Indices

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Milan Lazsco restait debout, dans l'ombre des gradins. La cohue régnait dans la grande salle du centre de patinage de vitesse Adler Arena.

L'Adler Arena était le second site olympique accueillant les événements de patinage. Il possédait une capacité d'accueil moindre que le Centre Iceberg, il était surtout moins flamboyant que son grand frère, qui accueillait le patinage artistique. C'était là que se déroulaient les épreuves de vitesse essentiellement.

En raison des déboires du Centre Iceberg, les créneaux d'entraînement de ses patineurs avaient été transférés sur cette seconde patinoire olympique. Or, l'Adler Arena avait déjà ses propres programmes d'entraînement et de compétition, les seconds ne pouvant être en aucun cas déplacés. Cela impliquait la présence d'athlètes transfuges du site Iceberg en surnombre, sur des créneaux étriqués, dans un cadre dont l'organisation précipitée ne fournissait qu'un semblant d'ordonnance. En réalité, le chaos l'emportait allégrement, chacun y allait de son intérêt, et les décisions autoritaires des organisateurs pour juguler ce chaos ne faisaient qu'attiser l'anxiété des équipes sportives.

Milan observait tout cela en spectateur, peu intéressé quant à lui des retombées médiatiques ou sportives des événements. Il surveillait sa protégée, depuis le matin. Non qu'il y eut beaucoup de risques d'une intervention surnaturelle à cet instant, mais sa vigilance ne s'arrêtait pas au danger lui-même. Sa vigilance s'exerçait à pénétrer au mieux les ressorts de leur inextricable situation, car s'il voulait résoudre cette énigme, il devait comprendre quelles forces et quels secrets s'ourdissaient en arrière plan.

Stefan Pavnic était présent. Mieux que beaucoup, il parvenait à insuffler un peu de rigueur et de souplesse mêlée au chaos ambiant. Evgenia et Irina se préparaient, au milieu des autres, très concentrées, au point quasiment d'oblitérer les événements de la nuit. Milan n'avait pas eu le droit d'approcher la championne. L'entraîneuse s'y était opposée, arguant que le drame de la patinoire sabotée était suffisant en soi pour ne pas en rajouter, et insistant sur l'importance de faire le vide dans l'esprit de la jeune patineuse.

Milan n'avait eu lui-même qu'un court entretien avec Evgenia Klobber, qui lui avait fermement tenu tête. Elle avait répondu abruptement à ses quelques questions. Oui, ils avaient été réveillés par le chaos dû au sabotage. Oui, elle dormait dans la même chambre que sa protégée. Non, elles n'avaient rien vu de particulier. Elles s'étaient très bien rendormies après coup, merci - affirmation à laquelle Milan ne croyait en rien, étant donné l'épaisseur du maquillage sur le visage d'Irina, qui au matin cherchait à cacher ses cernes.

La matinée était passée dans ce climat à la fois désordonné et acharné. L'après midi avançait, cette fois, et Milan échangeait régulièrement par SMS avec Célia. La jeune femme, avec l'aide des Sentinelles, avait réussi à retrouver le fameux sponsor qui s'était disputé avec Evgenia Klobber la veille. Il se nommait Kurt Richter. La jeune informaticienne Maria Vasquez avait même remonté jusqu'au lien entre cet individu et l'entraîneuse. Kurt Richter avait fait partie du staff olympique de la RDA dans les années 80. Il avait pu fréquenter Evgenia Klobber à l'époque où elle concourrait elle-même, avant la blessure qui l'avait évincée des pistes.

Plus tard dans l'après midi, Célia s'était arrangée pour rencontrer cet individu, et lui poser des questions, en se faisant passer pour une journaliste, sous le prétexte d'une enquête sur les pratiques des sponsors. En faisant usage de ses capacités psychiques, Célia avait pu amener l'homme à parler de ses contacts dans le milieu actuel du patinage, et de son expériences en RDA autrefois ; mais à ce moment, justement, il s'était comme bloqué. De la même manière qu'une personne hypnotisée peut se réveiller si l'on cherche à lui faire commettre un acte contre sa volonté, il était sorti de la transe imposée par Célia. Aussitôt, il avait trouvé un prétexte pour s'esquiver. Comme ils se trouvaient dans un milieu public, Célia avait dû le laisser fuir. Mais elle s'était promise de terminer leur conversation dans un endroit plus tranquille, où elle aurait toute latitude pour le cuisiner.

Milan Lazsco : La Dette [E4 Quadrilogie du vampire] en  coursOù les histoires vivent. Découvrez maintenant