Le père de Matt se battu pour vivre le plus longtemps possible. Pourtant, au bout de deux mois, ses poumons lâchèrent.
Matt avait alors passé plusieurs jours enfermé dans son appartement, loin de sa mère et de son frère. J'avais essayé de faire le lien entre eux, expliquant à sa famille qu'il souffrait énormément et que c'était sa façon de faire son deuil. Je le comprenais parfaitement, puisque que c'était ce que j'avais fait après la mort de mes parents. M'enfermer, me replier sur moi-même, m'en vouloir. Je savais que Matt se sentait coupable. Il ne s'était jamais entendu avec son père, pourtant il l'aimait. Il n'avait eu que deux mois pour rattraper toute une vie d'amour paternel.
Hugo, lui, passait énormément de temps avec sa mère. Aussi malheureux que cela puisse paraître, cette dernière s'était adoucie avec la mort de son mari et elle m'accueillait à bras ouverts chez elle. Pour eux, j'étais la seule qui pouvait comprendre leur douleur.
Mais j'avais toujours ma propre douleur à gérer. Julien, toujours dans le coma, ne semblait pas s'améliorer. Son cerveau était toujours endormi, tuant Alice à petit feu.
Le jour de l'enterrement du père de Matt, j'aidai ce dernier à se préparer. Tel un enfant endormi, il ne bougeait pas pendant que je lui enfilai sa veste. Les cernes creusaient le dessous de ses yeux, accentuant la lueur macabre de ses émeraudes.
« Matt, je sais ce que tu ressens. Mais il faut que tu fasses un petit effort. »
Il ne sembla pas m'entendre. Ce jour-là était particulièrement dur pour lui et je ne devais pas le forcer à s'exprimer. Je savais qu'il irait mieux le lendemain. Je devais faire preuve de patience, comme il l'avait fait avec moi.
L'enterrement fut long et fastidieux. Beaucoup d'associés du père de Matt étaient présents et je savais que ça le dérangeait. Je voyais son poing serré, ses ongles qui s'enfonçaient certainement dans la chair de sa paume. Je voyais sa mâchoire contractée, ses muscles tendus.
Alors que la cérémonie se terminait, je sentis mon téléphone vibrer dans ma poche. Regardant rapidement qui m'appelait, je vis que c'était Alice. Mon cœur rata un battement. Alice savait que j'étais à l'enterrement du père de Matt et que j'allais venir à l'hôpital directement après. Si elle m'appelait, c'est qu'il y avait un problème avec Julien. Je priai alors pour qu'elle ne m'annonce pas sa mort. Je m'y étais préparée pendant tous ces mois, le médecin n'étant pas très optimiste. Pourtant, je n'avais pas encore réalisé ce que cela signifiait. Je ne pouvais pas perdre le dernier membre de ma famille.
M'écartant de Matt qui me lança un regard interrogateur, je me dirigeai vers la route. Pendant que je marchais, je décrohai.
« Emma ? s'exclama Alice. »
Sa voix ne trahit que son impatience, rien d'autre.
« Oui ? Qu'est-ce qu'il se passe ? Il y a un problème avec Julien ? »
Je voulais qu'elle crache le morceau. Je n'en pouvais plus de toute cette attente, de ce suspense. Mon esprit avait besoin d'entendre les mots.
« Non ! Emma, il faut que tu viennes tout de suite. Il s'est réveillé. »
Un tourbillon de joie parcourut mon corps. Pourtant, deux larmes dévalèrent mes joues. Je me retournai lentement vers le lieu de l'enterrement. Matt faisait dos à tout le monde et me fixait, inquiet. Quand il vit que je pleurais, il s'avança pour me rejoindre. Avant que je ne puisse lui faire signe, il était devant moi. Ses yeux fatigués et tristes reflétaient son inquiétude pour moi.
« Julien s'est réveillé, sanglotai-je. »
Des larmes de joie et de culpabilité coulaient le long de mes joues. J'étais incroyablement soulagée de savoir que mon frère allait vivre. Pourtant, apprendre la nouvelle pendant l'enterrement du père de Matt, être heureuse à ce moment-là, me semblait mal. Même si j'attendais ça depuis des mois, le réveil de Julien tombait mal. Un bonheur en plein malheur.
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Amour anonyme - EN RÉÉCRITURE (coming soon)
RomansaEmma ne vit plus, elle survit. Chaque jour est un combat psychologique pour cette jeune femme orpheline. Lui croque la vie à pleine dents. Joueur et provocateur, il profite de son adolescence. Ces deux opposés ont pourtant une même passion qui ryt...