Chapitre 9 :

249 20 7
                                    

"Les monstres existent vraiment, les fantômes aussi...Ils vivent en nous, et parfois ils gagnent..."

- Stephen KING -

Toc, toc, toc.

Les premiers sons qui résonnent entre ces murs froids et impersonnels me parviennent aux oreilles. Je pense déjà savoir qui attend patiemment mon accord pour entrer, parce qu'ici, dans cet endroit fade, c'est un vrai moulin où personne ne me demande mon avis.

Toc, toc, toc.

J'essaie d'émettre un son mais je n'y arrive pas. Je me sens tellement molle que même mes lèvres sont trop épuisées pour articuler. Heureusement, la porte s'entrouvre en grinçant, racle le lino à moitié défoncé. Et enfin apparaît mon visiteur, caché derrière un grand bouquet de fleurs semblables à des torches parfumées et colorées de lilas, de roses, de pivoines et d'un peu de mimosa.

Je ne voulais pas qu'il me voie aujourd'hui ni même un tout autre jour, pas dans l'état dans lequel je suis. Je suis tellement affaiblie que je lutte vraiment pour ne pas céder à toutes mes heures de sommeil perdues.

_ Salut !

J'aimerais tellement qu'il fasse marche arrière, qu'il parte tout de suite, qu'il reste caché derrière ce bouquet magnifique qui embaume délicieusement toute la pièce. Parce qu'au fond, même si sa voix est chaleureuse, je devine un certain accent inquiet, un peu amer aussi. Je rêverai qu'il m'en veuille suffisamment pour me laisser seule ; je ne veux vraiment pas qu'il voit à quel point je vais mal, à quel point je ne suis jamais tombée aussi bas. Je ne peux même pas lui rendre son salut, mes bras étant complètement inertes, dénués de la moindre énergie. De toute façon avec la perfusion ma mobilité est quasiment réduite à néant.

Tap, tap, tap, tap, tap, tap.

_ Je t'ai apporté ça, je ne savais pas trop ce que tu aimais alors...

Il laisse sa phrase en suspend tandis que je le vois s'avancer près de moi pour gagner la table de chevet à hauteur du lit. Le fait qu'il garde le visage caché derrière cet immense bouquet multicolore me rend nerveuse ; et s'il était en colère contre moi et qu'il essayait de me le cacher ?

_ J'ai confié tes devoirs à ta tante, elle te les donnera tout à l'heure. C'est elle qui m'a prévenue et je voulais au moins te rendre visite parce que se retrouver dans un endroit pareil, je sais à quel point c'est ennuyant...!

Ne fais pas ça Ace, n'essaie pas d'avoir de la compassion pour moi, je n'en vaux pas la peine. Tu n'oses même pas me regarder en face, tu es en colère et je te comprends. Mais je t'en conjure, ne te force pas à esquisser un grand sourire comme si tout allait pour le mieux dans le meilleur des mondes ! Si tu le fais, je vais me sentir coupable, je vais avoir envie de m'effondrer parce que, entre nous, Ace, personne ne s'est mis en colère quand je dérapais ; non, on me laissait gérer  les choses comme bon me semblait, alors par pitié ne fais comme eux à ignorer le monstre que tu as en face de toi. Révolte-toi ! Crie-moi dessus ! Raisonne-moi avant que je ne parte en vrilles !

_ Je te le dépose ici, comme ça tu pourras le sentir de ton lit, qu'est-ce que t'en dis ?

Son dos. C'est tout ce qu'il me donne à voir avec ses cheveux de jais mi-courts mi-longs qui semblent couler sur sa nuque. J'ai un pincement au cœur ; si tu te retournai tout de suite, que pourrais-tu donc penser de moi, hein Ace ? Que je suis fragile, pitoyable, pathétique sans doute. Et t'aurai raison. Parce que je le suis.

Regarde donc cette pauvre fille ! Allez, regarde. Regarde un peu ce qu'est ce monstre que tu considères comme une amie !

_ Comment tu te sens ?

[One Piece] The Bullied Girl [TERMINEE]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant