[Texte - Concours] Lettre

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Salut mes p'tits loups ! :p

Alors voilà, c'est un texte pour un concours de Naran02. Je sais, je m'y prends à la dernière minute, mais j'ai eu vent de ton concours à 22h après avoir lu le texte de Niconeptune. Alors j'espère que mon texte sera quand même accepté.

Dans le doute, ça fait quand même un texte écrit, donc au pire c'est pas grave mais ça me ferait plaisir d'y participer...

Et aux autres, bonne lecture ! :D

« Ma chère Emi...

Dis-moi, te souviens-tu de nos premiers moments passés ensemble et de notre première rencontre ? Je m'en souviens comme si c'était hier. Et les cieux savent à quel point j'aimerais revivre ces instants, ne serait-ce qu'une dernière fois, en lieu et place dans ces plaies ouvertes que sont les tranchées, gorgées de sang et de copeaux de métal.

C'était un mardi, de décembre. Le 13. Je m'en souviens parce que j'aime ce chiffre. J'avais eu un autre travail depuis une semaine. Je n'étais pas vraiment malheureux, mais j'avais mes « périodes », comme disait ce crétin de Bastien. Je n'avais pas un rond. J'étais fauché, accro aux paris. Je dépensais mon temps, mon argent et ma motivation. Je vivais une vie... que je n'ai pas envie de qualifier. Je n'étais qu'une ombre, qui errait entre son travail, son logement d'étudiant, le casino et son appartement, son petit appartement, chaleureusement miteux.

J'étais une ombre. Damnée et solitaire. Mon quotidien devenait de plus en plus morose, de plus en plus pénible. J'ai déjà lu quelque part que ce genre de vie était comparable au poids d'Atlas, le titan. Sauf que je ne suis pas Atlas. Je ne suis pas ce titan que tu apprécies parmi tant d'autres mythes. Je n'avais pas le poids du monde, juste du mien, celui de ma solitude et de ma routine détestable, de mon manque de volonté et de ma détestable dépression. Et pourtant, tu n'as pas été effrayée par ce poids si pénible. Tu n'as pas été effrayée par mon apparence de dépravé. Tu n'as pas été effrayée par ce que je suis. Tu m'as longuement approché, regardé, scruté, observé, comme un petit oiseau dans sa cage, aux ailes blessées, meurtries par les lames de vent sectionnant son avenir.

Tu as été mon véritable soleil. Tu as parcouru les quelques mètres qui nous séparaient, moi au comptoir, derrière un mur d'appréhension et d'angoisse, toi, passant la porte, cettte porte des possibles, tintant quand tu l'as ouverte. Tu as commandé une boisson chaude. Il pleuvait des cordes. Tes cheveux dégoulinaient de beauté sauvage, d'une beauté qui ne cloue que les types comme moi, incapables de réagir au quart de tour. J'ai lentement acquiescé, puis je t'ai servie. Nous avons longuement discuté ensuite, régulièrement... Dis-moi, Emi. M'as-tu trouvé stupide ? L'étais-je vraiment... ?

Aujourd'hui, ce souvenir m'aide à me concentrer quand les coups, les balles et les explosions pleuvent, comme lorsque je t'ai rencontrée. Mais ce n'est pas la même pluie que ce jour magique. C'est une pluie ardente. Elle n'a rien de poétique. Et je tends mon majeur bien haut à tous ceux qui pensent que le beau tient du mal. Ils ne comprennent pas que l'on donne une définition au chaos-même, celui qui ne devrait pas avoir de nom, celui qui ne peut être appelé par aucun mot tant sa cruauté est inimaginable.

La vie est horrible, ici. On apprend à côtoyer le pire, le pire de ce que fait l'être humain, les boucheries sanguinaires, les corps qui tombent, les amis qui partent, le sang, la mort, les maladies, et le froid, aussi, en ce moment ; c'est dur de se dire qu'on peut mourir le même mois durant lequel notre vie a changé... Et pourtant, j'arrive encore à sourire, parfois, quand on mange ce qu'on peut ou quand je tiens mon fusil en pensant à toi et à tous ces précieux moments que tu m'as si gentiment offerts. Quand je pense à tes yeux, quand je me concentre sur le souvenir de tes hanches qui dansaient le jour où nous nous sommes dit « oui », le doux plaisir du toucher de ta main absolue à laquelle j'ai passé mon lien d'or, il n'y a plus rien entre moi et le ciel, entre moi et mon rêve, entre toi et moi. Tu me rends passionnément triste, avec ces souvenirs qui valsent au cœur du sifflement des balles. Et tristement passionné, j'appuie sur la gâchette en me répétant à quel point je suis fou amoureux de toi. Je n'ai pas le choix, pour l'espoir désespéré de côtoyer une dernière fois le meilleur alors que j'ai plongé dans les abysses de l'humanité.

Parce que tu me permets de tenir. Et parce que je ne sais pas si je pourrais te tenir une dernière fois par la taille, je vais te dire ce que j'ai appris depuis que je t'ai quittée pour suivre le pas calculé de la destruction : l'espoir existe, Emilie. Je n'ose pas t'imaginer, pleurant à la fenêtre sous un ciel gris parce que tu n'es pas comme ça. Tu es forte. Mais tu peux plonger dans les ténèbres. Et dans ces plaies terrestres ouvertes, la seule chose qui me fasse vraiment peur, c'est que tu tombes à ton tour. L'ombre n'existe pas sans la lumière.

Alors garde mon sourire en mémoire et souris à ton tour, parce que l'une des plus belles choses que tu aies pu m'offrir fut ton sourire. Tu m'as sauvé. Je t'en remercie mille fois. Tu as été mon unique rayon de soleil. J'étais accro aux parties de Poker. La vie m'avait bluffé durant des années. Mais quand nos regards se sont croisés, j'ai gagné l'ultime pari.

Ce crétin de Bas me dit souvent que je suis un imbécile heureux. Il n'a peut-être pas tort, finalement. Avant, j'étais un imbécile. Aujourd'hui, je suis un imbécile heureux. Demain, je serai un idiot sûrement mort, mais mort heureux quand même.

Alors, encore une fois, merci, Emi. Merci pour tout. Je t'aime, plus fort encore que la lune puisse aimer le soleil.

Ton amour lunaire,

Anatole. »

[RANT BOOK 2] Le carnet du Capitaine Umi !Où les histoires vivent. Découvrez maintenant