Nous rentrons dans l'église illuminée par des bougies.
Edwin me tient toujours la main.
Dès que nous rentrons, plus personne ne fait un bruit.
Je passe devant la rangée dans laquelle est assise Molly et sa famille.
Devant l'hôtel, le cercueil de maman a été posé.
Le prêtre devant lui m'ouvre le passage sur la première rangée de gauche qui est vide.
Avant de m'assoir, je m'arrête et regarde Edwin.
« Je ne te lâcherais pas. » murmure-t-il à mon oreille.
Rassurée, je m'avance et m'assois.
Il fait de même sans lâche ma main gauche.
Le prêtre lui va se placer devant son pupitre qui est rangé derrière le cercueil.
Il commence un monologue que je n'écoute même pas.
Le bruit est sourd.
Autour de moi, tout le monde pleure.
Je crois que je suis tellement brisée que je serais incapable d'essayer de consoler l'un d'entre eux.
« Judy, veux-tu dire quelque chose ? »
Je lève les yeux.
Le prêtre qui est en face de moi me demande-t-il de me lever devant des personnes que je n'ai jamais vues de ma vie pour parler de ma mère ?
Je tourne la tête vers Edwin dans l'espoir qu'il m'aide à faire un choix.
De sa main gauche, il essuie le dessous de mes yeux qui sont mouillés de larmes.
« C'est ton choix, Judy. »
Je retire sa main :
« Je dois le faire. »
Il m'embrasse la main gauche et me la lâche.
Lorsque je me lève, j'ai l'impression que le monde autour de moi a arrêté de bouger.
La prête me fait signe d'aller devant le pupitre et c'est ce que je fais.
Mon cœur bat la chamade et mes jambes tremblent comme des feuilles.
« Tu peux le faire ! » me chuchote Edwin de de son banc.
« Je ... »
Personne ne parle.
On pourrait, je crois presque, entendre une moche voler.
Toutes les personnes de l'église me fixent dans l'espoir que peut-être j'ai le courage de sortir une phrase.
Si je ne regarde pas en face de moi et que je baisse les yeux, j'ai une vue imprenable sur le cercueil dans lequel repose maman.
Certaines personnes chuchotent.
Sûrement pour me juger ?
Mais que feraient-ils à ma place ?
Qui ne peut rien qu'imaginer se tenir debout, là, devant une bande d'inconnus, pour parler d'une mère qu'ils ne connaissent même pas ?
Personne, je suppose.
Alors que mes mains deviennent de plus en plus moites et grelottantes, je commence à entendre mon cœur battre dans mes oreilles.
« Je... »
J'essuie mon front mouillé.
Ma respiration s'accélère et sans que je puisse faire quoi que ce soit, j'ai l'impression qu'à tout moment mes jambes pourraient me lâcher.
Des taches noires apparaissent alors que je me bats pour tenir debout et sortir une phrase.
Les larmes montent à mes yeux, mais aucunes ne souhaitent se montrer.
« Je crois... »
Ma vue commence à se troubler et mes yeux à se fatiguer.
Je baisse les yeux vers mes mains, mais je ne vois que flou.
Les battements de mon cœur deviennent de plus en plus forts à mesure que je lutte.
« Tout va bien, Judy ? »
Je tourne ma tête sur ma gauche.
Le prêtre est près de moi.
Les larmes bloquées finissent pas par tomber.
« Vous me demandez si tout va bien ? » je réplique essoufflée.
Il se décale légèrement :
« Oui ?! »
Le self-contrôle que j'avais depuis un certain temps est parti au moment où le prêtre de l'église m'a demandé le jour de l'enterrement de ma mère si j'allais bien.
« Est-ce que j'ai l'air d'aller bien ?! » je hurle. « Ma mère est morte ! Je n'ai pas de père ! Je n'ai pas de famille ! Je n'ai plus de maison ! Et vous, vous me demandez si je vais bien ? Je n'ai que 16 ans, d'accord ?! Je n'ai plus rien à 16 ans ! Ma vie est foutue et tout le monde ici s'en fou ! »
Je me retourne vers les sièges :
« Vous n'êtes pas là pour elle, mais pour vous ! Vous culpabilisez et vous croyez qu'en venant à l'enterrement de ma mère, vous irez mieux !? Laissez-moi vous dire que plus rien n'ira bien ! C'était la meilleure personne sur terre et on me l'a prise ! »
J'ai l'impression que si je ne m'arrête pas de parler, je serai capable de dire des atrocités.
« Je suis en forme, mais fatiguée, maman ! »
Mais alors que je m'énerve contre le monde entier, une main se pose sur mon épaule.
Je pose mon regard sur elle.
« Je suis là, d'accord. » dit-il doucement.
Et alors qu'il prononce ces mots, j'ai l'impression que mon cœur se brise en mille morceaux.
Je me tourne et il m'attrape dans ses bras.
Je pose mon visage mouillé dans son cou alors qu'il me répète que tout va bien aller.
« Elle est morte, Edwin. Ma maman est morte. »
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The Prophecy (RÉÉCRITURE)
RomanceUn jour, Charles Baudelaire a dit : "l'amour est une rose Chaque pétale est une illusion Chaque épine est une réalité" Il avait raison. Judy avait 16 ans quand elle a enfin compris le sens de cette citation. "Il n'y a pas de fleur sans pluie" Mo...