L'amie de mon ami

EPILOGUE

— Non mais en vrai vous le trouvez comment ? Il est pas mal quand même ! 

Le téléphone de Nina entre mes mains, je passe d'une photo à l'autre pour analyser le physique de sa conquête du moment. Il a l'air plutôt grand, carré d'épaule, mais ses cheveux gras et en bataille donnent l'impression qu'il ne s'est pas lavé depuis quelques mois. Je saisis l'attrait un peu primitif que mon amie y trouve, sans réussir à le partager. 

Appuyée dans mon dos, les mains autour de ma taille, la tête posée sur mon épaule, Justine fixe l'écran en lâchant régulièrement des onomatopées qui attestent qu'elle n'est que partiellement convaincue. Sur l'une des images, où on voit le garçon torse-nu à la plage, je la sens qui se penche un peu plus pour mieux voir. Je profite du spectacle de ses abdos une poignée de secondes avant de me tourner vers ma partenaire qui a l'air soudainement très intéressée :

— Je te dérange pas ? Ça va ? 

— Non mais il a certain... on sent qu'il a une très belle personnalité. 

Je lève les yeux au ciel et Justine fait semblant de ne pas voir ce qui me pose problème avant de me rejoindre dans mon hilarité. Assise en tailleur en face de nous sur mon lit, Nina nous observe avec un mélange d'amusement et d'épuisement. 

— Bon donc on est d'accord qu'il est sexy, vous admettez. 

— Sans t-shirt ça passe. Mais faut couper le visage quoi. 

— Arrêtez il est beau ! 

— Il a l'air de puer. 

— Ouaip grave ! approuve Justine. Mais pas comme un geek qui se douche pas. Plutôt comme un soldat du moyen-âge. Genre une odeur de guerrier, un mélange de sang et de transpi. 

— Plus tu parles de lui comme ça et plus je m'inquiètes par contre. 

— Quand tu reviens d'un cours de gym sans t'être lavée ça fait à peu près le même effet en vrai, sois pas jalouse. 

— J'arrive pas à savoir si c'est un compliment ou une insulte. 

Elle hausse les sourcils pour m'inviter à deviner la bonne réponse par moi-même. Ma fausse agressivité se mue rapidement en un baiser que je dépose sur ses lèvres. Le fait qu'elle soit assise dans mon dos rend la position difficilement tenable et après deux secondes où nos cous se tordent, on abandonne notre numéro de contorsionnistes passionnées. Nina soupire en commentant : 

— Le contrat c'était que vous arrêtiez de vous donner en spectacle sinon j'arrête de venir quand vous êtes toutes les deux. 

— Tu disais rien quand Théo faisait pareil ! proteste Justine. 

— Parce que j'en avais rien à foutre de Théo, et je pouvais me foutre de votre gueule avec Charlotte. Maintenant que je me retrouve seule contre deux c'est chiant. 

— T'as qu'à inviter ton guerrier grec !

— Pas dans ma chambre par contre ! je riposte. Après ça va empester je vais devoir brûler les meubles. 

— Non mais il pue pas ! Vous avez juste fini par tellement vous habituer à sortir avec quelqu'un qui s'épile que vous savez plus savourer la virilité à l'ancienne. 

— Non mais y'a "à l'ancienne" style chic des années 60 et "à l'ancienne" en mode homme de Cro Magnon. T'as vérifié qu'il savait lire au moins ? 

Nina émet un soufflement agacé avant de récupérer son téléphone. Les bras de Justine continuent de serrer sa taille tandis qu'elle s'appuie sur moi. Je sens sa poitrine collée dans mon dos et sa joue qui s'appuie contre la mienne. Je pose mes mains sur les siennes pour sentir la douceur de sa peau.