4.

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Je passai mon samedi à déblayer la cour devant la maison. Je finis avec un tas de mauvaises herbes assez incroyable. Je ne savais absolument pas quoi en faire. Je ne pouvais pas juste les brûler. J'ignorais comment me débarrasser de tout ça. Il faudrait que je demande à Lila si elle connaissait un moyen.

Le dimanche, je pris mon vélo pour aller faire quelques courses en ville. En arrivant devant la bifurcation que Lila avait pris pour aller vers St John's, je me décidai à tenter de refaire le chemin. Je me souvenais à peu près des intersections qu'elle avait emprunté. Et comme je commençais le lendemain, mieux valait que je sache gagner mon lieu de travail sans me perdre.

La route me parut très longue. Peut-être trop pour que je la fasse tous les jours à vélo. Toutefois, je n'avais pas d'autre moyen de transport. Je devrais faire avec. Je ne pourrais pas traînasser sur le chemin, c'était certain. J'aurais intérêt à pédaler. C'était un point moins agréable.

Je fus presque sûre de me perdre à un moment mais, par miracle, j'arrivai devant l'immense grille de St John's. Je fus surprise d'avoir réussi à retrouver le chemin. Pendant un moment, j'avais eu l'impression d'être totalement perdue. Je n'avais rien reconnu de ce qui m'entourait.

Malgré tout, j'étais arrivée au but. J'étais plutôt fière de moi. Peut-être mon sens de l'orientation était-il meilleur que je le pensais. Je songeais malgré tout que je tenais mon arrivée plus à la chance qu'à lui.

Je considérai l'endroit un long moment. J'allais travailler là-dedans. Une haute bâtisse en forme de L sur trois étages avec, sûrement, un grenier ou des combles. Des ouvriers s'activaient au rez-de-chaussée d'une des deux ailes. Les travaux semblaient loin d'être terminés, contrairement à ce que j'avais songé.

Le vent souffla violemment, tourbillonnant autour de moi. Je resserrai mon manteau pour conserver ma chaleur et je repris ma route. Il était plus que temps que j'aille en courses. Un malaise grandissant se nicha dans le fond de mon estomac, me poussant à partir au plus vite.

Je tentai de me repérer un peu mieux que lorsque j'étais venue avec Lila. Ce qui ne fut pas très utile puisque, globalement, il n'y avait que des arbres le long du chemin. Il fallait juste que je me rappelle des intersections à prendre et je n'avais absolument rien pour me donner un indice.

Nonobstant, je fus capable d'aller en ville depuis l'école. Grâce à la chance ou à mon sens de l'orientation ? Bonne question. Ou mon cerveau avait retenu le chemin malgré moi, sans que je m'en rende compte. C'était une possibilité aussi.

En ville, je croisai Mona, accompagnée de deux jeunes enfants qui lui ressemblaient beaucoup. Elle me fit un grand sourire et un signe de la main en me croisant.

Ce fut un sentiment étrange que d'être reconnue dans la rue par quelqu'un. Durant tout le temps où j'avais vécu en ville, ça ne m'était jamais arrivé. Les rues bondées ne permettaient pas vraiment de croiser des visages connus.

Ici, je commençais déjà à prendre mes marques. Je savais où aller pour avoir ce que je voulais, le restaurant du centre-ville connaissait mes préférences, la serveuse me faisait signe dans la rue...

Ce n'était que des petites choses pour eux mais pour moi, c'était énorme. Pour la première fois, j'avais l'impression d'appartenir à une communauté. J'avais beau ne pas être arrivée depuis longtemps, ces petits faits me touchaient et m'apportaient un fort sentiment d'appartenance.

La maraîchère me salua par mon prénom et j'en fus ravie. Comme la première fois, elle m'offrit quelques pommes en plus et j'en croquai une en gagnant l'épicerie. Ses pommes étaient toujours juteuses et sucrées juste ce qu'il fallait.

Le Secret de St John'sOù les histoires vivent. Découvrez maintenant