Chapitre 26

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Mon temps de fuite s'écoulant rapidement, je décide de me mettre en route vers la sortie. J'accroche solidement la toile roulée dans mon dos, pour qu'elle ne gène pas ma progression.

Faisant volte face, j'évolue en sens contraire, retraversant une deuxième fois toutes les salles blanches couvertes d'œuvres d'art.

Je sens mon coeur battre plus vite et ma tête tourner légèrement. Je ralentis donc la cadence pour ne pas perdre l'équilibre.

Mais qu'est-ce qui m'arrive ?

vite, je n'ai pas de temps à perdre, je dois rejoindre le conduit d'aération.

Mais mes pieds ne répondent plus à mes ordres muets. Au contraire, je sens que mes jambes sont lourdes tout à coup, comme si mon corps refuse que je continue d'avancer.

Mon esprit se fait violence, tandis que mon corps m'abandonne doucement... Je glisse à genou, tremblante, tandis qu'une panique sourde s'empare de moi, me gagnant de toute part.

Je dois fuir de cet endroit, si je ne me relève pas, je n'en aurais bientôt plus le temps.

Je commence à tousser violemment, sentant du sang âcre remonter le long de ma gorge, par instinct je mets mon bras devant ma bouche. Si jamais mon sang tombe sur le sol, je suis foutue.

Mon corps tombe mollement à terre, ma tête heurtant le sol dans un choc sourd. La douleur résonne comme un écho dans mon corps, tandis que mes sens se brouillent. Je n'entends plus que des bruits indistincts, ma respiration est haletante, je tremble de toute part tandis que ma bouche se remplit de sang.

Pourquoi avoir une crise maintenant?

C'est le pire moment, le destin se joue de moi. Si dieu existe, il se venge.

Est-ce parce que je ne suis pas assez blanche ? Pas assez pure ?

Ma tête tourne, je m'agrippe au sol pour ne pas perdre pied, voyant les minutes défiler avec un regard impuissant.

Je dois me battre, je le dois encore. Je sens mon corps se calmer légèrement, cédant à ma volonté.

Front contre terre, je pose mes mains à plat contre le sol et le repousse de toutes mes forces, bandant mes muscles pour me remettre debout. Je pose un genou, puis un pied avec toute ma volonté. Me lever ne m'a jamais paru aussi difficile de toute ma courte vie. Mon corps tremble encore, mais plus rien ne compte.

Du sang coulent dans un contact chaud le long de ma bouche, tachant ma peau translucide. Mes manches en sont aussi immaculées, le liquide rougeâtre jurant avec le blanc de ma combinaison. Mais je n'y prête aucune attention, je n'ai plus qu'une seule chose en tête.

Je sortirai de cet endroit vivante et rien ni personne ne m'en empêchera, pas même dieu, ni même un cancer.

Je pose un pied devant l'autre, mes muscles chauffant de nouveau, prêts à me soutenir. Je me mets à courir.

40 secondes.

J'avance toujours plus vite, poussant une peu plus fort à chaque enjambée, le souffle court et le cœur battant.

Chaque battement, chaque pulsion, résonnent dans mon cerveau, comme le contact dur du sol à chacun de mes pas. Mon corps se bat avec moi et m'entraîne vers cette sortie que je ne tarde pas à apercevoir dans la dernière salle.

30 secondes.

Ma vie ne tient qu'à un fil, qu'à quelques malheureuses secondes.

J'attrape la grille métallique qui repose par terre, mon corps répondant à mon instinct de survie, toute conscience déconnectée.
Je plonge dans le conduit, me contorsionnant pour replacer la grille derrière moi, histoire de ne pas laisser trop d'indices.

...

Je l'ai fait. J'y suis.

Je respire, ma conscience revenant brusquement avec ma respiration saccadée.

Je suis en vie.

2 secondes.

Je suis à l'abris. Ma vie n'est pas encore finie. Je commence doucement à ramper à travers le tuyau étouffant, me dirigeant avec hâte et confiance vers la sortie.

Bientôt libre.

J'avance, étouffée dans la pénombre, rêvant de voir apparaître la lumière blanche de la lune, se reflétant sur le sol enneigé.

Après un temps, que je ne saurais évaluer, mon vœux se réalise et j'aperçois le bout du tunnel, la fraicheur de la nuit venant caresser mon corps moite et fatigué.

Je pose un pied dans la poudreuse, abandonnant avec soulagement ce conduit oppressant, je redécouvre avec plaisir la sensation des flocons froids, venant s'écraser sur mon visage, se mêlant au sang séché.

Je quitte mon moment de plénitude pour prendre la fuite à travers les arbres, désirant plus que tout fuir cet endroit. Mes pieds écrasent la neige avec violence, fournissant les derniers efforts pour rejoindre la Jeep.

Je rejoins la rue, vois la Jeep, sentant un bonheur inexplicable me prendre aux tripes. Je me sens plus rassurée et confiante que jamais.

Jonathan ouvre la portière, le regard illuminé, prêt à me prendre dans ses bras.

Avant que je puisse me jeter de joie, mon corps m'abandonne.

Je tombe au sol.

La Voleuse De FloconsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant