Jalousie

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Jeni’er avait essayé d’oublier. Elle avait jeté son énergie dans son travail, dans ses nouvelles rencontres, mais rien ne semblait suffisant. La clé USB posée sur la table basse était un rappel constant de ce qu’elle fuyait : Da Shu et tout ce qu’il représentait.

Elle avait passé des heures à contempler les fichiers, les révélations troubles de son empire. Une partie d’elle était fascinée, mais l’autre, plus pragmatique, savait qu’elle devait tourner la page.

Lorsque Li Wei l’appela ce matin-là pour l’inviter à dîner, elle accepta sans hésiter. Peut-être que ce soir marquerait un nouveau départ.

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Le restaurant était un joyau caché dans les rues animées de Pékin. L’atmosphère était intime, presque romantique. Les murs, d’un rouge profond, étaient ornés de lanternes en soie suspendues au plafond. Des bougies disposées sur chaque table projetaient une lumière douce, créant un jeu d’ombres et de lumières.

Li Wei était parfait. Poli, charmant, et attentif. Il parlait avec passion de son dernier projet, et Jeni’er s’efforçait de suivre la conversation, mais son esprit vagabondait.

Elle se demandait si elle parviendrait un jour à effacer les traces de Da Shu.

Alors qu’elle portait son verre de vin à ses lèvres, elle sentit soudain une présence. Comme un instinct. Elle leva les yeux et le vit.

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Da Shu.i

Il se tenait à l’entrée, son costume sombre taillé à la perfection, ses traits fermés. Son regard balaya la salle jusqu’à ce qu’il tombe sur elle. À cet instant, le temps sembla se figer.

Son expression passa de la surprise à quelque chose de plus intense, presque possessif. Jeni’er détourna les yeux, priant pour qu’il ne fasse rien. Mais elle savait que ce n’était pas son style.

Quelques instants plus tard, il se tenait devant leur table.

« Jeni’er, » dit-il d’une voix basse mais ferme.

Elle sentit sa colère monter immédiatement.

« Da Shu, pas maintenant, » répondit-elle froidement, espérant qu’il comprendrait le message.

Li Wei, surpris, regarda l’homme qui se tenait devant eux.

« Bonsoir, monsieur, » dit-il poliment. « Puis-je vous aider ? »

Da Shu ignora totalement Li Wei, son attention entièrement fixée sur Jeni’er.

« Nous devons parler, » dit-il, sa voix trahissant une tension qu’il tentait de contrôler.

Jeni’er serra les dents.

« Ce n’est ni le moment ni l’endroit. »

Mais au lieu de reculer, il fit un pas en avant et tendit la main, attrapant doucement la sienne.

« Jeni’er, viens avec moi. Juste un instant. »

Elle sentit une chaleur familière dans son toucher, mais cela ne fit qu’alimenter sa colère. Elle retira sa main brusquement.

« Non. Tu n’as pas le droit de faire ça, Da Shu. Pas ici, pas maintenant. »

Mais il ne semblait pas prêt à abandonner.

« Ce n’est pas une demande, » murmura-t-il, baissant légèrement la voix pour ne pas attirer l’attention.

Li Wei se redressa, prêt à intervenir, mais avant qu’il ne puisse dire quoi que ce soit, Da Shu saisit à nouveau la main de Jeni’er, cette fois avec plus de fermeté.

« Viens. »

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Ils se retrouvèrent à l’extérieur, sous les lampadaires qui projetaient une lumière dorée sur la rue pavée. Jeni’er, furieuse, arracha sa main de son emprise et se tourna vers lui, ses yeux lançant des éclairs.

« Tu es complètement malade ! » s’exclama-t-elle. « Tu te rends compte de ce que tu viens de faire ? Tu n’as aucun respect pour ma vie, pour mes choix ! »

Da Shu resta immobile, son visage sombre, mais il ne répondit pas immédiatement.

« Jeni’er, écoute-moi… » commença-t-il, mais elle ne lui laissa pas le temps de finir.

La gifle partit avant qu’elle ne puisse s’en empêcher. Le claquement résonna dans l’air, et pour la première fois, elle vit Da Shu perdre contenance.

Il porta une main à sa joue, abasourdi, mais au lieu de se mettre en colère, il baissa les yeux, comme s’il acceptait son acte.

« Je le mérite, » murmura-t-il.

Ces mots la déstabilisèrent.

« Tu mérites bien plus que ça, » répliqua-t-elle, la voix tremblante. « Pourquoi ne peux-tu pas me laisser tranquille ? Pourquoi ? »

Da Shu leva les yeux vers elle, et cette fois, elle vit quelque chose qu’elle n’avait jamais vu auparavant : une vulnérabilité brute, presque douloureuse.

« Parce que je ne peux pas, » dit-il. « Je n’arrive pas à te sortir de ma tête. Tu es partout, Jeni’er. »

Elle secoua la tête, frustrée, et recula d’un pas.

« Tu ne peux pas faire ça. Tu ne peux pas apparaître quand ça te chante, bouleverser ma vie, et espérer que je te pardonne. »

Il passa une main dans ses cheveux, un geste rare chez lui, qui montrait son agitation.

« Je suis désolé, » dit-il enfin, sa voix presque brisée. « Je n’aurais pas dû te déranger ce soir. Je n’aurais pas dû… »

Il fit un pas en arrière, levant les mains comme pour se rendre.

« Mais sache une chose, Jeni’er. Peu importe combien de fois tu me repousses, je serai toujours là. Parce que je t’aime. »

Ces mots tombèrent comme une bombe.

Elle le fixa, déchirée entre la colère et quelque chose de plus profond, de plus enfoui.

« Ce n’est pas suffisant, Da Shu, » murmura-t-elle.

Il hocha lentement la tête, comme s’il acceptait sa sentence.

« Je sais. Mais je voulais que tu le saches. »

Il tourna les talons et s’éloigna dans la nuit, la laissant seule avec ses pensées et son cœur qui battait à tout rompre.

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Jeni’er resta immobile quelques instants, tentant de reprendre son souffle. Lorsqu’elle retourna dans le restaurant, Li Wei l’attendait, visiblement contrarié.

« Tout va bien ? » demanda-t-il.

Elle hocha la tête, mais son esprit était ailleurs. Elle savait que, malgré ses efforts, Da Shu n’avait pas fini de hanter ses pensées.

Et une partie d’elle n’était pas sûre de vouloir qu’il s’arrête.

Mon oncle et moi ( da shu)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant