9/ Chez moi

52 6 5
                                    

Comment aurais-je pu croire que rentrer chez moi après tout ce qui venait de m'arriver aller être simple ? J'avais vu et entendu trop de chose pour me remettre tranquillement à vivre sans penser à ce qui venait de se passer. Alors que je marchais pantelante dans les rues animées de la Zone, j'essayai de remettre de l'ordre dans mes pensées. Le terrifiant visage inhumain de la jeune femme que j'avais sauvé me retourna l'estomac. Elle avait rugi de colère quand Samwell l'avait prise dans ses bras. Le son rauque qui était sortie de sa bouche fondue se répétait en boucle dans mes oreilles si bien que je n'entendai que ça et mon cœur qui battait à tout rompre. Je ne savais plus quoi penser, plus comment agir, plus comment oublier. Tout se chamboulait dans mon crâne comme une nuée d'insecte carnivore s'abattant sur de chair fraîchement morte. Cette image glauque me fit grimacer si bien que je me forçai à reprendre une réflexion plus calme et sereine.

Qu'allais-je dire quand je rentrerais si ma famille avait remarqué mon absence ? Il devait être un peu plus de deux heures de l'après-midi et les rues commençaient à lentement se remplir. Une petite fille et sa mère passèrent près de moi et l'enfant me fixa comme si elle me reconnaissait. C'était peu probable avec ces vêtements mais je ne voulus pas prendre plus de risque et remis lentement ma capuche sur mes cheveux clairs pour passer inaperçu. Mes efforts furent récompensés et je pus traverser toute la Zone sans que rien ne vienne perturber ma marche. La maison du Doyen se trouvait dans un coin reculé de la Zone de façon à ne pas être trop remarquée. Je me pris à retourner encore et encore la scène qui s'était produit chez le vieil homme dans ma tête. Sa maison n'était pas très fournie en objets personnels. Je n'avais ni vu de photos, ni de statuettes sur les étagères, mais plus des livres et de la paperasse qui traînaient çà et là dans le salon. Quel métier pouvait-il avoir pour devoir remplir autant de feuilles ? C'était un mystère. Quoi qu'il en soit, j'allais me renseigner auprès d'Ether pour être tout à fait certaine que ce vil personnage quitterait notre cité. Le Magistère était informé de tous les déplacements des personnes ayant eu affaire à la justice et cet homme y avait eu le droit bien avant son arrivée dans l'Ouest.

Alors que j'arrivais dans les rues animées du Labyrinthe, je surpris une patrouille de la Garde Royale qui marchait d'un pas lent et semblait surveiller les passants. C'était une patrouille banale de sécurité pourtant quand je tombais dans un regard émeraude visiblement inquiet à quelque mettre de moi je me figeai. Atlas avait revêtu la tenue de la Garde Royale qui se composait d'un long manteau noir avec des coutures dorées, un tee-shirt en flanelle noir et un pantalon en matière élastique moulant qui permettait de se battre sans être gêné. J'entendis ses grosses bottes tambourinées sur le sol signe qu'il fendait la foule d'un pas pressé pour me rejoindre alors que j'étais incapable de bouger. La seconde d'après, il m'avait enserré dans ses bras et ma tête reposait sur son torse. Mes yeux se sont fermés alors que je sentais ses mains glisser dans mes cheveux pour coller un peu plus ma tête contre lui. J'entendais le battement régulier et rassurant de son cœur et calais ma respiration sur la sienne.

-Ne me refais plus jamais une chose pareille, Noahlia, souffla-t-il en m'embrassant le haut du crâne avec douceur. Où étais-tu passés ? Je t'ai cherché partout. J'étais très inquiet et...

-Chez mon ami Cara, mentis-je en songeant que c'était le plus crédible.

Je sentis les muscles de mon frère se raidir sous mes doigts et sa respiration se faire plus bruyante.

-Tu veux dire la même Cara qui est à l'infirmerie en ce moment même ? Fit-il d'une voix où vibrait soudain une terrible colère sourde.

Je me suis séparée de lui pour sonder son regard. Que faisais mon amie à l'infirmerie ? Et comment Atlas était-il entré en contact avec elle ? Je ne trouvais pas les réponses dans le regard lourds de sous entendue qu'il me jetait. Il me fusillait du regard. Jamais je n'avais vu de tels reproches dans les yeux habituellement si doux de mon frère. L'émeraude dans son regard s'était transformée en un vert sombre et menaçant.

VidyutaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant