7.

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Tout le monde se présenta en arrivant. Ils semblaient tous accueillants et chaleureux. C'était rassurant. Le bâtiment me mettait déjà mal à l'aise alors si mes collègues avaient été peu cordiaux... Venir travailler aurait été une corvée.

Le plus dur, ce fut de monter seule à l'étage pour gagner mon bureau. Je ne voulais pas y aller.T ous les autres étaient dehors, à accueillir les enfants. Je percevais à peine leurs voix. Je me concentrai sur le bruit de leur conversation aussi léger fut-il. Savoir qu'ils étaient là me rassurait quelque peu.

Le bureau était... froid. Impersonnel. Les murs étaient blancs, vides. La fenêtre donnait sur l'arrière-cour. Une partie avait été bitumée pour les enfants. Le reste était tondu au millimètre près.

Les néons m'assommaient d'une lumière crue, baignant toute la pièce dans une sorte de film blanchâtre. L'équipement était flambant neuf, à peine couvert de quelques grains de poussière. Tout semblait immaculé.

Je me sentis encore plus mal à l'aise. Je n'avais aucune envie de rester là. Il allait falloir que j'affiche des choses aux murs, que j'amène un peu de vie. Je ne saurais jamais rester dans cet endroit, sans ça.

Les cris et les rires des enfants ne tardèrent pas à envahir la cour de récréation. Ce fut comme si tout l'étage récupérait quelques degrés. Mon corps se réchauffa et je cessai de trembler.

Je m'habituai à mon nouvel environnement de travail. Le bureau était plutôt petit. Je n'aurais pas à bouger pour décrocher le téléphone ou accéder aux dossiers... C'était... ergonomique.

Ergonomique. C'était le mot. Froid, impersonnel et... ergonomique.

Le chauffage se mit en route brusquement, me faisant sursauter. Le bruit des tuyaux, de l'eau à l'intérieur... Je ne m'y étais pas attendue et ça faisait un sacré vacarme. Au point où je dus sortir du bureau lorsque le téléphone sonna pour pouvoir entendre mon interlocuteur.

Mon malaise resurgit vivement lorsque je me retrouvai isolée dans le couloir, seule. Même les voix des enfants me parurent lointaines. Je resserrai mon gilet autour de moi, agressée par le froid du couloir.

Je tentai vraiment de me concentrer sur la conversation. Je n'avais pas le choix. C'était mon job, de répondre au téléphone.

Le problème tenait dans le fait que je me sentais épiée. J'eus beau regarder tout autour de moi, il n'y avait personne. Et étant à l'étage, ça ne pouvait pas venir des fenêtres. Malgré tout, je sentais qu'on me fixait.

Il me fallut quelques secondes pour réaliser que mon esprit avait abandonné la conversation. Je m'excusai platement en me réfugiant dans le bureau et en fermant la porte derrière moi. La sensation s'évanouit dès que la porte fut close.

Je pus reprendre la conversation sérieusement et la mener à son terme. Pour tenter d'éviter de penser à mon malaise, je me plongeai dans le travail que j'avais à abattre. Si je ne pouvais pas y songer, il finirait éventuellement par disparaître. En tout cas, je priais pour ça.

Malheureusement pour moi, il ne partit pas. Il me colla à la peau, laissant une pellicule de sueur froide à l'arrière de ma nuque. J'avais hâte de partir. D'aller déjeuner. De retrouver les autres. De ne plus être seule et isolée à l'étage.

Si on m'avait dit ce matin que j'aurais hâte d'être au déjeuner, j'aurais ri. J'allais encore me retrouver au centre des discussions, phénomène de foire végétarien que j'étais. Pourtant, aller les rejoindre dans la cantine était le seul moyen que j'avais de fuir cet endroit.

Je regardai les minutes s'égrener avec une lenteur insupportable. La récréation arriva enfin. Je décidai de prendre une pause et de descendre rejoindre tout le monde dehors. Prendre l'air ne me ferait pas de mal.

Le Secret de St John'sOù les histoires vivent. Découvrez maintenant