Chapitre 17

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  Les paroles de la psychologue résonnèrent longtemps dans mon esprit. Je n'avais pas écouté un seul mot de ce qu'elle avait dit après, me contentant d'acquiescer. Je voulais juste être seule. Elle partit, comprenant peut-être que ses mots ne me parvenaient plus. Je fus seule pendant cinq minutes.

Une dépression. Comment avais-je pu en arriver là ? J'avais toujours vu la dépression comme quelque chose dont on ne sortait jamais, quelque chose qui nous mangeait de l'intérieur et qui ne voulait pas nous libérer de son emprise. Maintenant que je le savais, je me demandais ce que je pouvais faire. Est-ce que ma seule volonté parviendrait à me sortir de cette prison ? Je voulais me convaincre que oui, mais après cette pensée, toutes les choses douloureuses que j'avais vécues me revinrent à l'esprit. Mes parents, mon frère, ma solitude, mon échec scolaire, ma dispute avec M... Comment pouvais-je penser qu'un jour je pourrais être heureuse si j'avais constamment mal, tous les jours, non stop ? Cela me semblait affreusement impossible... La réalité m'éclata alors à la figure et je compris soudainement mon envie de suicide. Bien sûr que cela me semblait impossible de sortir de cet état de souffrance constante, j'avais essayé d'y mettre fin. Je me souvins m'être convaincue que je ne souffrirai plus en étant morte et que, peut-être, j'aurais pu retrouver mes parents qui m'auraient apporté leur amour qui me manquait tant. Cette solution avait paru si facile, si accessible... Et pourtant M m'en avait empêché. Sur le moment, je me mis à le détester. Pourquoi m'avait-il privé de ma seule sortie de secours ? De ma seule accession au bonheur ? Et puis, je me dis que j'avais été incroyablement soulagée de le voir, de le sentir contre moi et de me sentir vivante.

La porte s'ouvrit, coupant court à mes réflexions et je vis entrer celui qui m'avait sauvé. Il s'approcha doucement, ses yeux verts imprégnés d'inquiétude.

« Elle te l'a dit ? demandai-je froidement.

-Oui... murmura-t-il. »

Il s'assit prés de moi et me prit la main. Je ne savais pas quoi penser. Devais-je le laisser définitivement entrer dans ma vie, risquant le fait de souffrir à nouveau ? Ou devais-je le repousser, nous protégeant l'un et l'autre ?

« Écoute B, je voulais m'excuser pour tout le mal que j'ai pu te faire... Je t'ai dis des choses atroces pendant notre dispute et je ne pourrai jamais me le pardonner. »

Il se sentait coupable. Cela me fit bizarrement du bien. Paradoxalement, sa souffrance, sa peine, sa culpabilité, me firent sentir vraiment bien. Comme l'avait dit la psychologue, je devais faire attention à cette précieuse relation. Je commençais à être convaincue du fait qu'il pouvait me rendre heureuse, et savoir qu'il souffrait par rapport à moi, à ce qui m'était arrivé, montrait qu'il tenait à moi.

« Moi je te pardonne. »

Il me sourit et s'approcha un peu plus de moi. Ses yeux émeraudes avaient retrouvé leur éclat de malice et de charme et j'avais l'impression que c'était des pierres précieuses qui n'appartenaient qu'à moi. Je déposai ma main sur sa joue pour caresser sa peau à l'endroit où sa barbe naissait. Il ferma doucement les yeux et les traits de son front se détendirent. Nous restâmes plusieurs minutes ainsi, à apprécier la proximité de l'autre. Puis, M rouvrit les yeux et me fixa. Son regard était imperceptible et j'eus soudainement peur qu'il remette son masque insensible et qu'il s'éloigne de moi encore une fois.

« Je vais rester avec toi tout le temps que tu guérisses, B. Je ne te laisserai pas tomber, je te le promets. »

Son regard était en fait déterminé et il n'avait en aucun cas remis son masque insensible. J'espérais vraiment ne plus revoir cette facette de lui et je me mis en tête de l'aider à s'ouvrir beaucoup plus. De cette façon, nous nous aiderions mutuellement et j'étais sûre qu'être enfermé dans ce personnage charmeur et insensible devait être épuisant pour lui.

Amour anonyme - EN RÉÉCRITURE (coming soon)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant