Chapitre 43

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Pendant ce temps...

Guardia Nacional, Mexico.  21h45.

-VA AU DIABLE, MERCEDES CASTELLANI !

Ce hurlement parvint à réveiller Elijah qui avait enfin finit par trouver répit sur ce lit austère. Il reconnut la voix d'Abela Martí, il n'y avait qu'elle pour gueuler ainsi de cette façon. Le temps lui parut immensément long dans cette cellule délabrée avec la moisissure qui commençait à se nicher dans les recoins de la pièce.

Il a été directement transféré à Mexico en avion dès son arrestation pour éviter toute tentative d'évasion, du moins...c'est ce qu'Abela a réussi à faire croire. Alors, il se demanda pourquoi il y avait soudainement un tel vacarme dans les couloirs du bâtiment alors que le calme était maître des lieux, quelques heures auparavant.

-Réunion d'urgence. Immédiatement !

Il fronça les sourcils. Les pas étaient semblables à un troupeau d'éléphants se déplaçant tant il y avait du grabuge.

-La seule façon d'arrêter la folie meurtrière de Castellani est de le libérer, entendit-il. L'heure n'est plus aux négociations, ça ne l'a jamais été de toute façon !

Ceci attira l'attention d'Elie qui se leva aussitôt, le corps en souffrance à cause du lit sur lequel il était. Debout devant les barrières, il tenta de comprendre ce qui était dit à la télé sans grand succès, à cause de la distance par rapport à sa cellule. Néanmoins, son estomac se noua lorsqu'il vit les images diffusées sur le grand écran, des images dignes d'un film apocalyptique.

-Mercedes Castellani est devenu fou ! s'écria un agent. J'espère que la réunion d'urgence qui se tient en ce moment permettra de trouver une solution rapidement car on ne peut pas laisser nos collègues combattre tout seul.

Effaré, Elijah ne put s'empêcher d'écarquiller les yeux. C'est Mercedes qui est derrière tout ça ? Des commerces brulés, des cadavres partout, un quartier désert, etc. C'est un massacre général qu'il aperçut. Jamais, il aurait cru que son ami serait prêt à tout pour le libérer.

Cette pensée accentua une sensation de douleur aimante au plus profond de son être. Ses amis ne l'avaient pas laissé tomber. Bien que ça soit Mercedes qui soit mis en avant en ce moment à cause de ses mesures extrêmes, il savait que les autres travaillaient dans l'ombre pour contribuer à sa sortie. Tout espoir de voir la lumière du jour lui avait quitté lorsqu'il a mis ses pieds dans cette cellule.

Et d'un autre côté, il n'arrive pas à être pleinement heureux. Certes, c'était pour lui que Mercedes faisait ça mais intérieurement...il savait que c'était le début de la fin pour lui. Son nouveau psychologue, Berny Cholson les avait mis en garde : Mercedes commençait à dévier vers une sortie de folie qui ne pourra pas être évitée, c'était dans l'ordre naturel des choses.

C'est pour cette raison qu'Azarel a au moins essayé de lui apprendre ce que c'est d'avoir des émotions et même si cela semble avoir un peu fonctionné puisqu'il reconnaît ses torts, il faut se rendre à l'évidence : Mercedes est un sociopathe, il ne pourra jamais être comme une personne neurotypique. Et encore, Berny le soupçonne d'avoir des traits de la psychopathie.

C'est certain qu'on peut faire tout ce qu'on veut, lui apprendre que manipuler les autres à sa guise peut s'avérer dangereux ou encore que pleurer est une chose naturelle, sa nature le reprendra le dessus. Et les images de ce soir l'ont démontré. Il commence à perdre le sens de la réalité avec des crises qui lui feront perdre le contrôle sur sa propre vie.

« Et s'il a fait un tel carnage, ça veut dire que les autres ne sont pas parvenus à l'arrêter », pensa-t-il.

De son côté, la cheffe des lieux se surprit à être terrifiée. Elle a été à la tête des arrestations des plus grands narcos du Mexique et jamais, elle s'était étiolée mais aujourd'hui, le désespoir la submergea face à la folie de Castellani. Elle n'aurait pas cru qu'il serait prêt à...faire tout ça pour mettre la pression sur les institutions judiciaires.

