Le lundi, ce fut le retour à St John's. Je n'avais toujours pas trouvé d'autre moyen de locomotion que mon vélo aussi partis-je aux aurores pour pouvoir avoir le temps de faire la route. Y compris l'arrêt obligé pour éviter de me faire percuter par Arnold, l'éternel en-retard de Bloomingdale.
Je croisai Carter sur la route. Il ralentit et baissa la fenêtre une fois à mon niveau.
- Tu veux monter ? me demanda-t-il avec un sourire. Il fait glacial.
J'acceptai. J'étais fatiguée et mon corps n'avait pas encore recouvré ses forces après ce week-end de faiblesse. Qu'il propose de terminer le trajet avec lui était plus que bienvenu. Je me sentais mieux mais pas au point de refuser de monter avec lui.
Il se gara un peu plus loin et m'aida à mettre mon vélo dans son coffre. J'allai me blottir sur le siège passager. L'habitacle était délicieusement chaud avec une légère odeur de cuir et de poussière.
- Dur week-end ?
Je regardai Carter alors qu'il revenait derrière le volant et reprenait la route.
- Plutôt. Il y a encore pas mal de boulot à la maison. C'est assez fatiguant.
Il n'avait pas besoin de savoir à propos de mes problèmes de santé. Je ne tenais pas à être traitée comme une chose fragile. Je l'avais déjà bien assez vécu lorsque la faiblesse de mes gênes avait été révélée.
- De l'extérieur, ça n'y paraît pas. Enfin, il n'y paraît plus. Depuis que le terrain devant a été déblayé, on pourrait penser que c'est une maison témoin.
J'eus un rire fatigué.
- J'ai cru que je n'arriverais jamais à bout de ce terrain ! J'ai eu l'impression de désherber la forêt amazonienne !
Il éclata de rire. Malgré moi, je souris aussi. C'était bien plus agréable que de faire le trajet en vélo, dans le froid et sous la menace de la pluie.
Nous eûmes tôt fait d'arriver à St John's. Carter se gara sur sa place de parking et coupa le moteur. La radio se tut brusquement, nous laissant tous les deux dans un étrange silence. Je me sentis gênée, embarrassée sans vraie raison. Le soudain calme, le fait que nous étions éloignés du reste du monde, quelque part... Je ne connaissais pas vraiment Carter et même s'il avait toujours été agréable et galant avec moi, je me sentais affreusement mal à l'aise de me retrouver seule avec lui.
Je décidai de tenter ma chance. Carter était là depuis plus longtemps que moi et il devait avoir connu Jenna Ashton. Si je la jouais bien, j'allais pouvoir avoir son avis sur l'histoire sans me mouiller.
- Tu connais Jenna Ashton, toi ? questionnai-je prudemment.
- Tout le monde la connaît, dans Bloomingdale, répondit-il simplement. Pourquoi ? Elle est venue chez toi ?
Je hochai la tête. Le siège grinça lorsque je m'orientai vers lui, repliant une jambe sous moi, m'adossant à la portière. Il appuya l'arrière de sa tête contre l'appui du siège.
- J'en étais sûr. C'était évident qu'elle viendrait.
- Pourquoi ça ? À cause de sa... crise de nerf, dépression ou je ne sais quoi ?
Il acquiesça de la tête tout en se passant une main dans les cheveux.
- Jenna... C'est un peu le sujet tabou de Bloomingdale. Tout le raffut qu'elle a fait... Autant dire que personne ne t'en parlera.
- Même pas toi ?
Il me regarda, un soupir glissant de ses lèvres.
- Tu veux vraiment savoir ?
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Le Secret de St John's
ParanormalBloomingdale semble être un petit village simple, calme, inoffensif. En tout cas, c'est ce que pense Yvana lorsqu'elle emménage dans ce village d'Oregon, à quelques heures de Portland pour fuir la pollution qui la rend malade. Toutefois, elle ne pe...