasif.

Évidemment, toute cette histoire tient la route.

Mais qu'est-ce que la mort d'une jeune femme orpheline peut bien avoir à faire avec la mort de deux ouvriers d'une soixantaine d'années ?

Et puis, ce n'est pas comme si des centaines de kilomètres séparaient Londres de Liverpool. Ce n'est pas la porte d'à côté.

Alors, pourquoi se donner autant de mal ? Pourquoi agir dans deux villes autant éloignées l'une de l'autre ?

Les cibles n'ont pas été choisies au hasard, c'est certain.

Elles ont forcément un lien entre elles, mais lequel ?

C'est à ne rien y comprendre, et pourtant, cet instinct dont parlait Jeon, qui nous titille les entrailles pour pousser notre réflexion jusqu'au bout, commence à s'engrener à l'intérieur de mon esprit.

Je grogne, peu enjoué à l'idée de lui donner raison. Mais c'est trop tard, puisqu'il avait déjà raison sur le fond de toute cette histoire.

D'ailleurs, il ne manque pas une occasion de me le faire remarquer.

« Au fait, par rapport à cette histoire de flatter mon intelligence deux fois par semaine..., commence-t-il l'air de rien, le haut du corps à moitié penché vers l'arrière, en équilibre sur la paume de ses mains.

— Ne vous méprenez pas, j'interviens avant qu'il n'ait pu continuer, les yeux figés sur l'épaisseur des ténèbres qui se défilent à l'horizon. Ce n'est pas grâce à votre intelligence que vous l'avez deviné, c'est grâce à votre intuition et à un coup de chance. Rien d'autre. »

𝑀𝑢𝑟𝑑𝑒𝑟(𝘩)𝑒𝑟  〕  𝑡𝑎𝑒𝑔𝑔𝑢𝑘Où les histoires vivent. Découvrez maintenant