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Je ne trouvai pas grand-chose sur la mort de Gemina Walter McWon. Son avis de décès était paru dans le journal local, de même qu'un court article stipulant qu'elle avait été retrouvée morte dans la chambre de sa fille. Il n'y avait aucun détail sur la façon dont on l'avait tuée.

Le pire était la date. Gemina McWon était morte à peine un mois avant que je ne déménage à Bloomingdale. Je ne parvenais toujours pas à croire que Carter ait pu tuer cette femme. Pour quelle obscure raison l'aurait-il fait ? Son double maléfique avait-il choisi une personne au hasard ? Avait-il eu une bonne raison de la tuer ? Bien que je n'imagine pas qu'il puisse y avoir une raison valable au fait de tuer quelqu'un à part la légitime défense.

Se souvenait-il seulement de l'avoir tuée ? Et d'avoir été vu par Sandie ?

Il y avait une autre question qui me tourmentait. Plus insidieuse et difficile.

Et si Carter se jouait de moi ? De tout le monde ?

J'avais déjà vu des psychopathes tromper leurs familles, leurs collègues... Et si Carter avait tué la mère de Sandie, se pouvait-il qu'il ait tué d'autres personnes et que personne ne le sache ? Et si c'était le cas, comment étais-je censée réagir ? Qu'étais-je censée faire ?

J'étais perdue. Effrayée. Je ne savais plus quoi ressentir, comment agir. J'avais trop de questions. Je ne pouvais plus réfléchir à tout ça. Je détestais l'idée que Carter soit un malade, un tueur en série. Je refusais de croire qu'il avait tué Gemina McWon.

La parole d'un enfant était toujours pure et sincère mais Sandie avait pu se tromper. Croire que c'était Carter alors que ça ne l'était pas. C'était tout à fait possible. Toutefois, qu'elle ait parlé des yeux rouges, du « méchant » et du « gentil » Carter... C'était confondant. Elle ne pouvait pas l'avoir inventé.

L'après-midi fut long. Terriblement long. Je dus lutter pour ne pas faire plus de recherches sur la mort de Gemina McWon. Je n'avais pas envie de tomber sur un indice qui me disait que Carter avait tué de nombreuses personnes. J'étais amoureuse de lui, et je savais que ça modifiait ma vue sur cette histoire.

Malgré tout, je ne pouvais pas nier qu'il y avait un côté sombre chez Carter. Un côté noir et maléfique qui se dissociait de celui que j'aimais. Je connaissais les notions de trouble de la personnalité, de bipolarité. Malgré tout, je doutais qu'il s'agisse de ça. Pas avec ses yeux qui changeaient de couleur.

Je fis une rapide recherche sur le changement de couleur de l'iris. Je ne trouvai rien qui puisse expliquer le phénomène chez Carter. Rien qui n'aille avec ses pertes de mémoire. De toute façon, je savais d'instinct que ça n'avait rien à voir avec un problème physique ou mental. C'était bien au-delà de ça.

Les mots du Méchant Carter me revinrent. Il faut que tu comprennes. Que tu te rappelles. Me rappeler de quoi ? Ce n'était pas moi qui oubliait régulièrement ce que je faisais. Je me creusai la tête sans avoir la moindre idée de ce à quoi il faisait référence.

Je me figeai brusquement. Carter devait me ramener chez moi ce soir. Et Lila devait passer récupérer les affaires de Louis, ce soir. Les deux ne pouvaient pas se croiser. Je ne pourrais pas parler librement à ma meilleure amie si Carter demeurait dans les parages. Je ne savais déjà pas ce que j'allais bien pouvoir dire à Carter...

Les élèves se mirent à chahuter dans les couloirs et les cris me parvinrent faiblement. La fin des cours. Encore deux minutes à peine, le temps que les enfants mettent leurs manteaux et montent dans le bus, et je devrais me retrouver face à Carter, seule et isolée avec lui en voiture.

La porte du bureau s'ouvrit et je faillis tomber de ma chaise. Je m'étais tellement enfoncée dans mes pensées et mon appréhension que je n'avais pas entendu quequelqu'un venait.

Le Secret de St John'sOù les histoires vivent. Découvrez maintenant