Chapitre 35 - Rif, la ville côtière

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Adiel


Gunnar, Gudbrand et Egbert ne tarissaient plus leurs hilarités et je dus avouer que je ne m'étais attendu en aucun cas à une situation aussi cocasse. À Hemel, ce problème ne s'était jamais présenté, mais j'avais sous-estimé les climats que nous allions rencontrer durant notre aventure. Nous n'avions qu'une façon de nous habiller à la cité des hommes et cela semblait désormais me porter défaut, je devais le reconnaître. Cela dit, je le voulais bien si cela me permettait d'entendre le rire de ces trois-là.

— Pauvre petit prince ! La chaleur vous étouffe tant que votre visage luit ! se moqua Egbert.

Je m'éventai de mes mains et ne pus que lui faire une grimace tandis que le navire jetait l'ancre. Des barques, presque à la taille de nos navires hemeliens, furent mises à l'eau et j'y pris place avec les deux frères et le rouquin. Rif était là, juste là ! C'est un immense banc de sable, plus long que le bateau des géants, et d'un blanc crémeux si éclatant ! Toutes les plages étaient-elles ainsi ? J'en doutais. Et l'eau ! Elle était translucide, d'un bleu si ensoleillé que les coraux et la vie maritime m'éblouissaient.

— Vous avez beau mourir de chaud, vous êtes toujours cet enfant émerveillé, s'amusa Gunnar sous les rires de Gudbrand.

Il disait vrai. Mes vêtements couvrants suffisaient au climat tempéré de Hemel, mais pas ici. Il y faisait une chaleur humide qui me faisait suer à grandes gouttes à mon désarroi. Ce n'était pas une sensation appréciable, mais j'étais trop excité pour réellement m'en soucier. L'air avait beau me manquer habillé ainsi, c'était hypnotisant ! Les palmiers de l'île étaient d'une grandeur vertigineuse et ils ombrageaient quelque peu les petites bicoques de bois où les marchands commerçaient.

L'île était populaire. Plusieurs navires s'étaient arrêtés pour y accoster, comme nous. Et je crus voir la surprise sur les traits de chacun en voyant des géants, mais ce ne fut guère le cas. Chacun vaqua à leurs occupations et à leurs achats et échanges, et tous venaient des quatre coins du monde. Lorsque mon pied toucha le sol, je pus voir la richesse des êtres que peuplait Ynrï. Je reconnus les hommes bêtes de Drovar, ville guerrière ; les fées de Ruli, la forêt miraculeuse ; et même des ruvars, originaires de Lemeh, la terre de sable, muni de quatre bras !

— Petit prince, suivez-moi. Avant de vous perdre totalement dans vos admirations.

J'écoutai Egbert, mais mon regard ne décrocha pas de tous ces êtres. Les ailes des fées de Ruli brillaient de mille teintes enchanteresses, comme leurs yeux, et ils se dégageaient d'elles des odeurs qui voguaient sur l'air comme aucune autre. La grandeur des hommes bêtes égalait presque celle des géants et leurs pelages semblaient plus doux encore que la soie ; leurs rires étaient les plus forts de la foule. Le silence et les regards calmes des ruvars trahissaient ce qu'on disait d'eux : désagréable, portant deux cœurs, mais pourtant incapable de ressentir les émotions.

Entrainé par le rouquin, je me laissai faire. Les yeux vagabondant comme des fous à la recherche de plus de beauté, d'émerveillement, d'enchantement !

— Le Roux ! Ça fait longtemps ! Qu'est-ce que tu me ramènes là ?

Rendu curieux par cette voix qui semblait connaître le géant, j'y portais mon attention. C'était une marchande dont la beauté me cloua sur place. Jamais avant je n'avais vu de tels cheveux noirs, plus encore que les nuits les plus sombres. Ses formes voluptueuses rappelaient les lemehiennes et plus encore. Ses yeux brillaient d'un rouge que je n'avais encore jamais vu.

— Esmeralda, je te présente le petit prince de...

— Oh bon sang ! Adiel ! Tu as ramené Adiel de la cité des hommes ici !

BJÖRSARION - LA TERRE DES GÉANTS (BL)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant