Chapitre 6 : La neige n'aurait pas pu mieux tomber

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Marius repassa la porte vingt minutes plus tard, si coloré de blanc qu'il aurait fait un excellent bonhomme de neige pour le spectacle de l'école. Madame Cluzet fut soulagée en apercevant l'élève revenir.

– Isaac arrive-t-il ? demanda-t-elle.

– Il était derrière moi, il ne devrait pas tarder.

Annabelle se retenait presque de respirer.
C'est au bout d'une quinzaine de minutes qu'elle commença à encore plus s'inquiéter.

– Je vous assure que nous ne nous sommes pas quitté !, affirma le grand blond.

Annabelle serrait fort ses jupons dans ses mains. Et s'il lui était arrivé quelque chose ? Elle ne pourrait le supporter. Quand tout le monde respirait l'optimisme et l'espoir, Annabelle ne pouvait s'empêcher d'avoir de mauvais pressentiments.
Marius et la maîtresse d'école discutaient de ce qu'avait dit le Maire aux deux garçons. La neige commençait à se calmer dehors et tous avaient reçu l'ordre d'attendre avant de pouvoir rentrer chez eux.

– Les vacances commencent bien n'es-tu pas d'accord avec moi Anna ?, Daniela essaya-t-elle d'occuper son amie.

Elle n'entendit aucune réaction de sa part mais elle commençait à avoir l'habitude de parler à elle-même. Malgré cela, elle remarqua ne même plus sentir sa présence à ses côtés et son commentaire ne la fit plus rire du tout. Elle regarda partout autour d'elle mais aucun signe de sa complice.

– Anna ? Anna !, s'empressa-t-elle de l'appeler. Monsieur, Annabelle était là, juste ici et elle... elle n'y est plus. Elle est nulle part !

– Cette petite sotte va vraiment m'en faire voir de toutes les couleurs jusqu'au bout !, se plaint Monsieur Loiseau entre ses dents.

Daniela se mit à culpabiliser, elle aurait dû savoir que sa meilleure amie ne resterait pas sans rien faire.

– Elle est sûrement partie chercher Isaac ! Il faut faire quelque chose !, cria-t-elle.

Madame Cluzet refusa et fit clairement comprendre que pas une personne de plus ne sortirait de cette classe.

– Annabelle est inconsciente ! Chercher Isaac dans la tempête c'est comme chercher une anguille dans une botte de foin, Daniela entendit-elle chuchoter une de ses camarades.

– Une « aiguille » Charlotte, on dit une « aiguille dans une botte de foin », s'agaça la brunette. Alors la prochaine fois que tu veux faire une remarque, appliques-toi donc pour qu'elle soit correcte.

Marius ricana au loin, surpris de la répartie de Daniela. Mais celle-ci n'avait que faire de son soutien, il restait Marius après tout.

Annabelle n'avait pas pensé aux conséquences de sa fuite. Elle plissait les yeux pour essayer d'y voir quelque chose dans ce village si sombre et à la fois si blanc. Elle essayait d'appeler Isaac mais sa voix ne pouvait traverser le vent et arriver jusqu'à lui. Elle aurait dû prendre son manteau avant de sortir en douce mais c'était ça ou risquer de se faire prendre. Le choix avait rapidement été fait. Annabelle se forçait à ne pas pleurer. Elle avait trop peur que son visage entier ne transforme l'eau qui coule sur son visage en un épais voile de glace. Alors elle continua d'avancer vers la maison de Monsieur le Maire, priant pour le rencontrer en chemin. Elle essayait autant que possible de crier mais savait qu'on aurait eu du mal à l'entendre rien que dans une pièce vide. Elle ne s'entendait même plus, tellement le sifflement du vent prenait de l'ampleur. Soudain, son pied buta contre quelque chose et lui fit perdre l'équilibre, la faisant voltiger jusqu'au sol gelé. Elle pensait avoir trébuché sur une branche ou une pierre mais la curiosité la poussa à se retourner.

Annabelle de CoutaisOù les histoires vivent. Découvrez maintenant