Chapitre 7 - Le premier tumulte

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Adiel


Si quelqu'un nous surprenait dans cette situation, les répercussions auraient pu être des plus terribles ! Cependant, je me languissais depuis la nuit dernière de ses lèvres. Lui ne pouvait pas voir mon regard, mais ce dernier demeurait accroché à sa bouche à chacune des paroles dites, à chaque silence. Le voile était ô combien frustrant, car je savais que son souffle ardent était prisonnier du tissu coûteux et peiné ainsi à m'atteindre. Je ne pouvais qu'en sentir les prémices.

Il en était de même pour les vêtements que je portais. Ils bloquaient sa chaleur ! Seule ma main dénudée parvenait à explorer son corps puissant dont les muscles ciselés glissaient sous ma paume. Il tenait sa parole. Ses mains demeuraient résolument dans son dos. Je liai mes doigts aux siens. L'envie qu'il vienne caresser mon corps me rongeait, mais nous devions être raisonnables. Ou tout du moins, l'être plus que nous ne l'étions en ce moment.

L'humidité de sa langue toucha une énième fois la mienne et je gémis, sans parvenir à me contrôler. Gêné, je me reculai, m'étant fin à notre baiser. Mon cœur battait à tout rompre et mon être tremblait, mais malgré le regret qui assaillait mon esprit, rien ne parvenait à ternir ma joie. L'Einherjar et moi, nous nous désirions. Il m'écoutait et s'était même confié à moi sur les jusquiames noires, ces fleurs que son peuple avait longuement convoitées. Je lui avais offert ces dernières, mais il avait refusé.

Mon frère Ingvar avait tort. Les géants ne cherchaient pas à nous trahir, à nous dérober nos trésors. L'Einherjar était sincère dans ses intentions de créer une paix durable entre hommes et géants ; entre les enfants de la Terre.

— Nous devrions attendre un peu ici. Votre voile est humide.

Mes joues chauffèrent brusquement et je sus que je devais furieusement rougir. Je hochai vigoureusement la tête et il se redressa, éclatant dans un rire joyeux. Il prit une profonde inspiration qui gonfla sa large poitrine et j'en fus envoûté. Son corps était un salut aux puissances. Oui, les géants ne pouvaient qu'être les dignes protecteurs de la terre et l'Einherjar en était le plus fort d'entre eux ; plus solide qu'une montagne.

Et puis comment pouvais-je ne pas l'admirer ? Son charme n'avait rien d'hemelien. C'était une splendeur d'une autre terre. Grand-père avait conté à ma mère combien les hivers des géants étaient beaux. Je me souvenais encore de la façon dont elle me l'avait raconté par la suite. Elle disait que la glace était solide même sous le plus puissant rayon du soleil et que sa pureté que le ciel reflétait la peignait d'un bleu céleste inégalable. Je pouvais imaginer sans mal ce bleu, car je l'avais face à moi.

Les yeux de l'Einherjar étaient tels les lacs gelés que grand-père avait visité pour signer l'acte de cesser le feu.

Et les pâleurs des cheveux du chef des géants étaient aussi uniques. Le blond hemelien que portaient la plupart des membres du peuple était aussi doré que le blé prêt à la moisson, mais le sien était presque blanc. Je trouvais également étrange que ses cheveux fussent coupés si court. Son crâne était le seul à être rasé parmi les géants.

— Einherjar, y a-t-il une raison pour laquelle vos cheveux soient coupés si court ?

Il sembla agréablement surpris par ma question. Il gratta sa barbe, elle aussi coupé au ras. Ma main me picota à ce geste, car elle se souvenait du délice de cette sensation ; de ce que cela faisait de glisser ma main sur sa joue.

— Les chefs sont régis par des règles différentes. Parmi elles, avoir les cheveux courts est un signe de puissance. On dit que Heimr, la puissance de la terre, était coiffé ainsi.

BJÖRSARION - LA TERRE DES GÉANTS (BL)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant