[RANT BOOK 2] Le carnet du Capitaine Umi !

[Texte] Maigreur maladive

Voici un texte de 2014, j'avais 14-15 ans quand je l'ai écrit. Soyez indulgent s'il vous plaît xD Bonne lecture !

"« - Chouette ! J'ai perdu 2 kilos, encore. J'espère que ça continuera, pour la semaine prochaine... »

Pensée lors de la montée de la balance la deuxième semaine. Elle souriait en descendant de la balance, de l'alarme pour cette jeune fille qui préférait s'admirer devant sa glace. Elle posa la main sur son ventre et le pinça, comme si elle prenait quelque chose. Elle tenait un peu de peau et de graisse, avant de claquer sa peau et de soupirer. Elle n'avait décidément pas perdu assez.

Elle ? C'est Natacha, seize années à peine ; jeune adolescente qui veut devenir styliste et surtout modèle. Chaque fois qu'elle croisait un magazine, c'était pour observer et feuilleter à la recherche de chaque image de top modèle, ces belles jeunes femmes au corps soi-disant parfait, à la silhouette de déesse fatiguée. Elle se regardait alors, et pensait que tout était de trop dans son corps.

« - Ce n'est pas avec mes 55 kilos que je vais entrer dans la mode... Regarde ces cuisses, elles sont énormes... Tss. C'est pas possible, nan, vraiment ! »

En face de ces images chargées d'illusion, elle tente tant bien que mal de se faire une raison, et avec elle, c'est toujours les mêmes réactions. Elle pose les livres qui contiennent ses démons et elle part se coucher, sans même réellement manger. Elle hait trop se nourrir, mais Natacha ne comprend pas qu'elle se fait souffrir. Elle s'enfonce dans son propre mirage. Ses parents la mettent en garde, mais elle ne veut rien savoir. Elle est trop préoccupée par la mode et son monde impitoyable.

Nouvelle pesée. Natacha monte sur la balance qui chaque jour lui dit la vérité. Elle regarde les chiffres s'écrire, et sur son visage se dessine un petit sourire.

« - Ouais, encore. Allez. Encore 3 Kilos. On y est presque. »

Et c'est reparti pour deux autres semaines, où entre lycée, sorties et famille, elle s'abrutie devant les images de ces maigres filles. Toujours la même rengaine, toujours les mêmes scènes. Elle se fatigue mais continue de sourire à son rêve. Elle mange mais sans manger, elle n'aime pas prendre du poids, elle ne s'aimait pas et veut changer, mais de toute façon, elle pense que personne ne la comprendra. Elle monte dans sa chambre et dort, puisque c'est tout ce qu'elle a à faire de toute façons.

Le lendemain, même journée. La semaine après, même schéma. Journée de cours, sortie. La routine « métro-boulot-dodo » s'appliquait parfaitement à elle. Mais plus le temps passait, plus Natacha maigrissait ; moins Natacha ne mangeait ; plus sa famille s'inquiétait. Et plus elle perdait, plus elle se détruisait. Elle était entré dans ce cercle vicieux dont on ne peut se défaire. Elle n'avait rien d'autre à faire.

Ses joues se creusaient, son ventre rapetissait, ses jambes faiblissaient. Quand elle montait sur la balance, elle était heureuse. Mais son sourire montrait à quel point elle ne l'était pas. Un faux sourire qui lui servait de bouée de secours.

« - Chouette, encore... 40 kilos, dit Natacha après son régime de deux mois. »

Natacha descendait alors de l'appareil, et elle partait dans sa chambre fourrer le nez dans ses magazines jusqu'à son sommeil. Mais chaque journée encore, elle s'affaiblissait. Elle perdait ses forces à chaque fois que le soleil se levait, elle gardait courage malgré tous les problèmes que son obsession lui causait...

Oui, c'était devenu une obsession, elle était en train de se perdre dans sa multitude d'illusion, pourtant, elle ne prenait pas l'autre option. Elle était de plus en plus à fleur de peau, elle était à bout de nerf et pourtant elle ne se nourrissait pas. Elle souriait maintenant, devenue comme les filles qu'elle voyait dans les magazines et à la télé en étant enfant. Mais sa maigreur est peine, et elle continue de se diriger vers ses sirènes.

« - Ecoutez messieurs dames... Votre fille pèse 35 kilos. On ne peut plus la laisser dans cet état, sinon, elle risque de décéder. »

La voix du médecin était sans appel. Elle voulait ressembler à ces filles dans les livres, la voilà servie. Comprenez-la, aussi. C'était son rêve, de faire taire tous ces souvenirs dans son esprit. Natacha était la petite aux formes généreuses, celle qu'on surnommait aussi « la peureuse ». Natacha était celle qui pesait plus de soixante-dix kilos, celle pour qui l'amour était faux. Et maintenant, Natacha n'était pas mieux, la voilà avec des yeux creux, perdu dans ses illusions, rongé par ses démons. Natacha n'était plus grosse, mais la voilà devenue fausse. Elle a fini à l'hôpital pour son but qui lui était fatal. Natacha a voulu maigrir, elle a failli mourir. Natacha a voulu combattre les voix dans son esprit ; elle a réussi, mais la voilà vaincue par sa maladie, la voilà réduite à l'impuissance par la beauté et son envie, la voilà rendue esclave de son corps, la voilà enchaînée par son anorexie."

- Maigreur maladive, 27 juillet 2014