BJÖRSARION - LA TERRE DES GÉANTS (BL)

Chapitre 15 - L'Einherjar des géants

Adiel

— Amma est, après moi, la personne la plus importante de Björsarion. Bien sûr, avec votre présence, vous passerez avant elle, mais elle garde une place essentielle.

Je cessai de caresser Sanjarna sous les mots de l'Einherjar. L'amour que j'entendais dans sa voix lorsqu'il parlait de son Amma, de l'Amma de tous les géants en vérité. J'avais déjà eu l'honneur de l'entendre parler d'elle lorsqu'il m'avait offert tous les présents. C'était elle qui avait tissé mon manteau. Elle avait aussi été celle qui avait soigné Egbert et Noortje lorsque ces deux-là s'étaient fait toucher par les minis canon des pirates. Elle semblait être incroyablement talentueuse dans bien des domaines !

— Quel est le rôle de votre Amma ? Elle est l'aïeul de votre terre, mais qu'est-ce que cela implique ?

— Elle est la plus sage d'entre nous. Elle vit depuis plus longtemps que n'importe qui et a acquis du vécu et de la sagesse. Son rôle est de soigner et de conseiller, à sa façon. Elle est l'épaule sur qui nous nous reposons, même moi.

— Votre voix déborde d'amour, m'amusai-je.

Il gloussa, dévoilant les creux de ses joues, et il se pencha vers moi. Vindr, sa monture, se rapprocha de la mienne, mais Sanjarna le fit reculer d'un mouvement de tête brusque. Repensant à ce qu'avait dit l'Einherjar lorsque Vindr s'était montré nerveux à l'idée que je le monte, je réitérai l'action, espérant bien prononcer la chose à mon tour. Je ne tenais pas à déformer la langue native et magnifique des géants. Les hommes n'avaient qu'une langue, la langue universelle d'Ynrï, et nous étions l'un des rares peuples à ne pas avoir de jargon natif.

— Linr Sanjarna.

Sous mes mots, le rire du chef des géants se tut et je relevai la tête vers lui après une caresse pour ma monture. Avais-je mal prononcé la chose ? Son immense main couvrait son visage et un bruit de gorge primitif lui échappa. Je me tendis, soudain, terriblement désolé d'avoir pu l'offenser. Je serrai la corde de mon cheval entre mes mains, tentant de réprimer mon angoisse, et je pinçai les lèvres. Que pouvais-je dire pour me rattraper et...

— Vous mettez mes nerfs à rude épreuve, elska.

Il avait parlé la mâchoire serrée. Son ton était brutal et étrangement contenu, mais ce surnom tendre qu'il m'avait donné... était-il en colère ou ne l'était-il pas ? Je m'inclinai légèrement vers lui.

— Vous entendre parler l'idiome des géants... c'est si plaisant. Il faut que vous passiez du temps avec les géants. Il faut qu'ils comprennent pourquoi vous me rendez si fébrile.

— Alors, je l'ai bien prononcé ? me rassurai-je.

— Terriblement, elska.

Sa main retomba sur la robe de Vindr et un sourire un peu tendu m'apparut.

— C'est délicieux de vous entendre parler ainsi. Mon corps pulse de désir bestial à son entente.

Brusquement, une chaleur étouffante gagna mon être et je me redressai sous son rire, sincère cette fois. L'Einherjar n'avait aucune gêne en ce qui concernait son désir et tout ce qui s'y rapprochait. J'en étais d'ailleurs toujours surpris, car cela était loin de la bienséance des hemeliens. Cela me plaisait. Je parvenais à rougir sans cesse, mais cela était particulièrement à mon goût d'expérimenter tout cela. Je me rapprochai des géants ainsi, et de l'Einherjar !

— Enfin, pour en revenir à Amma, oui, j'ai beaucoup d'amour pour elle. Et vous l'aimerez aussi, autant qu'elle vous aimera. Mais vous serez plus important qu'elle. Savez-vous pourquoi ?