Chapitre 22

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"- Je suis désolé, murmure-t-il dans l'ombre"

Je ne m'attendais pas à le voir apparaître comme cela. Cette fois-ci, c'est à moi d'être figée au milieu de la pièce.

Il fait quelques pas vers moi. Je ne bouge pas, toujours immobile.

Je ne sais pas comment réagir.

Colère, envie de pardonner, tristesse, panique, désir ? Tout ce mélange en moi, je ne suis qu'un tourbillon d'émotions.

Il pose une main sur mon épaule avec un sourire triste.

"- Je suis un piètre équipier n'est ce pas ?"

Sa voix grave m'enveloppe de son timbre ambré et rassurant.
Mes épaules s'affaissent, démontrant mon calme soudain.

Il lève sa main, je la suis des yeux. Il la passe avec douceur dans mes cheveux blancs, en soupirant.

Il semble perdu. Et moi aussi.

Je me laisse faire, appréciant le contact de sa main dans mes cheveux, avec le bruissement doux que procure ce geste.

"- Tu m'offres ma bière ? Murmuré-je comme une enfant triste.

- Tout ce que tu voudras. "

Il me regarde quelques instants, ses yeux semblent profonds, déchiffrant mon regard.

À quoi penses tu Jonathan ?

Il fait demi-tour et je le suis, toute colère disparue. Je me sens vide et sereine avec pour seule envie de le suivre.

Nous sortons dehors, et il fait nuit, encore. Je soupire me laissant envelopper par l'air frais et le calme du soir. Les brouhahas provoqués par les invités entrant et sortant du casino ne m'atteignent pas.

Je suis calme.

C'est une belle nuit, pas autant qu'hier, mais une belle nuit quand même.

J'aime fumer pendant les belles nuits.

Mais Jess ne pourra pas enchaîner deux nuits à ne pas dormir.

Jonathan, qui commençait à partir, se retourne en voyant que je reste immobile à fixer le ciel.

"- Tu ne viens pas ?

- Il y a quelque chose que je voudrais faire, plus que de boire une bière.

- Quoi donc ?

- Fumer en regardant la nuit.

- Faisons ça."

Je me tourne vers lui en souriant.
Nous abandonnons la Jeep, décidant d'une promenade nocturne jusqu'au tabac.

Jonathan marche à côté de moi, les mains enfoncées dans les poches de son gros caban. Je trouve que ce manteau lui va bien, il fait discret et élégant.

Il finit par couper le silence.

"- Dis moi, pourquoi plutôt fûmer que boire une bière ?"

J'hausse les épaules, regardant devant moi, tout en marchant d'un pas calme et tranquille.

"- Cela fait quelques années que je passe dans ce bar miteux pour voir Toule, commençé-je, et avec le temps à force de voir tous ces gens boire des bières pendant toute la nuit, j'ai fini pas voir ça comme si c'était une façon d'oublier ses problèmes, d'engourdir nos cerveaux dans l'alcool pour oublier nos vies minables. "

Il me regarde, intéressé.

"- Je trouve ça profond, peu de gens ont cet avis, et pour fumer ?

- Fumer c'est différent. ça m'arrive rarement mais quand je le fais, c'est toujours avec un personne en qui j'ai confiance, et on regarde le ciel ensemble pendant toute une nuit. Le monde nous appartient. Pour moi la rareté de fumer, c'est lié à des moments d'espoir."

Il s'arrête un instant, me fixant intensément. Je m'arrête, surprise, sortant de la léthargie dans laquelle j'étais plongée en vidant mes pensées.

"- Je trouve ça beau ce que tu dis, dit-il avec étonnement.

- Vraiment ? C'est juste ce que je pense.

- Tu me fais confiance ?"

Il s'avance, réduisant l'espace entre nous.

Je ne réponds pas, me contentant d'hausser les épaules encore une fois. Je ne dis rien car en réalité, je ne sais pas quoi répondre. Est-ce que je lui fais confiance ? Peut on répondre à cette question aussi aisément ?

Il passe un bras au dessus de mes épaules, je suis étonnée mais je me sens bien contre son corps chaud.

Nous recommençons à marcher, collés l'un contre l'autre.

"- Allons acheter un paquet. "

C'est ce que nous avons fait, nous avons achetés un paquet à "la dame tabac" et nous sommes partis, grimpant sur un toit inconnu, assez facile d'accès, d'où le ciel parait immense.

Assise en tailleur, Jonathan à mes côtés, je sors une cigarette du paquet.

Je l'allume en faisant danser la flamme de mon Zippo. J'aspire une grande bouffée en ouvrant mes poumons.

C'est bon. Juste bon.

C'est la première fois que je fume avec quelqu'un d'autre que Jess, c'est différent. Mais tout aussi enivrant.

Nous sommes seuls, avec le ciel pour nous. Je donne la cigarette à Jonathan qui tire dessus en me fixant. Je trouve ça encore mieux de partager une cigarette. C'est comme partager un peu d'espoir, partager un petit bout de ciel, partager la vie, le temps d'une nuit.

Il sourit.

"- À quoi tu penses ?

- À ce moment.

- C'est agréable n'est-ce pas ?

- oui, vraiment."

Il s'allonge sur les tuiles, posant sa tête  sur ma cuisse. Je me sens bien.
Il me donne la cigarette et j'aspire la fumée et la recrache doucement.

Après avoir tirer dessus quelques fois, je la coince entre ses lèvres.

"- Approche, Murmure-t-il."

Je penche ma tête au dessus de la sienne. Il l'attrape avec précaution de ses deux mains.

Il aspire une grosse bouffées, je regarde la braise consumer rapidement le tabac. Il retire la cigarette d'une main, gardant la fumée en lui, tenant mon visage de sa main restante.

Il lève la tête, nos bouches n'étant qu'à quelques centimètres, il souffle la fumée sur mes lèvres. Je l'inhale avec un sensation de sérénité, mêlé à du désir.

Il sourit, gardant cette distance avec moi, nous ne bougeons pas, nous yeux se fondant dans un silence profond.

Ses lèvres s'étirent sur un petit sourire.

"- Tiens, je te donne un peu de mon espoir."

La Voleuse De FloconsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant