La créature apparut à la lueur des halogènes qui éclairaient les allées entre les infrastructures des remonte-pente et les barres de logements résidentiels, situées en contrebas. Tout de noir vêtue, massive, et à la fois informe. A peine humaine d'apparence. Ses extrémités, les mains comme le visage, disparaissaient sous des couches de piètres vêtements.
Une sorte d'aura tournoyante l'entourait : il s'agissait en réalité de fragments de tissu, qui venaient s'ajouter, couche par couche, par dessus ceux que le Croque-Mitaine possédait déjà, comme des rustines. Des morceaux de manche, un fragment d'écharpe, un doigt entier, qui manquait à sa main gauche...
Et en même temps, cette aura morbide qui émanait de lui, même à distance.
Milan, qui tenait toujours Irina dans ses bras, la déposa fermement dans ceux de Sergi.
– Emmène-la, lui dit-il. Tu t'occupes d'elle, je m'occupe de lui.
Le visage de Sergi Guerra se peignit d'interrogation. Il voulut un instant demander des explications, mais dans le même temps qu'il reprenait Irina, inconsciente, dans ses bras, il vit lui aussi la silhouette en arrière. Elle n'était pas tout à fait formée, encore. Des fragments de poussière voletaient autour d'elle, comme pour achever sa reconstruction. Elle n'émettait pas le moindre son ni le moindre geste. Elle se reconstituait à partir de rien.
Milan se retourna dans sa direction. Il lui manquait l'essentiel pour comprendre ce qu'était cette créature exactement, ce pourquoi il aurait eu bien besoin des informations récoltées par Célia sur Evgenia Klobber et la manière dont elle était devenu le Croque-Mitaine. Il en savait davantage néanmoins que lors de leurs précédentes confrontations. Il savait que la créature protégeait Irina. Apparemment, elle surgissait lorsque cette dernière perdait connaissance. Lorsqu'elle était apparue dans le stade Iceberg, plusieurs jours auparavant, Irina avait un bleu sur la joue. On pouvait imaginer qu'elle s'était cognée, peut-être même en patinant, et qu'elle avait sombré dans l'inconscience, en laissant le double de Evgenia prendre le dessus. C'était loin de tout expliquer, mais cela paraissait cohérent.
Quant à ses pouvoirs, Milan savait désormais plusieurs choses : elle possédait une forme immatérielle, dont les guenilles constituant ses vêtements n'étaient que l'enveloppe. C'était probablement une créature éthérée, constituée d'énergie, capable de se donner l'aspect de la matière s'il le fallait. Cela expliquait à la fois qu'il traverse le corps du Croque-Mitaine, mais pas ses vêtements ; cela expliquait que la créature puisse se "téléporter", mais avec chaque fois un délai, car ce déplacement spatial provoquait probablement la désintégration de ses vêtements, son enveloppe matérielle, qu'elle était contrainte de reconstituer à chaque fois, afin de contenir sa nature éthérée.
Cette théorie avait le mérite d'expliquer les traces de morceaux de tissu qu'elle laissait derrière elle, qui se désagrégeaient ensuite : privé de la présence du Croque-Mitaine, le tissu perdait son essence même.
Cela sous-entendait également que Milan devait pouvoir prévoir les "sauts" à distance de la créature, qui n'étaient pas à proprement parler du domaine de la téléportation, à l'instar par exemple des pouvoirs de Ja'son. Un saut du Croque-Mitaine relevait de l'émission d'énergie, à distance. Cette énergie était limitée ce pourquoi le saut ne pouvait être très long, surtout s'il rencontrait une barrière matérielle. Néanmoins, il devait être accompagné, voire précédé, d'une manière ou d'une autre, d'une sorte de pulsation énergétique, potentiellement décelable...
VOUS LISEZ
Milan Lazsco : La Dette [E4 Quadrilogie du vampire] en cours
FantastiqueVous connaissez Milan. Il va, il vient... des fois il disparaît ; mais il revient toujours. Ce que je me demande, c'est la véritable raison qui l'amène à Sotchi, là, maintenant, en plein Jeux Olympiques d'Hiver... (Toute ressemblance avec des événem...