𝑀𝑢𝑟𝑑𝑒𝑟(𝘩)𝑒𝑟 〕 𝑡𝑎𝑒𝑔𝑔𝑢𝑘

𝗖𝗵𝗮𝗽𝗶𝘁𝗿𝗲 𝟯𝟲 🀴 🀷

Taehyung

Je tire mon béret sombre sur mes yeux, pour faire mine de me protéger du froid qui me gifle les pommettes, mais ça ne sert strictement à rien.

« Pourquoi ce maudit quai n'est pas couvert, je gronde en avisant du coin de l'œil le reste des passants qui se pressent à nos côtés sur le petit rempart de goudron, dans l'attente que le train daigne se montrer. »

Jungkook hausse les épaules, et vient plaquer ses mains gantées de laine autour de son nez pour le réchauffer et souffler par la même occasion contre ses paumes.

« Au moins comme ça, on peut sentir l'odeur du pain, fait-il en tournant la tête vers une petite boulangerie installée non loin de l'extérieur de la gare. »

En effet, la douce odeur alléchante qui s'en échappe fait apparaître derrière mes paupières l'image d'un pain rond bien chaud, grillé et craquant à la perfection avec sa mie onctueuse.

Pourtant, j'ai mangé ce matin. Mais pour disposer du temps nécessaire utile à la programmation de notre journée, il avait fallu qu'on se lève plus tôt, ce qui expliquait pourquoi mon pauvre ventre se plaisait à rêvasser à des pains bien croustillant en bouche.

D'autant plus qu'on avait dû passer chez le cordonnier de la ville pour trouver de nouvelles baskets à Jungkook.

« Il ne devrait plus tarder, annonce-t-il en regardant au loin, dans l'épais brouillard qui obscurcit une partie des rails et du quai auquel nous n'avons pas axés. »

Je hoche la tête, et resserre mes doigts gelés autour des pans de mon manteau.

Les gens se pressent autour de nous, des familles, des enfants, qui veulent regagner Londres avant la rentrée des classes qui aura lieu dans quelques jours à peine.

Après Noël, le jour de l'an va rapidement suivre, et nous serons très vite début janvier.

Ce qui n'est pas pour me déplaire étant donné que je n'aspire qu'à être en mai, quand il fera chaud et que je n'aurais plus à me préoccuper de si oui ou non, ce manteau va avec ce pull, et si toutes ces épaisseurs ne me font pas ressembler à une boule de bowling ambulante.

« Je crois qu'il arrive, prononce Jungkook en se tordant le cou pour essayer de voir au-delà de la foule qui vient d'un même mouvement de se rapprocher du bord du quai.

— Ils ne peuvent pas attendre, sérieux... »

Mon marmonnement que j'ai prononcé volontairement assez fort à travers le crissement des rails alentour, et du bourdonnement que créaient les voyageurs, fait retourner plus d'une tête dans ma direction.

Je me contente de les fixer froidement pour toute réponse, agacé de leur stupidité apparente et de la non patience dont ils font preuve, jusqu'à mettre leur vie en danger en s'approchant trop près du bord.

« Laisse, m'incite Jungkook en arrangeant son écharpe autour de son cou, qui essaie de s'envoler avec le vent. »

Les effluves délicieux des pâtisseries ne sont plus qu'un lointain souvenir, remplacés par l'odeur omniprésente de la pluie qui embaume l'atmosphère.

J'apprécie aussi cette senteur là, tout comme j'apprécierais de monter dans le train avant que l'averse ne nous tombe dessus, étant donné qu'aucun toit ne protège nos têtes.

« On monte, on s'assoit pour que les contrôleurs vérifient nos billets, énumère doucement Jungkook tandis que l'imposant engin bruyant qui va nous servir de transport, arrive à notre hauteur. Puis on part à la recherche de cette embouchure magique qui a fait disparaître les deux dignitaires. »