chapitre 6

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Ma journée a commencée comme toutes autres. Je me suis levée, je suis partie en cours. J'ai vu Jess. Nous avons parlé, ri, nous sommes restées dans un silence agréable.

J'ai écouté les cours comme tous les jours, j'ai volé... Comme tous les jours.

J'ai vécu tout simplement. Comme chaque jour depuis longtemps.

Me voilà maintenant.
Je pousse la porte de l'infirmerie, un drôle de sentiment au fond de moi. L'air est plus lourd, l'expression de l'infirmière est plus grave, la pièce est plus blanche.

Je suis plus anxieuse.

Je m'assois sur ce lit blanc et stéril, comme la veille. L'infirmière s'approche de moi, parfaitement calme, me regardant en silence. Elle s'asseoit, tirant une chaise dans un crissement angoissant.

Je sens que tout ceci n'est pas habituel, mais je ne réagis pas, je reste silencieuse.

"- Bonjour Gwenn. Commence-t-elle.

- Bonjour.

- écoute, j'ai les résultats de ton prélèvement de sang."

Je ne dis rien, la regardant simplement, attendant le verdique.

Après tout, je suis en parfaite santé.

"- Gwenn... Je suis désolée. Tu es atteinte d'un leucémie chronique. Un stade plutôt avancé. "

Je reste glacée. Interdite.

L'information refusant d'arriver jusqu'à mon cerveau.

"- J'ai un... Cancer? Demandé-je d'une voix éteinte.

- Oui, un cancer du sang. Les symptômes ne tarderont pas à apparaître.

- Et je peux être soignée... ?

- Oui... Mais à ce stade le traitement dans notre hopital est plutôt cher.

- Combien ?"

Elle ne dit rien, se contentant de me regarder avec des yeux emplis de tristesse.

"- 50 000 euros."

Tant d'argent.

Je me lève, mes pensées se sont arretées de tourner, je ne réalise pas.

Je sors, je quitte ce bâtiment, marchant sous la neige.

Un cancer.

je marche, bercée par l'hiver, sans m'arrêter, ignorant le monde autour de moi. Je ne sais pas où je vais, je suis perdue, interieurement je suis perdue, seule, sans accroche.

Des larmes roulent sur mes joues, se mêlant à la neige autour de moi.

Un cancer.

Je me retrouve devant le bar. Sans réfléchir, j'entre, me mêlant dans la même ambiance habituelle.

Je m'asseois sur un tabouret devant le bar. J'agis sans conscience, je suis vide.

Un cancer est à l'intérieur de moi et il me ronge. doucement, mais sûrement. Il y a un jour a peine je n'en avais pas la moindre idée. Pourquoi personne ne me l'a dit plus tôt ?

J'oublie les gens autour de moi, j'oublie le billard, j'oublie la petite télévision qui grésille, j'oublie les gens qui crient et qui pleurent autour de moi. J'oublie tout.

La barman s'approche, étonné de ma présence, car je ne m'accoude jamais en temps normal.

Avant qu'il n'ai pu dire quoi que ce soit, je claque un billet froissé sur le comptoire, avec un regard dur et froid.

"- Une bière."

Il me sert, voyant que j'ai besoin d'être seule. J'avale l'alcool blond, qui coule le long de ma gorge dans un frisson.

Je me sens maintenant comme tous ces gens, qui viennent dans ce bar, buvant pour oublier mes problèmes, buvant pour oublier ma leucémie.

Je ne sens plus le temps passer, l'alcool me réchauffe et je ne sais plus combien de verre j'ai bu, mais je continue, dilapidant mon argent, qui n'est d'ailleurs pas le mien.

Un homme s'assied à côté de moi.

Je l'ignore, préférant me concentrer sur mon verre et mes problèmes.

"- Salut toi. "

Je me tourne le fixant avec mes yeux durs. C'est un jeune homme d'une vingtaine d'années, brun avec une courte barbe. Des épaules bien carrées et larges, le tout accompagné d'un joli sourire.

Un beau garçon.

Je ne réponds pas.
Je le regarde simplement, en silence, délaissant mon verre vide.

"- Tu m'offres une bière ? Demandé-je avec une voix éteinte"

Il pose un billet sur la table et commande pour nous deux.

" - Que me veux-tu ? Je reprends en apportant le nouveau verre à mes lèvres.

- Je travaille pour Toule, moi aussi. Je veux fuire cette ville avec beaucoup d'argent, et j'ai un plan.

- je ne t'ai pas demandé de me raconter ta vie... Je t'ai demandé ce que tu voulais.

- Je veux que tu collabores avec moi.

- Et pourquoi je ferais ça ?

- Parce que tu as un cancer. Et cruellement besoin d'argent.

- Comment...

- Comment je le sais ? J'ai fait des recherches sur toi... Et j'ai volé ton dossier à l'hopital."

Je ne dis rien, restant silencieuse. Il sait.
Je vide ce qu'il reste de ma bière d'une traite.

Je tourne un regard vers lui.

"- Tu m'en offres une autre ? 'Faut que je digère les informations.

- Tu ne vas pas tarder à être mûre si ça continue."

Il pose un autre billet sur le comptoire, hélant deux nouvelles bières.

"- Jonathan. Dit-il simplement. "

Je le regarde intriguée.

"- Je m'appelle Jonathan River. Complète-t-il.

- Gwenn, repondis-je pas politesse, juste Gwenn."

Il sourit.
Je trouve qu'il a un beau sourire. Depuis le début de notre discussion, j'ai commencé à oublier la maladie qui me ronge les veines, m'interressant presque à cet inconnu.

Je bois ma bière avec calme, venant presque à en aprécier le goût, et cette odeur particulière de céréales.

"- Dis-moi, repris-je, pourquoi veux-tu cet argent ?

- Parce que je veux vivre. Amasser assez d'argent pour pouvoir partir vivre ailleurs, où je voudrai.

- Tu veux vivre...

- Oui. Je veux vivre à en creuver. "

Ses mots résonnent avec beaucoup de volonté et de force. Ils ont comme réveillés quelque chose en moi.

Il se lève. Je le regarde.

"- C'était sympa de partager ces bières avec toi. "

Je souris, le plaisir étant partagé.

Il me tend un papier avec un numéro écrit à l'encre noire, avant de faire volte face.

"- Tu peux te laisser mourir, je le respecterai. Mais si tu choisis de te battre et de vivre de toutes tes forces, appelles-moi."

Il a disparu, me laissant seule devant deux chopes vides, perdue et décontenancée.

La Voleuse De FloconsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant