Chapitre 27 : Talents cachés

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– Je compte sur toi ma grande, dit l'oncle d'Annabelle d'un ton à la fois sérieux et excité.

Elle avait entendu - maintes et maintes fois tout au long de la semaine - en quoi cette relation pouvait rapporter gros à sa famille. Plus Nicolas de Coutais faisait adhérer de clients fortunés à sa banque, mieux les affaires se porteraient. Les Jacquemin faisaient désormais partie des cibles visées et dans ce cas précis, Annabelle représentait la flèche qui pouvait leur rapporter le plus de points. Malheureusement pour eux, elle ne se voyait pas jouer les Robins des bois et décida de garder son archet caché. Il fallait qu'elle pense aussi à elle. Avec un peu de chance, elle rencontra quelqu'un qu'elle affectionne tout particulièrement et qui plaira à ses aînés. Pour le moment, elle devait se contenter de satisfaire leur demande. Elle n'attendait donc rien de ce rendez-vous. Il l'emmènerait au théâtre et elle manifesterait un mal de tête comme excuse pour pouvoir rentrer plus tôt.

Quand Paul se présenta le soir même à l'entrée de la demeure des de Coutais, il donna la meilleure image de lui-même, vêtu d'un costume somptueux. Ses cheveux avaient été plaqués en arrière et pas une seule mèche ne dérogeait à la règle. Il usa de ses bonnes manières pour conquérir le cœur de la famille.

– Je laisse ma fille entre vos mains. Prenez-en soin. Et tâche de ne pas dépasser le couvre-feu Annabelle, Nicolas se montra-t-il étrangement très protecteur.

Jamais auparavant il ne s'était référé à elle comme sa " fille ".

– Ne vous en faites guère Monsieur. Elle sera rentrée à l'heure. J'ai également demandé à ma sœur Suzanne de nous chaperonner pour la soirée.

– Entendez-vous cela mon cher ami ?, intervint Clothilde. Ce jeune homme pense à tout ! C'est très respectable de votre part jeune homme.

Paul salua son public d'une légère courbette et passa son bras sous celui d'Annabelle pour l'escorter jusqu'à la voiture. Celle-ci se força à jouer le jeu jusqu'au bout, acceptant même ses compliments les plus communs. Mais près du véhicule, une silhouette familière apparut. Gus, habillé de son plus beau complet, ouvrit la porte et tendit la main à son amie pour l'aider à monter à l'intérieur.

– Mademoiselle, inclina-t-il distinctement la tête.

Suzanne attendait seule sur son siège et Annabelle attendit de s'installer à côté d'elle pour lui demander avec enthousiasme :

– Mais que fait Gus ici ?

– Comme le cocher se faisait âgé, j'ai réussi à convaincre mes parents d'engager Gustave pour le remplacer.

– Quelle idée brillante !, la félicita Annabelle.

– Je n'ai aucun mérite. Il m'avait raconté que c'était son rêve de conduire des calèches.

C'était curieux, Gus ne lui avait jamais mentionné cela. Et quand Annabelle le lui avoua, la couleur des joues rosées de son amie s'intensifia.

– Il ne l'a dit qu'à moi ?, Suzanne détourna-t-elle timidement le regard.

Une demi-heure plus tard, les secousses causées par les pavés s'arrêtèrent et il était temps pour Gus de les laisser tous les trois dehors. Mais quand Suzanne sortit en dernier du véhicule, elle trébucha dans les bras de Gus qui la rattrapa juste à temps.

Elle plaqua sa main sur son front, se plaignant d'avoir soudainement des vertiges et une migraine atroce. Suzanne venait de voler son ticket de retour. Elle devrait imaginer une autre excuse valable désormais.

– Tant pis pour la promesse que j'ai faite. Gustave, pourriez-vous raccompagner ma chère sœur chez nous avant qu'elle ne nous fasse un malaise ?

Annabelle s'inquiéta pour son amie mais Suzanne lui maintint que tout irait bien, qu'elle devait simplement être fatiguée. Après lui avoir finalement ordonné de bien profiter de sa soirée, Suzanne laissa son frère et son amie partir à leur rendez-vous.

Annabelle de CoutaisOù les histoires vivent. Découvrez maintenant