-Nous devons trouver une solution avant demain, jefe. Tijuana ne peut pas continuer à sombrer dans une telle violence.

La voix de son conseiller l'agaça plus qu'autre chose. Mais elle ne le montra. Sa tête était toujours posée entre ses mains. Elle semblait avoir abdiqué.

-Quel est le bilan provisoire actuel ? parvient-elle à demander.

-Nous dénombrons une soixantaine de morts et plusieurs blessés dans les bombardements.

-Nous avons un chiffre exact sur les morts ?

-Le bilan était à 68 morts, il y a une heure. Et comme je l'ai dit...ces chiffres datent d'une heure.

Elle leva la tête pour essayer de se donner du courage. Elle n'avait le droit de flancher dans cette situation, le moment n'était pas propice à ça. En même temps, c'est un peu elle qui a provoqué cette situation en allant provoquer Mercedes.

-Accélérer l'extradition de Ventura risque d'envenimer la situation, déclare Quispe Rojas, le commissaire général. Les hommes de Castellani ont bloqué les aéroports, les civils sont retenus en captivité et aucun avion ne peut décoller. Connaissant très bien le personnage, Mercedes n'hésitera pas à tout faire sauter si Elijah quitte le Mexique.

-Et même si nous parvenons à l'extrader, où l'emmèneront-ont ? Aux États-Unis, la eMe a également pas mal de territoires. En Europe ? Ezio Herrera, Kace O'Higgins, Khaïs Carreras et Arseniy Kirsanov s'y trouvent, ils empêcheront le bon déroulement des opérations. En Afrique ? Mercedes Castellani s'est lié d'amitié avec pas mal de gangs sévissant sur le territoire. En Amérique du Sud ? Aelan Olivares, Milton Rivadeneira et Thamillan de Rosario sortiront de leurs grottes pour nous mettre des bâtons dans les roues. L'envoyer en Asie ? C'est sans compter sur Karayan Meliksetyan. La eMe a des alliés partout.

Tout le monde dans la pièce semblait bluffé face à cette géopolitique mafieuse énorme. Peu importe où on enverrait Elijah Ventura, des problèmes surgiront compte tenu de la vastitude des alliances dans les différentes régions du monde. Et pas beaucoup de monde ont envie de provoquer toutes les autres organisations en ce moment, certaines ont l'air d'être dans une période "d'hibernation" mais elles restent quand même actives dans l'ombre.

Une seule solution apparaît sur la table. Une solution que se refuse d'admettre Abela Martí. Pour elle, il est hors de question de relâcher un dangereux criminel comme Elijah Ventura. Enfin...ça, c'était il y a une heure.

-Essayer d'entamer toute tentative de négociation se solderait par un échec, déclara Quispe Rojas. Soit on libère son ami et ce massacre cesse, soit on retient Elijah malgré tout et Mercedes annihile tout. Ce sont les deux solutions qui s'offrent à nous.

La porte s'ouvrit dans un grand fracas sur l'un des gardes. Celui-ci ressemblait plus à un mort-vivant qu'à autre chose. Une partie de son visage était arrachée et l'autre moitié ressemblait à des pages d'un livre calcinées.

-A...A....A...

Il s'effondra sans avoir terminé sa phrase. Dehors, les premiers coups de feu commencèrent à retentir. La situation avait empiré en une fraction de seconde, tout était calme il y avait encore quelques minutes et maintenant le pressentiment d'Abela lui disait qu'elle devrait se préparer au pire. Elle n'eut pas le temps de terminer sa réflexion lorsqu'une figure familière fit son apparition dans la pièce, le visage embelli par quelques gouttes de sang et une cigarette entre les lèvres

La pièce était devenue étroite face à ce géant qui dévisagea tout le monde d'un air arrogant. Abela Martí déglutit. Azarel Contreras se tenait devant elle, la surplombant de plusieurs têtes, le visage impassible et le regard assassin.

-Echec et mat, Abela, déclara-t-il avec un sourire faussement joyeux.

𝐓𝐈𝐌𝐄𝐋𝐈𝐍𝐄.𝐓𝟐.𝟓Où les histoires vivent. Découvrez maintenant