"Hugo pousse la porte et nous fait rentrer. Nous marchons sur le chemin fait d'herbe légèrement gelée. Celle-ci craque sous nos pas, et on se croirait au beau milieu de l'hiver. Il parait connaître parfaitement le chemin, alors je le suis, sans discuter ou chercher à comprendre.
Quand il s'arrête et pose finalement le bouquet, je me dirige vers la pierre grise pour frotter la saleté et la poussière accumulée depuis tant d'années."
- Tu n'y arriveras pas, me dit-il avec une pointe de tristesse dans la voix. Ici gît Maud Adams, commence t-il à réciter après un instant de silence en s'armant d'une voix d'outre tombe. Une fille et une soeur aimante partie trop tôt.
"Mon regard est fixé sur la pierre tombale où les dates sont les seules choses encore visibles.
«2001 - 2010»
Elle n'a vécu que neuf ans."
- Elle aurait dit avoir 14 ans aujourd'hui, murmure t-il.
- Je suis tellement désolée pour ta, commençais-je.
- Ma petite soeur, me dit-il.
"N'y tenant plus, je me retourne et me jette dans ses bras. J'éclate en sanglot contre son épaule et il me caresse le dos en essayant de me réconforter."
- Ce n'est pas toi qui est sensée pleurer, me dit-il doucement.
- Comment est-ce que tu fais, lui dis-je avec ma voix entrecoupée de pleurs. Comment tu fais pour t'y habituer ?
- On ne s'y habitue pas. Jamais. On fait avec. La douleur nous rend plus fort, mais elle change les gens. Pense à remercier ton passé pour un meilleur futur.
"Je ne saurais pas dire combien de temps j'ai passé dans ses bras, à pleurer toutes les larmes de mon corps pendant qu'il me racontait son passé. Chaque jour est une souffrance pour lui, et quand il m'explique tout coups qu'il se prend, je les ressens jusqu'aux tréfonds de mon âme."
- Tu ne peux plus le laisser te faire du mal, dis-je avec un peu de colère dans la voix.
"Au moins cela m'aide t-il à tenir les pleurs éloignés."
- Je n'ai pas le choix, me répond t-il flegmatique.
- Comment peux-tu rester aussi calme dans un moment pareil, m'énervais je.
- Rester calme, Aline, c'est un bien grand mot. Et puis, ce n'est pas si grave.
- Pas si grave, dis-je en manquant de m'étouffer. Mais au contraire ! Peux tu me dire le nombre de fois que tu as failli mourir sous ces coups de poings ? Combien de jours de cours as-tu raté et qui t'éloignes de ton avenir ? Combien de fois as-tu dû déménager ? Combien de fois est ce que, dis-je avant d'être coupée dans ma tirade.
- Je ne veux pas, c'est tout, point final. Maintenant parlons d'autres choses.
"En fureur, je me lève, lui lance un regard de tueur et reprends le chemin en sens inverse. Je ne sais pas où je vais, mais il faut que je m'éloigne de lui. Immédiatement.
Je l'entends m'appeler, me demander de revenir, alors j'accélère et commence à courir. Les virages se succèdent, et puis je trébuche sur une pierre et m'étale par terre. Le givre me glace les doigts, et s'incruste dans ma robe. Quand je me relève, je vois des mèches de cheveux ornés de cristaux, mais cela ne m'empêche pas de continuer ma course folle. Quand finalement j'arrive au portail, je vais pour tirer le portail et sortir d'ici. Avant que je ne puisse faire un seul mouvement, une main -celle d'Hugo- attrape mon bras, et m'attire à lui.
Sans me laisser le temps de comprendre son geste, et de l'en empêcher, il s'approche de mon visage et colle doucement ses lèvres contre les miennes. La colère qui m'habitait un peu plus tôt semble s'être faite emporter par le vent, et un petit sourire s'étend sur ma bouche. Je réponds d'abord timidement à son baiser, puis petit à petit, celui-ci se fait plus enfiévré, et je me retrouve collée contre les barres de fer du portail qui me rentrent dans le dos. Je ne le sens pas, la seule chose qui m'importe sont les mains d'Hugo, plaquées contre le creux de mes reins.
Le baiser dure longtemps, mais c'était encore trop court pour moi. Nous nous écartons tout les deux, à bout de souffle, et ses mains se décollent doucement de ma taille. Je ressens alors un vide dans mon cœur, comme si il avait emporté un bout de mon cœur en s'écartant de moi."
- Je continue à penser qu'il faudrait que tu en parles à quelqu'un, dis-je doucement.
- Aline, répond t-il en baissant de plusieurs octaves à la fin de mon nom.
"La façon dont il prononce mon prénom me fait envisager des milliards de possibilités, mais je reprends rapidement mon sérieux."
- Mais je te laisse gérer, rajoutais-je en lui faisant comprendre que j'abandonne la partie. Ou du moins, pour l'instant.
- Je crois que j'ai un peu faim, dit-il alors.
"Cet homme est vraiment lunatique."
- Je te suis. Ou allons-nous ?
- En ville, évidemment.
- Oh, murmurais je déçue. Déjà... Je trouvais le lieu assez reposant.
- C'est un cimetière.
"Je le vois faire la moue et me passer un bras autour des épaules avant de m'entraîner à sa suite.
Nous rejoignons l'arrêt de bus et attendons celui de 22h34. Nous grimpons dedans, et voyageons pendant une heure. Puis c'est le tour du métro que nous prenons jusqu'à la Tour Eiffel.
Nous nous baladons, main dans la main, et achetons de quoi manger dans une boulangerie du coin ouverte 24h/24. Un sandwich et un muffin plus tard, nous nous retrouvons sur un banc, devant cette immense tour éclairée. L'ayant déjà grimpé plusieurs fois, je ne force pas la main d'Hugo qui me promet que nous reviendrons au autre jour.
Il est 01h22 quand il me dépose devant l'entrée de l'immeuble de Valentin. Nous hésitons tous les deux -gênés- et concluons finalement par un bisous sur la joue de ma part.
Je grimpe les escaliers -pied nus- quatre à quatre et toque à la deuxième porte du cinquième étage. C'est une Amy complètement crevé qui vient m'ouvrir, et qui me fait entrer.
Je découvre toute la troupe, affalée sur le canapé du salon, des bières vides sur la table basse, et des pizzas à moitiés mangées. C'est Enora qui ouvre les questions la première."
- Alors Lili, c'était comment cette soirée, me demande t-elle, impatiente.
"Eh bien, que dire... Pas que je suis allée dans un cimetière en tout cas."
- C'était, débutais je. Romantique ? Enfin je crois.
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Destin cruel t.1 : Aline
Teen FictionHISTOIRE ANCIENNEMENT INTITULÉE « Aline » retrouvez les personnages sur mon pinteret @/readeuse_ /!\ UNE DE MES PREMIÈRES HISTOIRES QUI NE ME PLAIT PLUS MAIS GARDE UNE PLACE DANS MON CŒUR | je ne prévois pas de réécriture pour l'instant /!\ Aline, 1...