Chapitre 1 : Till

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Quand on y repense, avec le recul, tout cela a commencé si simplement, d'une petite chose banale. Après une grande tournée européenne pour notre dernier album Liebe ist für alle da, on s'est octroyé un mois de repos bien mérité. On était passé en Allemagne, bien évidemment, notre pays d'origine, en France, en Russie, en Italie, en Espagne, en Angleterre et en Irlande. Les publics étaient déchaînés, à transpirer, limite en transe lorsque nous jouions nos musiques. Ils chantaient à ma place, connaissant les paroles de pratiquement toutes nos chansons par cœur. On sentait en eux qu'ils aimaient ce que l'on faisait. On n'avait jamais été déçus de nos publics, quel que soit le pays. Tous excités de nous voir à la sortie des coulisses, à nous demander des autographes, à nous féliciter et surtout, le fait de voir cette petite lueur de satisfaction, de bonheur immense que l'on distinguait clairement au fond de leurs yeux nous plaisait avant tout. Cela nous poussait à nous dépasser et à assurer comme des bêtes.

On s'était décidé à partir en France, du côté du Nord. Le climat frais nous convenait mieux que la chaleur du Sud. Bien sûr le Sud a son charme, ses plages, sa gastronomie méditerranéenne, son ambiance largement plus farniente que le nord... De plus, nous nous sentions un peu plus chez nous dans le Nord, au vu du passé allemand qui régnait, surtout en Lorraine et en Alsace. Ils avaient aussi un peu le genre de nourriture, mais avec la touche française, bien évidemment. On y avait déjà séjourné, et c'était notre petit coin de paradis. Notre petit paradis secret. Et cette année, sans crier gare, nous avons tous été chamboulés. Enfin... Moi plus que les autres. Je le concède.

Nous profitions du trajet en train pour dormir, écouter de la musique, mais surtout reprendre des forces. On s'imaginait déjà en vacances, alors qu'elles n'avaient pas réellement commencé. Nous en salivions par avance. Nous nous étions concocté un petit programme comme on les aimait. On n'était pas que des musiciens, dans le fond. On adorait tous autant les uns que les autres le sport. Chacun avait le sien. Basketball, handball, natation, jogging... Nos affaires de sport étaient bien rangées dans nos valises et n'attendaient qu'une seule chose : qu'on les utilise. Après plusieurs heures de route entre Berlin et Strasbourg, on descendit du train. Nous nous dépêchâmes de récupérer notre véhicule de location à l'agence de la gare SNCF. Je voulais conduire, mais j'avais perdu l'habitude des boîtes de vitesses manuelles. Je calai plusieurs fois en voulant sortir du parking. Cette situation déclencha des fous rires dans la voiture. Je pestai tant que je pouvais contre ces fichus véhicules. De toute manière, même lorsque j'ai appris à conduire, quand j'étais jeune, les voitures à boîtes de vitesses manuelles ne m'avaient jamais aimé. Je ne savais toujours pas, après une trentaine d'années, comment j'ai passé mon permis de conduire haut la main. Richard, un des guitaristes, après avoir fini de rire bien sûr, me proposa de prendre ma place au volant, histoire qu'on ne cale pas tous les deux mètres. Je soupirai puis acceptai. Je remis tant bien que mal le point mort puis le frein à main avant de détacher ma ceinture et de descendre. Pourquoi ces fichus véhicules ont une boîte de vitesses manuelle ? On ne peut pas faire uniquement des véhicules à boîte de vitesses automatique ? C'est tellement plus agréable, et surtout plus simple au niveau mécanique. On a juste à accélérer ou freiner selon la situation. Simple et efficace. Je lui cédai donc ma place et on prit la direction de l'hôtel. Il était un peu excentré par rapport à la ville, mais ce n'était pas pour rien. Cet hôtel nous intéressait particulièrement à cause de son complexe sportif et du spa. Le paradis des vacances alliant sport et détente. En une demi-heure nous y étions. Nous demandâmes les clefs des chambres à l'accueil. La réceptionniste semblait très jeune et avait un accent allemand à la française. Autant dire, à mourir de rire. En personnes polies et bien élevées que nous étions, on se retenait de rire. La pauvre fille faisait tout de même l'effort de parler notre langue. On s'installa, chacun dans notre chambre. La mienne avait une ambiance zen, les murs étaient gris et vert pastel, la moquette était douce et du même gris que le mur. Un lit king size trônait au milieu de la pièce. En grand enfant que je suis, je lâchai ma grosse valise et courus en direction du lit pour y sauter dessus. Les couvertures étaient d'une douceur apaisante. Je me tournai sur le dos puis me redressai pour m'asseoir correctement. Je me déchaussai et laissai tomber mes Rangers sur le sol. Je me remis debout pour fermer la porte et faire rouler ma valise vers l'armoire, que j'ouvris. Je fis de même avec ma valise et mes affaires ne tardèrent pas à être rangées sur les étagères et cintres. Ma trousse de toilette finit dans la salle de bain, sur le bord de l'immense lavabo d'un blanc éclatant. J'inspectai aussi la douche. La douche italienne, en carrelage gris brut, était grande et pouvait contenir deux ou trois personnes sans problème. C'était le genre de chambre simple, mais dans laquelle on se sent bien, au calme. Totalement ambiance zen. Après une tournée internationale, rien de mieux que ce genre d'ambiance.

