Annabelle se trouvait allongée dans son lit le lendemain matin, la main en évidence au-dessus de son visage. Elle admirait sa bague de fiançailles depuis 20 bonnes minutes, des étoiles dans les yeux. Elle n'en revenait toujours pas d'avoir dit oui, du moins pas si tôt. Pas qu'elle doutait de ses sentiments mais simplement parce qu'elle n'arrivait pas à réaliser que ça lui arrive à elle. La phrase de sa tante résonnait en boucle dans sa tête : " Qui aurait pu croire que quelqu'un ait voulu te demander en mariage, et avant ma Bertille qui plus est ? " Mais cela ne battait pas la remarque amusée qu'avait faite son oncle Nicolas après l'avoir félicité : " Tu peux remercier Paul. Sans lui, j'aurais été obligé de donner ta main à un vieux fou deux fois plus fortuné." Il avait toujours le mot pour rire. Bertille, elle, s'était contentée de faire les louanges de Paul et était rassurée qu'Annabelle n'épouse pas un paysan, comme elle l'aurait parié il y a quelques années. " Tu fais officiellement partie des nôtres ", avait-elle ponctué son fameux hochement de tête prétentieux.
Annabelle n'en avait que faire de leur avis. Au fond, elle avait fait sans le vouloir exactement ce qu'ils attendaient d'elle. Elle avait arrêté d'aller contre sa nouvelle vie et il en était ressorti énormément de positif. A ce moment-là, elle se sentait comblée. Mais elle voulait savourer ce moment et espérait que tout n'aille pas trop vite. Elle n'avait qu'à peine dix-sept ans.
Mais des coups répétés sur sa porte la firent sortir de sa rêverie. Elle n'eut pas l'occasion de donner la permission d'entrer que sa cousine faisait déjà les cent pas dans sa chambre.
– J'ai besoin que tu sois mon chaperon cet après-midi !
Elle n'était décidément agréable que quand elle avait besoin de son aide. Quel jeune noble allait encore devoir supporter sa cousine pour une demi-journée ?
– Je devais retrouver Suzanne pour lui...
– Propose-lui de t'accompagner. Maintenant qu'on t'a passé la bague au doigt, je ne peux pas me permettre de traîner.
Bertille prit place devant la coiffeuse d'Annabelle et se mit à brosser compulsivement ses cheveux.
– Et cette satanée crinière qui ne veut pas coopérer aujourd'hui. Je ne peux pas me présenter devant Archibald avec cette allure.
Annabelle dégagea les draps devant elle et se redressa.
– Veux-tu parler d'Archibald de Montrichard ? Le marquis de Montrichard ?, la questionna-t-elle.
– Je l'ai rencontré à une réception la semaine dernière, où Léon Le Bas, le fils du Colonel Le Bas m'avait invité. Mais ! Veux-tu m'aider au lieu d'ouvrir la bouche comme une carpe sortie de l'eau ?
Annabelle se pressa de rejoindre sa cousine, qui lui balança presque le peigne au visage.
– Je dois être parfaite.
Annabelle n'avait aucune idée de pourquoi sa cousine était si indécise. Elle ne donnait généralement aucune explication ; une fois débarrassée d'un prétendant, elle en retrouvait un autre la semaine suivante. Annabelle aimait imaginer les rendez-vous de sa cousine et le mal-être que pouvait ressentir le cavalier face à cette énergumène. Mais d'un autre côté, même si Bertille ne la traitait pas toujours de la meilleure des façons, elle ne pouvait s'empêcher de ressentir une once de pitié face à la pression que sa cousine s'infligeait...
– Tu sais Bertille, tout n'est pas toujours une compétition... Surtout quand il s'agit de trouver la personne avec qui tu vas choisir de passer le restant de tes jours...
– C'est bien pour ça que je suis très exigeante, répondit-elle un peu trop sûre d'elle.
– Et tu as amplement raison de l'être, mais pas forcément pour les raisons que tu penses.
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Annabelle de Coutais
Ficción históricaAnnabelle, jeune villageoise française de 12 ans est élevée par ses parents dans un village de campagne. A l'été 1879, quand ses parents décèdent brutalement, Annabelle se retrouve à vivre une vie bourgeoise pleine de nouvelles règles dans le Châtea...