Le groupe vint me trouver en proposant une super idée : aller faire un tour au spa. J'adhérai totalement à cette idée. Rien de mieux, pour commencer notre séjour, que d'aller se faire masser et de se détendre dans les bains à remous. On embarqua, chacun avec nous dans un petit sac des affaires de bain. On se présenta à l'accueil du spa. La demoiselle à l'accueil avait l'air un peu effrayé. Nous étions tous de gros gabarits, du moins à côté des hommes français. Nous devions faire tous au moins un mètre quatre-vingt-dix pour quatre-vingt-dix / cent kilos chacun. De plus on était tous faits de muscles, donc nous ne passions pas inaperçus. L'esthéticienne semblait prendre un peu plus peur lorsque nous lui expliquions que nous voulions des massages et se détendre dans le bain à remous. Elle nous guida dans le dédale de couloirs de la partie spa et nous montra les vestiaires hommes. Nous nous changeâmes et trouvâmes aussi des peignoirs de bain ainsi que des pantoufles. Nous sortîmes du vestiaire en discutant de tout et de rien. Nous fûmes accueillis par une armada d'esthéticiennes. À croire que nous étions si grands qu'une seule esthéticienne n'avait pas assez de ses deux mains pour s'occuper de chacun d'entre nous.

Après une après-midi entière à se détendre, nous ressortîmes de la partie spa aussi mous que du chamallow. C'était la meilleure solution pour se détendre et se requinquer, physiquement parlant. Dès le lendemain, sans trop de doutes, nous attaquerons le sport. Après un très bon dîner dans le restaurant de l'hôtel, nous montâmes chacun dans sa chambre pour dormir. En ce qui me concerne, j'enfilai un jogging et me couchai directement. À peine avais-je rabattu les couettes sur moi que je m'endormis. J'étais tombé comme une masse. Littéralement.

Le lendemain, la grasse matinée s'est imposée et le premier d'entre nous s'est levé vers dix heures trente. À onze heures, tout le monde était levé, en pleine forme, prêt, et surtout déterminé à faire du sport sans compter. Chacun de notre côté, nous enfilâmes nos affaires de sport et nous nous dirigeâmes, presque en courant, vers les terrains de sport. On s'est entraîné chacun de notre côté, selon nos affinités avec le sport. Au bout de deux heures d'entraînement intensif, nous étions vidés. Nous nous retrouvâmes tous dans le hall, dégoulinant de sueur. Les deux jeunes femmes à l'accueil nous regardaient assez bizarrement. Personnellement, je ne savais pas si elles bavaient devant les tas de muscles que nous étions ou bien si elles n'avaient jamais vu de personnes en sueur après l'entraînement. Si ça se trouve, peu de clients utilisaient les terrains pour se défouler et dès que quelqu'un les rentabilisait, cela devenait l'animation de la journée. Tandis que l'on discutait, je les voyais se faire des messes basses avec des sourires allant d'une oreille à l'autre. Vu l'odeur pas très agréable de transpiration que l'on commençait à sentir, nous prîmes la décision de monter dans nos chambre afin de prendre une douche. Une fois propre, j'enfilai des vêtements propres, un jean, un débardeur blanc et une paire de tongs. J'attrapai aussi une sacoche pour y fourguer dedans mon portefeuille et mes papiers d'identité. Je pris aussi, avant de partir, une paire de lunettes de soleil. Je sortis de ma chambre et me dirigeai vers le hall, où nous nous étions donné rendez-vous une petite heure plus tôt.


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